Quelle joie ?
La joie peut-elle se commander ? Ce n’est pas là une simple question théorique. Voici, en effet, que nous arrivons à ce temps rêvé du calendrier juif, à cette période merveilleuse : le mois de Adar. Ce nom seul renferme une telle puissance qu’il se suffit à lui-même. A peine a-t-on prononcé «Adar» que tout est dit ; dans la conscience, se bousculent les images de fêtes, de rires et de bonheur sans fin. Adar est là et c’est déjà le rayonnement de Pourim qui éclaire notre horizon. Le Talmud n’affirme-t-il pas, péremptoire, que «quand entre Adar, on multiple la joie» ? Pourtant, chacun ressent que, si tout cela est vrai dans le temps éternel du peuple juif, nous vivons au quotidien une période dont la tension est sensible, dont les difficultés donnent une étrange coloration aux jours qui passent. Il n’est cependant pas question que cela écarte une joie qui porte en elle toute la force de la création divine. Si elle est prescrite aujourd’hui, c’est d’abord parce que, d’elle-même, elle s’impose à tous. D’une certaine manière, sa présence modifie la donne. Il existe plusieurs façons de parvenir à la joie. Celle-ci peut être causée par une satisfaction personnelle, une réussite qui couronne un effort. Elle peut être motivée par la raison ou par l’émotion. Quelle que ce soit son origine, elle est alors limitée à elle-même et, si sa cause venait à s’estomper, elle-même disparaîtrait bien vite. De fait, lorsque la joie est le produit de la condition humaine, elle ne peut durer davantage que l’homme qui en est le porteur. Elle ne peut qu’être aussi changeante que les humeurs de la créature. Lorsque la joie est affranchie de telles contingences, qu’elle est d’abord ce sentiment qui repose sur une harmonie générale de l’univers telle qu’établie par son Créateur, elle cesse d’être soumise à l’éphémère et parvient à une autre dimension, celle que D.ieu a permis que l’on atteigne. Dans cette optique, la joie fait plus que se commander. Elle s’installe en tous ceux qui veulent l’accueillir et elle emporte chacun au-delà des limites coutumières. C’est justement dans ce temps-là que nous entrons. Conscients d’une certaine grisaille ambiante, presque d’une désespérance, au fait des formes diverses de l’obscurité – des plus barbares aux plus socialement correctes – nous savons vivre cette phase nouvelle et nous en pénétrer. Nous savons nous élever avec elle et préparer ainsi le temps où la joie sera éternelle car l’éternité sera de ce monde : le temps de Machia’h.
Haim Nisenbaum
Un pauvre sur un âne
Zacharie, dans sa prophétie (9:9), décrit Machia’h comme «un pauvre sur un âne». Il faut comprendre le sens profond de cette idée. La révélation divine au temps de Machia’h ne sera pas le résultat d’un «effort d’en bas». Cela signifie qu’elle ne proviendra pas de l’œuvre spirituelle accomplie par l’homme. Au contraire, elle rayonnera comme un don de D.ieu si élevé qu’aucune initiative humaine ne pourrait le susciter. C’est pourquoi Machia’h est qualifié de «pauvre». (d’après Or Hatorah, p.260) H.N.
Terouma : Le jeu d’un enfant
Qui ne souhaite un monde meilleur ? Un monde où tous nos désirs seraient exaucés et où tous nos rêves deviendraient réalité. Mais quel est le sens de ce fantasme ? Qu’espérons-nous réellement ? Aspirons-nous à une vie de confort et de plaisirs, libérée de toutes souffrances et misères ? Un monde de dévouement et d’empathie, d’amitié et d’amour ? Ou peut-être désirons-nous davantage de compréhension et de conscience : comprendre le mystère de la création, entrer dans une union mystique avec le Divin ? Il n’existe pas deux personnes partageant la même idée d’ « un monde meilleur ». Apparemment, nos rêves et nos fantasmes sont les produits de notre personnalité, de nos émotions et de nos expériences. Derrière cette «toile de fond», comment devons-nous comprendre le concept de l’ «Ere Messianique», un sujet fondamental dans le Judaïsme ? Est-ce un rêve d’enfant, un outil utile mais fictif pour pouvoir affronter les difficultés des persécutions et les épreuves de la vie ? Ou bien représente-t-il quelque chose de beaucoup plus profond : la clé de tout le mystère de la Création, le pourquoi et le comment de toute existence ? Tous ceux qui sont bien versés dans la pensée et la philosophie juives traditionnelles pencheront probablement pour la seconde hypothèse. D’importants ouvrages cabalistes et ‘hassidiques ont été consacrés à explorer la profonde signification mystique de l’Ere Messianique. Mais l’on ne peut blâmer ceux qui croient que tout ce concept messianique n’est rien de plus qu’une belle histoire pour enfants. Après tout, les pratiques de l’éducation juive traditionnelles ont toujours décrit l’Ere Messianique aux enfants de la manière la plus merveilleuse et fantastique. Certaines font référence aux bonbons poussant sur les arbres, aux lions et aux loups coexistant comme des animaux domestiques et aux rues scintillantes de diamants et de joyaux. L’érudit saisira vite que l’interprétation littérale de ces histoires n’est rien de plus qu’une image simplifiée d’un concept très profond et très raffiné. L’enfant, en mûrissant, commencera à comprendre la profondeur et l’approche subtile de ce sujet. Il dépassera ses envies irréductibles de bonbons et de confort facile et commencera à davantage se concentrer sur les joies de la vie plus spirituelles et permanentes. Il comprendra le véritable sens des célèbres mots de Maïmonide : «tous les mets délicats seront aussi librement accessibles que la poussière». Tous les plaisirs et les délices matériels seront pour nous aussi intéressants que la poussière ! Mais dans ce cas, pourquoi introduire le concept de Machia’h à un âge si jeune ? Pourquoi attirer les enfants avec des images de bonbons poussant sur les arbres alors que nous pourrions nous efforcer de développer en eux un amour plus sophistiqué des véritables valeurs de la vie ? Peut-être devrions-nous attendre, avant d’introduire ce concept, que l’enfant soit assez mûr pour en apprécier la profondeur ? Il peut même paraître déconcertant, pour nous, adultes épris de rationalité, de les entendre chanter à tue-tête : «nous voulons Machia’h maintenant», comme s’ils encourageaient leur équipe sportive favorite ! Est-ce l’expression adéquate d’un concept si spirituel et divin ? Ne s’agit-il pas d’une profanation de quelque chose de saint et sacré ? Pour poser ce problème dans la perspective de la Torah, examinons la structure de l’un des objets les plus importants du Temple de Jérusalem : l’Arche Sainte. Elle était placée dans le Saint des Saints, le lieu le plus spirituellement élevé de tout le Temple et elle contenait les Tables de la Loi que D.ieu avait présentées au Peuple Juif, par l’intermédiaire de Moché. Etant donné que l’Arche était une structure creuse, un placage d’or fut confectionné pour la couvrir : la Kaporet. Elle servait de protection au contenu de l’Arche. Mais elle possédait également une autre fonction. Le mot hébreu Kaporet vient de la racine kapère qui signifie «pardon». Ainsi la Kaporet servait-elle à pardonner les péchés du Peuple Juif. Taillés dans la Kaporet, apparaissait la représentation de deux chérubins, les kerouvim, un petit garçon et une petite fille. Ces deux kerouvim ont une signification cabalistique très profonde. Ils représentent l’union des énergies masculine et féminine de D.ieu. Et pourtant, ces énergies ne sont pas représentées par l’image d’un grand-père patriarcal, avec une longue barbe et de sa compagne non moins imposante. Les formes choisies étaient précisément celles de deux enfants, pour nous montrer, de façon incontestable, l’amour immense que D.ieu porte aux enfants, ce qu’atteste le verset : «car Israël est un enfant et Je l’aime». Décrire des concepts spirituels en termes accessibles à des enfants n’est pas une «profanation» de quelque chose qui est sacré. D.ieu, dans Son grand amour pour les enfants vient volontairement «S’abaisser», pour ainsi dire, dans les domaines que même un enfant peut apprécier. En réalité, le fait que la représentation de deux enfants apparaisse dans un lieu si important du Temple indique une notion encore plus profonde. Nous avons tendance à croire que l’enfance représente une étape initiale de la vie, une étape que l’on doit dépasser en mûrissant et en nous développant intellectuellement. Mais le placage de l’Arche envoie un message bien différent. Qu’est-ce qui est placé au-dessus de l’Arche, comme bouclier, comme protection et comme moyen de pardon ? L’enfant juif. Ainsi, dans la perspective divine, l’enfant est-il l’étape ultime et la plus sainte de la vie. Comment se fait-il que nous, adultes, ne ressentions-nous plus les mêmes plaisirs dans les bonbons, les jeux et les jouets ? Pourquoi jette-t-on un regard bienveillant sur un enfant qui jouit de plaisirs matériels alors que s’il s’agissait d’un adulte, on lui reprocherait d’être immature, glouton ou insouciant ? Avons-nous atteint une prise de conscience ou avons-nous perdu un don très spécial ? La réponse consiste en la combinaison des deux. Nous avons gagné une conscience intellectuelle. Nous commençons à comprendre que tout a été créé dans un but précis et doit être utilisé à une fin supérieure. Nous commençons à ressentir de la gêne si nous ne faisons qu’assouvir des plaisirs égoïstes. Mais simultanément, ce raffinement de notre pensée nous fait perdre le contact avec ce côté essentiellement divin de notre nature. Une dichotomie s’introduit dans notre pensée. Dans notre perception, le matériel et le spirituel représentent deux mondes contraires. Ce qui est agréable, physiquement, doit être rejeté, supprimé ou tout au moins relégué à un statut secondaire, pour pouvoir évoluer spirituellement. Pourtant, dans un monde harmonieux, il n’existe pas de telles fragmentations. Toute l’existence est le reflet d’une vérité unique et unifiée. C’est la raison pour laquelle l’expérience spirituelle la plus profonde satisfait également au plan physique. Imaginez que tous vos désirs soient exaucés et tous vos objectifs comblés dans un but unique. Imaginez être capables d’actualiser votre potentiel intérieur sans qu’il n’y ait quelque conflit que ce soit venant d’une source intérieure ou extérieure. Dans un tel monde, manger une nourriture agréable et apprécier la bienveillance divine qui a créé ces aliments ne serait pas moins sublime que méditer sur les mystères les plus profonds de la création. Et cette conscience est précisément celle que possède essentiellement chaque enfant depuis sa naissance. Il se peut que l’enfant n’en ait pas conscience intellectuellement, que cette connaissance se gagne par la maturité et l’éducation. Mais le fait qu’un enfant puisse se réjouir, sans en être intimidé, des délices et des plaisirs de ce monde indique un statut spirituel élevé, là où la matérialité ne menace ni ne nie la spiritualité. Il est temps de regarder l’enfance d’un œil nouveau. Essayons d’insuffler à nos besoins et à nos assouvissements matériels la conscience du Divin. Rappelons-nous que le but ultime est d’essayer de réunir tous les composants de notre personnalité, du plus élémentaire au plus raffiné, en une unité harmonieuse. Echappons à la culpabilité. D.ieu ne nous regarde pas d’un air accusateur. Imaginons plutôt la Présence Divine protectrice planant avec amour au-dessus des kerouvim. Imaginons notre Père à nous tous, souriant avec bonté à tous Ses enfants car réellement : «Israël est un enfant et Je l’aime».
Est-il permis de faire la Amida en lisant sur un iPhone ?
Depuis quelques temps, nombreux sont ceux qui lisent le texte de la prière sur un téléphone portable. Ceci soulève quelques questions – spécialement pour la Amida, la prière principale également appelée Chemoné Essré : - Il est écrit dans le Choul’hane Arou’h Harav : «Quand il prie, il ne tiendra pas dans sa main des Téfilines, un livre saint, une assiette pleine, un couteau, de l’argent ou du pain car il craint de les faire tomber et ne peut donc pas se consacrer entièrement aux intentions profondes du texte. Cependant, il peut tenir d’autres objets qu’il ne craint pas de faire tomber…» (Par contre, il est permis de tenir un livre de prières qui permet d’éveiller le cœur à la ferveur). Il est évident qu’on craint de faire tomber un téléphone portable qui risque de se briser. - Il arrive souvent dans ces téléphones perfectionnés que des messages apparaissent soudain, alors qu’on est en train de prier : souvent ce n’est pas seulement le nom de la personne qui envoie le message qui s’affiche mais aussi le message lui-même. Bien évidemment, ceci n’est pas fait pour aider la personne à se concentrer sur la prière. - Le texte de la prière n’est souvent pas complet, il arrive qu’il manque les paragraphes relatifs par exemple à Roch ‘Hodech, les jeûnes ou les petites fêtes. Rabbi Chnéor Zalman écrit : «Avant de prier, il convient de bien connaître le texte qu’on va lire afin de ne pas oublier les passages inhabituels et d’être obligé de se renseigner par la suite comment agir si on a oublié telle ou telle insertion». - Enfin, il est écrit qu’on doit se considérer comme un serviteur devant son maître pendant la prière, ce qui est impossible quand on tient ce genre d’appareil dans les mains. Malgré tout, il est préférable de prier à l’aide d’un téléphone portable plutôt que de prier par cœur si on ne dispose pas d’un livre de prières. Rabbi Chnéor Zalman précise que prier à l’aide d’un livre de prières, en regardant bien les lettres permet de mieux se concentrer sur le sens des mots. F. L. (d’après Rav Shmuel Bistritzky Kehilot – Rabbané Europa n°54)
Redescendre de la montagne
Appelons-la Avigaïl : comme des centaines de jeunes Israéliens, après son service militaire, elle était partie en Inde découvrir le vaste monde et surtout chercher «La vérité». Mais contrairement à ses camarades, elle avait enfin trouvé ! Comme eux, elle avait expérimenté les différentes spiritualités, les gourous, les yogis, les régimes végétariens et les rites les plus contraignants. Peu enthousiaste, elle s’apprêtait à retourner, déçue, quand elle entendit parler d’une secte différente qui vivait au fond de la forêt. Il lui fallut plusieurs semaines d’un voyage harassant à travers la jungle mais finalement elle trouva ce groupe et… «La Vérité» ! Cette fois, c’était vrai ! Le gourou était humble et calme mais animé d’une flamme intense remarquable. Le groupe n’acceptait pas facilement de nouveaux membres, l’initiation était rude, la nourriture rare, le confort inexistant mais Avigaïl ressentait qu’enfin sa vie avait un sens et, de semaine en semaine, elle s’élevait à des niveaux spirituels dignes d’éloges de la part de son nouveau mentor. Finalement, le gourou décida qu’elle était mûre pour accéder au niveau suprême : elle pouvait devenir prêtresse ! Le bonheur assuré pour l’éternité, la supériorité spirituelle sur tous les autres êtres humains… Elle avait néanmoins gardé le contact avec ses parents à qui elle téléphonait quelques minutes chaque semaine, gardant plus ou moins le silence sur ses véritables expériences en Inde. Mais cette fois-ci, elle ne put contenir sa joie et leur annonça qu’ils pouvaient être fiers d’elle puisqu’elle avait atteint le niveau suprême de spiritualité ! Une prêtresse ! Loin d’être pratiquants, ses parents n’étaient tout de même pas prêts à accepter une telle démarche. Mais leurs protestations restèrent vaines : qu’avaient-ils d’autre à lui proposer ? L’argent ? Une carrière ? Le mariage ? La vie de famille ? A quoi bon, elle avait trouvé la vérité et rien ne l’empêcherait plus d’être enfin heureuse. Mais justement à ce moment, ses parents lui annoncèrent que sa grand-mère adorée venait de décéder. Peinée, elle décida de reprendre le premier avion pour assister aux funérailles en se promettant de rentrer «à la maison» en Inde le plus rapidement possible. Ses parents étaient décidés à lui faire changer d’avis. Ils supplièrent des rabbins, des professeurs et des psychologues de s’occuper d’elle mais ils avaient sous-estimé sa détermination. Le Chabbat après-midi, son père insista pour qu’elle l’accompagne à un cours donné par Rav Meir Halperin, l’émissaire du Rabbi dans leur synagogue de ‘Holon. Celui-ci expliquait justement que l’obligation de rendre un objet à son propriétaire semblait logique mais, comme le précisait le Rabbi de Loubavitch – c’était surtout et même essentiellement un commandement de D.ieu qui devait être accompli comme toutes les autres Mitsvot et non uniquement par bonté d’âme. Avigaïl explosa : «Et pourquoi pas accomplir le bien parce qu’on le ressent comme tel ? Tout le monde sait qu’il est normal de rendre un objet perdu, ce n’est que justice ! Peut-être votre D.ieu se permet de vous donner des commandements aussi évidents mais pas le mien qui est pure spiritualité, en harmonie totale avec la nature… !» Le rabbin lui répondit poliment, ils discutèrent un peu après le cours, il insistait sur le fait que l’homme sans Torah peut devenir pire qu’un animal mais elle ne pensait qu’à son gourou et refusait son raisonnement. Le lendemain, elle reprenait l’avion. Dès son arrivée, l’initiation reprit : il s’agissait maintenant de gravir avec le gourou et ses assistants une haute montagne, de laisser le monde profane en bas et de s’élever vers la sainteté. Le paysage était sublime, le but allait enfin être atteint ! Environ une heure avant l’arrivée au sommet, le gourou remarqua un objet sur le sol. Il se pencha, le ramassa : c’était un porte-monnaie sans doute perdu par un des randonneurs de la cordée précédente. Le gourou le fourra dans sa poche. Avigaïl avait remarqué l’incident et suggéra au gourou de vérifier s’il y avait peut-être des signes d’identification du propriétaire dans le porte-monnaie. - Non ! répondit calmement le gourou du haut de ses connaissances : ma divinité me l’a donné pour des raisons à elle seule connues et je l‘accepte ! Avigaïl était choquée : les mots de Rav Halperin résonnaient dans sa tête : sans Torah, l’homme peut se comporter comme un animal, sans conscience du bien et du mal… Quand ils arrivèrent au sommet, le gourou demanda au groupe qui était prêt à s’engager au service de sa divinité : tous répondirent oui avec enthousiasme… Sauf Avigaïl qui entreprit immédiatement de redescendre de la montagne. Elle prit le premier avion possible pour quitter immédiatement cet environnement d’idolâtrie, d’impureté et de mensonges. Elle se plongea cette fois dans l’étude approfondie du judaïsme et fonda un foyer durablement attaché à ses valeurs et traditions millénaires. De fait, le gourou avait eu raison sur un point : D.ieu a des raisons et des plans connus de Lui seul et nul ne peut les prévoir… Rav Tuvia Bolton – ohrtmimim.org/torah Traduit par Feiga Lubecki