Semaine 9

  • Ki Tissa
Editorial

Pourim ? Et après…

Cette semaine a un début lumineux. Elle voit la fête de Pourim régner dans tout son éclat, au point que la grisaille du monde semble avoir disparu. Lorsque le jour se termine, le lendemain éclaire encore. N’est-ce pas ce «Pourim de Suse», où toute l’allégresse vécue la veille surgit de nouveau dans ce lieu si différent de tous, Jérusalem ? Mais ensuite, tout va-t-il vraiment recommencer comme si de rien n’était, comme si nous n’avions fait que vivre une sorte de pause mais que, fondamentalement, rien n’avait changé ? Pourtant, le mois d’Adar continue avec sa devise éternelle : «multiplions la joie !» Pourtant, voici que nous nous dirigeons vers la libération incarnée par Pessa’h – déjà dans si peu de temps. Nos sages ont enseigné : «On rapproche une délivrance d’une autre – celle de Pourim et celle de Pessa’h.» C’est ainsi non comme une fin de voyage que nous vivons mais bien comme l’ouverture d’un chemin. Et si nous choisissions de l’emprunter ? De fait, puisque c’est d’elle qu’il est question, la liberté est une conquête de chaque jour. Difficile de ne pas relever le constat de nos sages : «A présent – entendons «après les événements de Pourim» – nous sommes toujours soumis à Assuérus.» En d’autres termes, malgré la victoire miraculeuse que nous avons fêtée, l’exil de Babylone ne se termina pas avec elle. Le peuple juif, toujours vivant, dans une situation matérielle et spirituelle meilleure, ne retrouva pas alors sa glorieuse indépendance avec sa terre et son Temple. Cela ne devait arriver que plus tard. Pourtant, même si c’était encore imparfait, la liberté était pourtant déjà au rendez-vous. La longue marche de notre peuple se poursuivait sans crainte, c’était en soi un acquis incomparable. Tout cela éveille sans doute en chacun bien des échos. Certes, les situations historiques n’ont aucun rapport l’une avec l’autre. Qui pourrait comparer la condition des Hébreux sortant d’Egypte à celle des Juifs vainquant leurs ennemis en Perse ou à celle de notre temps ? Pourtant, l’attente est toujours là, toujours pressante, toujours attentive et toujours enthousiaste. C’est une attente en forme de liberté d’ores et déjà assumée. Liberté d’être soi-même, de vivre comme nous le souhaitons, porteurs de notre message ancestral. La liberté finalement est d’abord une affaire de lumière.
 
Haim Nisenbaum

Etincelles de Machiah

Moïse en Cohen Gadol

Lorsque Machia’h viendra, les Léviim deviendront tous des Cohanim, explique le Ari Zal dans son Likoutei Torah. Or nous savons que Moïse était lui-même un Lévi. Il en ressort qu’il assumera alors la fonction de Cohen Gadol. (d’après Or Hatorah, Chemot, p. 1586) H.N.

Vivre avec la Paracha

Ki Tissa : Unis pour toujours

Lors de l’épisode du buisson ardent, Moché recula devant la tâche que D.ieu lui assignait. Et il en avait toutes les bonnes raisons. Accepter cette mission signifierait ébranler, voire mettre en danger, sa vie. Pour quelles raisons devrait-il accepter de se rendre en Egypte et sauver les Hébreux ? Ce qui arriva à convaincre Moché furent les paroles de D.ieu : «quand tu sortiras le peuple d’Egypte, tu serviras D.ieu sur cette montagne» (Chemot 3 :12). C’est sur la même montagne que celle où il avait, pour la première fois, rencontré D.ieu, que les Hébreux étaient destinés à recevoir la Torah (Rachi : ad loc.). La Torah ! La Sagesse de D.ieu ! Finalement un code moral divin rigoureux ! Las de la corruption et de l’immoralité auxquelles il avait été témoin dans le palais du Pharaon, allant même jusqu’à mettre sa vie en jeu pour protester contre ces injustices, Moché n’avait pas renoncé à tenter d’améliorer le monde. Après avoir été chassé d’Egypte, il avait fini par accepter de vivre la vie d’un citoyen privé et avait commencé à agir pour opérer des changements dans son environnement proche et non à un niveau national. Mais tout cela allait être bouleversé. A présent, D.ieu lui offrait une nouvelle occasion de s’impliquer. Il allait pouvoir diriger un peuple qui servirait D.ieu et le monde. Ils seraient responsables d’apporter la lumière morale aux nations du monde. Il ne s’agissait pas simplement de sauver un peuple de l’esclavage mais de sauver le monde. C’était une offre qu’il ne pouvait refuser. Il capitula. Mais comme en atteste le texte, tout n’allait pas être si simple. Les Hébreux s’étaient plongés dans le paganisme et étaient loin d’être ou de devenir des moralistes. Mais cela ne l’empêcha pas de nourrir son rêve d’une révélation divine historique au sommet d’une montagne du désert, où sa troupe de pécheurs serait transformée en saints. C’est ce rêve qui le porta à travers ces jours difficiles. Un rêve brisé Le jour arriva où ils se retrouvèrent au pied de la montagne. «Et D.ieu l’appela de la montagne lui disant : ainsi parleras-tu aux fils d’Israël, ‘…si vous M’écoutez attentivement et que vous respectez Mon alliance, vous serez pour Moi un trésor parmi tous les peuples. Vous serez pour Moi un royaume de prêtres et une nation sainte’»(Chemot 19 : 3,5,6). Tout rentrait dans l’ordre Et enfin : «D.ieu prononça toutes ces paroles, en ces termes : ‘Je suis l’E.ternel votre D.ieu… Vous ne ferez pas d’image gravée… Vous ne vous prosternerez pas devant elle ni ne l’adorerez… Ne prononcez pas le Nom de D.ieu en vain… Rappelez-vous du Chabbat… Honorez votre père et votre mère… Ne tuez pas... ni ne commettez d’adultère… ni ne volez… ni ne portez de faux témoignage... ni n’enviez…» Moché était en extase. Mais, pendant que Moché était occupé à explorer les hauteurs de la Divinité, son peuple, quant à lui, s’occupait à descendre dans les profondeurs de l’idolâtrie. «Moché se retourna et descendit de la montagne avec les Deux Tables du Témoignage dans ses mains. Il arriva, alors qu’il s’approchait du camp… qu’il vit le veau et les danses. La colère de Moché s’enflamma, il jeta les tables de ses mains et les brisa…». (Chemot 32 : 15,19) Hélas, avec les Tables, c’étaient les rêves de Moché qui se brisaient. Un amour inconditionnel Quelle fut la réponse de Moché devant l’effondrement des aspirations de sa vie ? Comment réagit-il à l’échec de son peuple pour exploiter son potentiel ? N’importe quel autre homme aurait été découragé par ce peuple qui lui avait été confié. N’importe quel autre homme aurait accepté avec empressement la proposition de D.ieu : «Laisse ma colère brûler contre eux et Je les annihilerai et Je ferai de toi une grande nation» (Chemot 32 : 10). Mais pas Moché. Il implora D.ieu : «Ce peuple a commis un grave péché en se fabriquant un dieu d’or. Et pourtant pardonne leur faute, sinon, efface-moi de Ton Livre que Tu as écrit ! » (Chemot 32 : 31,32). La profondeur de la réaction de Moché ne réside pas tant dans le fait qu’il ne trouva pas de circonstances atténuantes à des pécheurs impardonnables mais qu’a priori, il n’en chercha pas. Il reconnut clairement leur «grave péché» et n’alla pas plus loin. Il n’y avait pas de «mais» dans ses paroles, seulement un «et». Il n’avança pas l’excuse de leur passé difficile, pas plus qu’il ne promit un meilleur futur. Ce que Moché exprimait était : «mon attachement à eux ne tient plus, s’il a jamais tenu, au rôle qu’ils jouaient dans mes rêves. J’en suis arrivé à les aimer inconditionnellement. C’est pourquoi, si Tu les effaces, efface-moi. Nous sommes inséparables, unis pour toujours.» Et c’est précisément à cet instant que Moché opéra un bouleversement radical. Il enseignait que la valeur d’une personne ne peut se mesurer à ses aptitudes, à ses accomplissements, ni même à sa personnalité. La valeur d’une personne ne peut pas être mesurée du tout. Quelle leçon en tirer ? L’une des plus grandes erreurs que nous pouvons commettre en matière d’éducation est de donner à nos enfants l’impression que leur valeur est quantifiable ou qualifiable et que l’amour que nous leur portons dépend de quelque chose d’autre que du fait qu’ils sont simplement nos enfants. C’est à nous que revient de leur faire le plus beau des dons : la capacité d’aimer autrui, inconditionnellement et également de les doter d’un outil essentiel dans la vie : la capacité de s’aimer eux-mêmes, inconditionnellement.

Le Coin de la Halacha

Qu’est-ce que le ‘Hamets ?

Durant Pessa’h, on n’a le droit ni de posséder ni de consommer du ‘Hamets. Il faudra donc, avant le lundi 25 mars 2013, se débarrasser de tout aliment à base de céréale fermentée comme par exemple : le pain, les céréales, les pâtes, les gâteaux, certains alcools, médicaments et produits d’hygiène. C’est pourquoi on a coutume de bien nettoyer la maison, le magasin, le bureau, la voiture etc. avant Pessa’h, afin d’éliminer toutes les miettes. Pour éviter de posséder, même involontairement du ‘Hamets à Pessa’h, on remplira une procuration de vente, qu’on remettra à un rabbin compétent. Celui-ci se chargera alors de vendre tout le ‘Hamets à un non-Juif. Cette procuration de vente peut être apportée au rabbin ou lui être envoyée par courrier, fax ou Internet et devra lui parvenir au plus tard la veille de Pessa’h, cette année dimanche 24 mars 2013. Il n’est pas nécessaire d’avoir terminé tout son ménage pour dresser la liste de ce qu’on envisage de vendre. Durant tout Pessa’h, on mettra de côté dans des placards fermés à clé tout le ‘Hamets et la vaisselle ‘Hamets que l’on n’utilisera pas durant Pessa’h mais qu’on pourra «récupérer» une heure après la fête qui se termine le mardi 2 avril 2013 à 21h13 (horaires valables pour Paris et sa région).

De Recit de la Semaine

Elle s’appelait Sim’ha…

Jeudi dernier, je me suis rendu avec mon épouse pour une visite de condoléances chez une famille de St Louis, dans l’est de la France, non loin de ma ville, Bâle en Suisse : l’aïeule, Elinora Yelink venait de décéder à un âge avancé. Il était 21 heures quand un homme d’une cinquantaine d’années, coiffé d’une grande Kippa entra et se présenta : «Thomas Yelink, le fils de la défunte». Nous lui avons présenté les paroles traditionnelles de consolation puis il nous raconta son histoire qui nous fit frémir : «Ma défunte mère, Elinora avait dix ans quand les Nazis ont envahi la Tchécoslovaquie. Alors que tous les Juifs de sa ville furent rassemblés pour être envoyés au camp d’extermination de Theresienstadt, ses parents réussirent à la confier à des amis non juifs. Grâce à D.ieu et à des miracles permanents, ses parents survécurent à la déportation et purent récupérer leur fille.» Thomas qui est assis en face de moi naquit dans la ville tchèque de Mimoun. Ni ses parents ni même ses grands-parents ne lui dirent qu’ils étaient juifs et que lui aussi était donc juif. Dans la maison, il n’y avait absolument aucune trace de judaïsme. En 1965, alors qu’il avait neuf ans, sa grand-mère décéda. La coutume de l’endroit voulait que les personnes en deuil revêtent pendant une semaine un ruban noir sur leur manche, ce qu’il fit. Cette même semaine, sa classe partit visiter un musée. L’institutrice qui les accompagnait s’appelait Chtachena (ce nom signifie «joie» en langue tchèque). Mais, contrairement à son nom, cette dame n’était vraiment pas joyeuse, elle était au contraire triste et amère. Alors que les enfants attendaient dans la cour du musée, ils jouèrent comme tous les enfants du monde à «la guerre». Spontanément, ils se divisèrent en deux groupes, les «Russes» et les «Allemands». Thomas fut choisi pour être «l’Allemand» : pour cela, les enfants dessinèrent à la craie une croix gammée sur le ruban noir accroché à sa manche. Très sérieux dans son nouveau rôle, Thomas leva le bras pour exécuter le signe hitlérien en criant le terrible slogan de fidélité au chef nazi - que son nom soit effacé. Il continua dans son rôle et maudit les Juifs, cria «Gauche, droite ! Plus vite…» avec une perfection confondante. Soudain, l’institutrice se précipita vers lui et, sans rien dire, le gifla et le frappa sur le bras sans pitié. Thomas se mit à pleurer de douleur et d’humiliation mais elle continua comme prise d’un accès de rage incontrôlable. Quand Thomas rentra le soir à la maison, il fit part à sa mère Elinora de ce qui lui était arrivé ; choquée, sa mère téléphona immédiatement à l’institutrice et lui demanda avec colère pourquoi elle s’était permis de frapper si durement son fils. L’institutrice se mit à pleurer au téléphone et expliqua : «Je ne m’appelle pas Chtachena mais Lustig (qui signifie «joyeux» en yiddish). J’étais déportée avec votre mère Elinora (la grand-mère de Thomas) dans le camp de Theresienstadt. Quand j’ai vu la croix gammée dessinée sur le bras de votre fils, mes mains se sont mises d’elles-mêmes à le frapper. Je ne parvenais plus à me maîtriser, c’était plus fort que moi !» «A ce moment, continua Thomas, s’est allumée en moi l’étincelle juive présente chez chaque membre de notre peuple (comme je l’appris plus tard)». Il ne pouvait pas voir comment j’avais la chair de poule en l’écoutant. C’était bien à cause de la croix gammée que la triste institutrice Chtachena-Lustig l’avait frappé. Mais l’âme juive de Thomas avait été mise en branle et il se mit à rechercher tout ce qui pouvait de près ou de loin le rapprocher du judaïsme. Dix-huit ans plus tard, en 1983, Thomas se trouva de nouveau en train de souffrir mais cette fois-ci, c’était à cause d’une opération bien particulière : il avait enfin franchi le pas et s’était fait circoncire à Jérusalem. - Thomas ! Choisis maintenant un prénom hébraïque ! lui demanda le Mohel. «Les cris que je poussai à ce moment à Jérusalem me ramenèrent brusquement en arrière, aux cris que j’avais poussés alors dans la cour du musée sous les coups de l’institutrice Chtachena. Spontanément, sans réfléchir, je déclarai : «Sim’ha (joie en hébreu)! Qu’on m’appelle dorénavant Sim’ha ! C’est la moindre des reconnaissances envers cette institutrice grâce à laquelle je suis retourné au judaïsme !» La suite de son parcours ne fut pas simple mais progressivement Thomas se mit à observer les autres Mitsvot ; il dirige actuellement un restaurant cachère à Firenze ! Rav Zalmen Wishedski – émissaire du Rabbi à Bâle (Suisse) Traduit par Feiga Lubecki

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