Lors de «l’Alliance entre les parties», D.ieu dit à Avraham : «Sache que tes enfants seront des étrangers sur une terre qui ne sera pas la leur et ils les asserviront et les feront souffrir… et par la suite, ils sortiront avec de grandes richesses.»

Certes, pour la plus grande partie de notre histoire, nous avons été des étrangers sur une terre qui ne nous appartenait pas. Il y eut l’exil égyptien, l’exil babylonien, l’exil grec et notre présent exil qui commença avec la destruction du Temple par les Romains en 69. L’exil est bien plus qu’un départ du pays natal.

Un individu en exil est arraché à l’environnement qui nourrit son mode de vie et son identité spirituelle. En exil, c’est sur lui seul que tout repose.

Pourquoi sommes-nous en exil ? L’exil est généralement considéré comme une punition pour des erreurs collectives ou individuelles. En fait, les prophètes le décrivent comme tel et dans nos prières, nous nous lamentons sur le fait qu’ «à cause de nos péchés nous avons été exilés de notre terre». Mais si l’exil n’avait pour but que de corriger nos fautes, son intensité devrait diminuer peu à peu. Et pourtant, nous observons qu’il va s’assombrissant. Plus complexe encore est le fait que notre situation d’exil avait été prédite à Avraham, dans son alliance avec D.ieu, comme partie intégrante de la mission historique du peuple Juif, bien longtemps avant que les péchés que l’exil expie ne soient accomplis.

On peut avoir une clé du sens profond de l’exil dans «les grandes richesses» qui allaient résulter du séjour du Peuple Juif en Egypte, promises par D.ieu à Avraham. Cette promesse constitue un thème récurrent dans le récit que fait la Torah de l’exil égyptien et de l’Exode, au point que l’on a même l’impression que là était le but réel de notre esclavage en Egypte. Quand D.ieu entre en communication avec Moché, au Buisson Ardent et le charge de la mission de sortir les Juifs d’Egypte, durant la plaie de l’obscurité et juste avant l’Exode, D.ieu semble réellement supplier les Enfants d’Israël de sortir sa richesse de l’Egypte ! Le Talmud explique que le Peuple Juif n’était pas enclin à retarder son départ d’Egypte pour rassembler des richesses : A quoi est-ce comparable ? A un homme enfermé dans une prison à qui il est dit : demain tu seras libéré et on te donnera beaucoup d’argent. Il répond : Je vous en supplie, libérez-moi aujourd’hui et je ne demande rien de plus… [Ainsi D.ieu devait les enjoindre :] Je vous en prie ! Demandez aux Egyptiens des ustensiles d’or et d’argent pour que le Juste [Avraham] ne dise pas : Il a accompli : «Ils seront asservis et torturés» mais Il n’a pas accompli «et par la suite ils sortiront avec de grandes richesses». Mais il est sûr qu’Avraham lui-même aurait renoncé à cette promesse pour hâter la libération de ses enfants. Il apparaît donc clairement que l’or et l’argent que nous transportâmes hors d’Egypte constituaient un élément indispensable à notre rédemption.

L’éclat de l’or

Le Talmud offre du phénomène de l’exil l’explication suivante: «le peuple d’Israël fut exilé parmi les nations dans le seul but que les convertis puissent s’ajouter à lui». Au sens littéral, cela fait référence aux nombreux non-Juifs qui, au cours des siècles de notre diaspora, sont entrés en contact avec le Peuple Juif et ont désiré se convertir au Judaïsme. Mais la ‘Hassidout explique que le Talmud fait également référence à des âmes d’une nature différente qui se trouvent transformées et élevées au cours de nos exils : les étincelles de sainteté que contient la réalité matérielle.

Le grand cabaliste Rabbi Its’hak Louria enseignait que chaque objet, chaque force et chaque phénomène qui existent ont en eux une étincelle de spiritualité, un petit point de divinité qui constitue leur âme, leur essence spirituelle, leur raison d’être. Cette étincelle représente le désir divin que la chose existe et sa fonction dans la perspective générale du projet divin de la création. Quand un homme utilise quelque chose pour servir son Créateur, il pénètre son écorce de matérialité et révèle et réalise son essence divine.

C’est à cette fin que nous fûmes dispersés à la surface du globe : pour entrer en contact avec ces étincelles de divinité qui attendent la rédemption dans tous les coins du monde. Chaque âme possède ses propres étincelles éparpillées dans le monde et qui forment une partie intégrante d’elle-même : aucune âme n’est complète tant qu’elle n’a pas libéré ces étincelles constituant son être. Ainsi l’être humain avance dans la vie, mu de lieu en lieu, d’occupation en occupation par des forces qui semblent aléatoires. Mais tout est issu de la Providence Divine qui guide chacun vers des occasions et des circonstances en étroite relation avec son âme.

La leçon

Il est des circonstances où l’on est tenté d’échapper à l’exil en s’enfermant dans un cocon de spiritualité, dévouant nos jours et nos nuits à l’étude de la Torah ou à la prière. Mais au lieu de le fuir, on ne fait que s’y enfoncer davantage car l’on abandonne alors les membres de notre propre âme, les étincelles de spiritualité, dans le désert d’une matérialité que l’on se refuse à raffiner.

Ce n’est qu’en relevant les défis que la Providence Divine met sur notre chemin, en utilisant chaque parcelle d’or et d’argent matériels à une fin divine que nous pouvons soustraire ces étincelles à leur exil, que nous parvenons à une délivrance personnelle et que nous hâtons la Rédemption universelle.

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