Un nouvel an, aussi pour les hommes !
Quand revient le 15 Chevat, le si bien nommé « nouvel an des arbres », c’est une forme de joie étonnante qui monte en nous. Etonnante car ce jour n’est pas, à proprement parler, un jour de fête. Certes, il est rituellement marqué et désigné comme un des « Roch Hachana » de l’année. Pourtant, le travail y est autorisé, sauf lorsqu’il tombe un Chabbat évidemment. Alors, donner à cette joie – pourtant bien réelle – une catégorie définie semble bien difficile. Il nous faut donc pénétrer cette joie diffuse, la faire véritablement nôtre afin qu’elle produise tous les effets propres à un tel sentiment.
Relevons que, si la coutume – instaurée par Rabbi Isaac Louria, le grand maître de la kabbale qui vécut à Safed au 16ème siècle – veut que nous consommions des fruits en ce jour, cela ne peut pas être simplement parce qu’il s’agit de rappeler les arbres. En fait, dans la nourriture humaine d’origine végétale, diverses catégories existent. Il est possible de la diviser en deux grands types : le nécessaire de base et le plaisir. On dira ainsi que les céréales constituent traditionnellement le nécessaire. Elles nous donnent l’aliment de base, le pain, qualifié de « repas » par excellence par le texte de la Torah. A ce titre, elles sont indispensables au maintien de la vie. Pourtant, il existe une autre dimension, celle du plaisir ; c’est ce qu’apportent les fruits.
Est-ce alors à dire que le 15 Chevat est une sorte d’hymne au plaisir matériel ? La vision du judaïsme, même si elle rejette les tentations ascétiques, est très éloignée d’une telle conception. C’est que la notion de plaisir a bien des significations. Si elle inclut celle du plaisir des sens, elle contient également des degrés plus élevés, depuis le plaisir intellectuel jusqu’à celui, suprême, du lien avec D.ieu. Or, chacun des fruits principalement consommés le 15 Chevat – ceux que le texte de la Torah désigne comme « fruits d’Israël » – détient un message qui s’adresse à nous. Et ce message est d’abord celui de la joie et de la confiance en D.ieu, celui de la conscience enfin révélée que la vie de chacun fait sens et porte loin, celui que les voies de l’élévation sont toujours ouvertes à qui veut s’y engager.
Pour toutes ces raisons, le 15 Chevat dépasse le folklore anecdotique. Il nous entraîne aussi loin et aussi haut que nous voulons le suivre. Comme une invitation à le percevoir, avec plaisir ou mieux, délics faut donc pénétrer cette joie diffuse, la faire véritablement nôtre afin qu’elle produise tous les effets propres à un tel sentiment.
Relevons que, si la coutume – instaurée par Rabbi Isaac Louria, le grand maître de la kabbale qui vécut à Safed au 16ème siècle – veut que nous consommions des fruits en ce jour, cela ne peut pas être simplement parce qu’il s’agit de rappeler les arbres. En fait, dans la nourriture humaine d’origine végétale, diverses catégories existent. Il est possible de la diviser en deux grands types : le nécessaire de base et le plaisir. On dira ainsi que les céréales constituent traditionnellement le nécessaire. Elles nous donnent l’aliment de base, le pain, qualifié de « repas » par excellence par le texte de la Torah. A ce titre, elles sont indispensables au maintien de la vie. Pourtant, il existe une autre dimension, celle du plaisir ; c’est ce qu’apportent les fruits.
Est-ce alors à dire que le 15 Chevat est une sorte d’hymne au plaisir matériel ? La vision du judaïsme, même si elle rejette les tentations ascétiques, est très éloignée d’une telle conception. C’est que la notion de plaisir a bien des significations. Si elle inclut celle du plaisir des sens, elle contient également des degrés plus élevés, depuis le plaisir intellectuel jusqu’à celui, suprême, du lien avec D.ieu. Or, chacun des fruits principalement consommés le 15 Chevat – ceux que le texte de la Torah désigne comme « fruits d’Israël » – détient un message qui s’adresse à nous. Et ce message est d’abord celui de la joie et de la confiance en D.ieu, celui de la conscience enfin révélée que la vie de chacun fait sens et porte loin, celui que les voies de l’élévation sont toujours ouvertes à qui veut s’y engager.
Pour toutes ces raisons, le 15 Chevat dépasse le folklore anecdotique. Il nous entraîne aussi loin et aussi haut que nous voulons le suivre. Comme une invitation à le percevoir, avec plaisir ou mieux, délice.
La “non-attente”
A propos de la venue de Machia’h, le Talmud enseigne qu’elle interviendra “alors qu’on ne l’attend pas” (Sanhedrin 97a). Cette expression est interprétée de manières diverses, en voici un sens plus profond :
La venue de Machia’h doit être préparée pendant le temps de l’exil, c’est-à-dire un temps où, précisément, on “n’attend pas” la Délivrance, où la préoccupation de l’immense lumière de la nouvelle ère est mise de côté. Lorsqu’on en vient à illuminer ces endroits les plus obscurs, cet état de choses où règnent la “non-attente” et l’antithèse absolue de la lumière de Machia’h, alors le descendant de David arrive.
(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch, Chabbat Parchat Matot-Masseï 5713)
Bechala’h
A peine a-t-il permis aux Enfants d’Israël de quitter l’Egypte que le pharaon se lance à leur poursuite pour les obliger à revenir. Le peuple hébreu se trouve pris au piège, entre les armées égyptiennes et la mer. D.ieu dit à Moché de lever son bâton au-dessus de l’eau et la mer s’ouvre pour permettre au Peuple juif de passer puis elle se referme sur les assaillants égyptiens. Les Enfants d’Israël entonnent un chant de louange et de gratitude à l’égard de D.ieu.
Dans le désert, le peuple souffre de faim et de soif et se plaint sans cesse à Moché et Aharon. D.ieu adoucit miraculeusement les eaux amères de Marah et par la suite, Moché fait jaillir de l’eau d’un rocher, en le frappant de son bâton. Grâce à son mérite, la Manne tombe des cieux, chaque matin avant l’aube, et des cailles apparaissent, chaque soir, dans le camp d’Israël.
Les Enfants d’Israël reçoivent l’instruction de ramasser, chaque vendredi, une double portion de la Manne, puisqu’elle ne tombera pas le Chabbat, décrété par D.ieu comme jour de repos. Certains désobéissent, veulent en ramasser le septième jour mais n’en trouvent pas. Aharon préserve une petite quantité de Manne dans une fiole, comme témoignage pour les générations futures.
A Refidim, le peuple est attaqué par Amalek qui est vaincu grâce aux prières de Moché et une armée levée par Yehochoua.
La Paracha mentionne, cette semaine, la Manne, cette nourriture céleste qui sustenta le Peuple juif tout au long de son périple dans le désert. La Manne servit de moyen d’apprentissage, enseignant aux Juifs à développer leur foi et leur confiance en D.ieu. Pendant quarante ans, la Manne, « pain du Ciel », tomba quotidiennement, démontrant clairement à chacun qu’il n’était pas besoin de se soucier de ses besoins. « La part de chaque jour (descendait) le jour dû », ce qui venait enseigner que « Celui Qui a créé le jour en a également créé la subsistance nécessaire ».
Cette prise de conscience permit au Peuple juif de faire la transition vers les normes du « pain de la terre », après leur entrée en Israël. Quand ils furent confrontés au défit de subvenir à leurs propres besoins, à travers des moyens naturels, ils furent capables de rester conscients du fait que « c’est Lui Qui (…) donne la possibilité de prospérer ».
Il est donc sous-entendu que la foi et la confiance ne sont pas des excuses qui pourraient permettre à la personne d’être paresseuse ou même passive. Elles permettent, bien au contraire, d’organiser sa vie en un partenariat avec D.ieu, L’associant à ses efforts pour gagner sa vie et élever sa famille, dans l’esprit du verset : « Et l’Eternel ton D.ieu te bénira dans tout ce que tu feras ». Cela implique que la Torah ordonne à chacun de créer un moyen naturel pour sa subsistance, et ne pas « se reposer sur un miracle ».
Mais pourquoi doit-on utiliser ces moyens intermédiaires ? Parce que nous en avons reçu l’injonction. Nous ne considérons pas ce moyen intermédiaire comme important en soi mais nous ne l’utilisons qu’en réponse au commandement de D.ieu, tout au plus comme un outil par lequel D.ieu accomplit Son œuvre. Ainsi, tout en travaillant et en prenant des initiatives, nous réalisons que rien de ce que nous accomplissons n’est le résultat de « (notre) force et de la force de (notre) main » mais c’est D.ieu « Qui (nous) donne la possibilité de prospérer ».
Il ne s’agit pas seulement d’un récit appartenant à notre passé. Le Rabbi Maharach avait l’habitude de dire que même aujourd’hui, dans la période d’exil, notre subsistance descend comme le faisait la Manne, comme du « pain du ciel ». Nos efforts pour gagner « le pain de la terre » ne sont, en réalité, qu’un canal pour la subsistance ultime, « le pain du Ciel ».
Il ne s’agit pas simplement de concepts spirituels. Mais ils ont un effet direct sur la façon dont nous devons gérer les deux émotions les plus directement en relation avec notre réussite financière : l’ambition et la crainte. Une dose soigneusement mesurée de ces sentiments est bienvenue. Une mesure excessive de l’un des deux, et a fortiori des deux, est dangereuse.
Que peut causer un excès d’ambition ou de crainte ? Un manque de foi en D.ieu.
Quand nous étudions la leçon de la Manne, c’est-à-dire le principe selon lequel, chaque jour, nous recevons de D.ieu exactement ce dont nous avons besoin, nous n’aspirons pas sans cesse à plus, empruntant alors un chemin qui risque de nous faire perdre ce que nous possédons déjà. Nous ne sommes pas non plus paralysés par la peur et incapables de faire la démarche nécessaire pour protéger et augmenter ce que nous possédons. Mais nous jouissons joyeusement de ce que nous possédons et entreprenons les actions nécessaires pour augmenter nos ressources.
Perspectives
Ce Chabbat a un nom très particulier, on l’appelle Chabbat Chira, « le Chabbat du chant », parce qu’on y lit le chant qu’entonna le Peuple Juif après le miracle de la mer rouge.
En fait, la Paracha de cette semaine comprend plus précisément deux chants : le chant dans lequel Moché entraîna les hommes et le chant dans lequel Myriam entraîna les femmes. Ce dernier exprimait encore plus d’élan. En effet, Myriam fit aussi danser les femmes et elles accompagnèrent leurs chants de tambourins.
Nos Sages s’interrogent : où purent-elles se procurer des tambourins dans le désert ? Ils apportent la réponse suivante : les femmes juives avaient confiance que D.ieu accomplirait des miracles dans le désert, aussi emportèrent-elles avec elles, d’Egypte, des tambourins, dans l’attente de pouvoir célébrer ces miracles. Encore en Egypte, ces femmes juives avaient la foi dans la rédemption et dans les miracles.
Cela nous ramène au thème de la foi que nous avons mentionné plus haut. Alors même que nous sommes encore en exil, nous devons nous rappeler qu’il ne s’agit que d’un phénomène temporaire. Aujourd’hui, la Rédemption n’est pas manifeste mais puisque l’exil va finir et qu’elle deviendra éternelle, elle est la vérité de notre existence. Et notre foi en D.ieu va, en fait, servir d’élément déclencheur pour que la Rédemption surgisse de façon anticipée, tout comme nous l’affirmons dans nos prières : « Rapidement refleurira la pousse de David… parce que nous espérons en Ta délivrance tout le jour. »
Qu’est-ce que Tou BiChevat ?
Chabbat 11 février 2017, c’est Tou BiChevat, le Roch Hachana, le nouvel an des arbres.
On ne récite pas la prière de Ta’hanoune (supplications).
Vendredi soir 10 février et Chabbat 11 février, on consomme de nombreux fruits, en particulier ceux qui représentent la fierté de la Terre Sainte, qui sont cités dans le verset de la Torah : « blé, orge, raisin, figue, grenade, olive et datte. On s’efforcera également de manger des caroubes ainsi que des fruits nouveaux qu’on n’a pas encore consommés cette année. On veillera à réciter les bénédictions adéquates avant et après manger. On profitera de cette belle occasion pour se réunir en réunions joyeuses et productives sur le plan des bonnes résolutions.
On aura soin de prélever avant Chabbat les différentes dîmes (Trouma et Maassèr) sur les fruits provenant d’Israël.
La Torah compare l’homme à un arbre des champs : lui aussi est supposé produire des fruits, c’est-à-dire des Mitsvot, des bonnes actions. De même que le fruit peut produire des arbres qui produiront des fruits etc., de même nos Mitsvot entraînent d’autres Mitsvot, encouragent d’autres Juifs à assumer leur judaïsme, à retrouver leurs racines et à s’enraciner dans un sol riche d’étude de la Torah et de pratique des Mitsvot. C’est ainsi que le peuple juif se perpétue, se développe et produira d’autres fruits.
A Tou BiChevat, nous mangeons des fruits, nous « produisons » des fruits, nous plantons des graines de bonnes actions.
Le crayon, la chèvre et mes grands-parents
Quand mon grand-père Israël étudiait à la Yechiva de Nevel (en Russie blanche), un de ses camarades plus jeune possédait un crayon et un cahier auxquels il tenait particulièrement car, chaque jour, il s’en servait pour écrire une lettre à ses parents. Un jour, un garçon plus âgé arriva, remarqua l’enfant occupé à écrire consciencieusement, s’empara prestement de son crayon et s’enfuit. L’enfant se mit à pleurer amèrement pour le vol de cet objet si important dont dépendait tout contact avec ses parents. Israël remarqua la scène, comprit ce qui s’était passé, courut après le chenapan, reprit le crayon et avertit le voleur de ne plus recommencer – s’il ne voulait pas se prendre une volée de coups. Le garnement comprit vite la leçon et l’enfant sécha ses larmes : il ne fut plus jamais harcelé.
Par la suite, mon grand-père Israël fut envoyé par ses parents après sa Bar Mitsva à la Yechiva dans le village de Loubavitch afin qu’il devienne sérieux – ce qui ne fut pas évident comme on le voit dans l’anecdote suivante : le Rabbi (Chalom Dov Ber, cinquième Rabbi de la dynastie) habitait dans le même bâtiment qui abritait la Yechiva. A part les étudiants, il y avait aussi… une chèvre dont le bon lait servait à sustenter les élèves comme les professeurs. La chèvre avait une longue barbiche, on l’appelait donc Boroda (le barbu, en russe). Un jour, Israël avait réussi à se procurer un verre de vodka : sortant de la Yechiva, il rencontra la chèvre dans la cour, lui offrit quelques gorgées d’alcool qui eurent sur elle le même effet que sur les humains : la chèvre se mit à danser et à tourner en rond en bêlant : « Maa, Maa… ». Attirés par le bruit inhabituel, d’autres garçons sortirent de la Yechiva et entourèrent joyeusement Boroda en sautant, dansant et bêlant à qui mieux mieux. Mais un des professeurs entendit lui aussi le bruit, comprit ce qui se passait, raconta le délit à la direction de la Yechiva et Israël fut renvoyé chez ses parents à Nevel. Mais en sortant du bureau du directeur, Israël annonça tranquillement qu’il refusait de rentrer chez ses parents !
Où irait-il ? Il n’en avait pas la moindre idée. Errant dans les ruelles du village, il décida d’entrer dans la maison d’une des familles qui proposait (contre paiement) d’héberger les étudiants de la Yechiva. Il entra, posa ses affaires et annonça qu’il s’installait là. On ne lui posa pas de questions et, pendant quinze jours, il put… disons… réfléchir. Deux semaines plus tard, le maître de maison envoya la facture à la Yechiva… Quand les directeurs comprirent ce qui s’était passé, ils convoquèrent Israël qui expliqua, qu’en fait, il n’avait pas pu se résoudre à rentrer chez lui à Nevel et causer à ses parents une telle déception. Quant à son séjour à « l’hôtel » (si tant est qu’il y eut un hôtel à Loubavitch…), il déclara avec aplomb : « J’ai économisé l’argent de la Yechiva ! Si je n’avais eu nulle part où dormir, je serais resté à la rue et serais mort de froid. Si je n’avais pas eu à manger, je serais mort de faim ! La Yechiva aurait alors été obligée de m’enterrer, de payer un linceul et une place au cimetière et, en plus, d’envoyer un télégramme à mes parents ! Une véritable fortune ! ».
Et, à propos de Boroda, sa réponse était là aussi toute prête : « C’est vrai, au début je me suis mal conduit et je n’aurais pas dû agir ainsi mais j’en ai retiré une leçon : le Rabbi, les étudiants et la chèvre vivent dans le même endroit. Les étudiants regardent le Rabbi et la chèvre regarde le Rabbi. Nous devons apprendre du Rabbi pendant que nous l’observons. Sinon, nous ne sommes pas meilleurs qu’une chèvre ! ».
Les responsables de la Yechiva éclatèrent de rire, se reprirent et arborèrent un air sérieux mais furent repris d’un fou rire. Oui, Israël de Nevel était un farceur mais il était vif et intelligent et on avait remarqué combien il s’occupait bien des autres élèves. Il fut accepté à nouveau à la Yechiva.
Des années plus tard, alors qu’Israël dansait à Sim’hat Torah avec les autres ‘Hassidim, celui qui avait été l’administrateur de la Yechiva à cette époque (et qui n’était autre que le sixième Rabbi), Rabbi Yossef Its’hak Schneersohn de mémoire bénie, plaça affectueusement son bras sur l’épaule d’Israël en murmurant : « Tu es un bon fils pour moi ! ».
Par la suite, Israël fut « repéré » par le père de ‘Hanna Pevzner, Rav Morde’haï qui recherchait pour sa fille (selon ce qu’elle avait elle-même demandé) un véritable ‘Hassid comme mari. Ils se marièrent en toute simplicité et eurent beaucoup d’enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants.
Leur vie fut semée de difficultés à cause de Staline et des communistes avec leurs lois destinées à abolir toute trace de religion et surtout de judaïsme. Toujours aussi déterminé, Israël continuait à enseigner clandestinement la Torah à de jeunes enfants. Pour ‘Hanna comme pour tant d’autres femmes, le seul moment de répit était celui qui suivait immédiatement l’allumage des bougies de Chabbat.
Les mains de ‘Hanna ! Toute la semaine, elle avait nettoyé, accroupie, le sol de l’unique pièce de leur logement, lavé le linge trempé dans la teinture et d’autres éléments chimiques décapants, épluché et nettoyé de mauvais légumes, tricoté en se penchant sur une vieille machine, planté et arrosé son minuscule jardin potager… Maintenant ses mains abîmées accueillaient le Chabbat, encerclaient les flammes puis couvraient ses yeux fatigués tandis qu’elle murmurait la bénédiction traditionnelle en priant pour chacun de ses descendants.
Quand elle enlevait ses mains de ses yeux, elle souriait, si heureuse, souhaitant « Gut Chabes » à ses filles et petites filles et, alors, un miracle se produisait : le foulard si usé de mon adorable grand-mère se transformait en un diadème doré orné de diamants étincelants et sa robe noire toute simple devenait une élégante capeline aux couleurs chatoyantes.
Quand elle s’asseyait enfin sur sa chaise favorite au dos droit, le visage de Grand-mère ‘Hanna rayonnait d’une lumière aussi mystérieuse que le Chabbat lui-même.
Toute trace du dur labeur de la semaine passée disparaissait et tous ceux qui avaient assisté à cette transformation saisissante savouraient cet instant fugace de paix et de sérénité.
La reine de Chabbat était arrivée.
Miriam Paltiel Nevel
Traduite par Feiga Lubecki