Samedi, 28 septembre 2024

  • Nitsavim - Vayélé’h
Editorial

 Quand le monde naît

Vivre au rythme du calendrier en ne le prenant pas comme un simple moyen de suivre le déroulement des jours mais bien comme un guide et un compagnon du service de D.ieu est toujours une expérience inspirante. De fait, il définit une architecture du temps, soulignant le sens que portent les moments qui passent, et nous donne ainsi la clé pour en tirer le meilleur. C’est ainsi que ce Chabbat, comme en prélude à Roch Hachana, arrive le 25 Elloul, et cette date n’est pas tout à fait comme les autres. En effet, nous le savons, Roch Hachana, le 1er du mois de Tichri, correspond au sixième jour de la création, c’est-à-dire lorsque l’homme fut créé. Cela est bien sûr abondamment commenté : l’homme est à la fois le couronnement et le but de la création, il est logique que le décompte du temps soit fixé en fonction de sa venue, véritable commencement. Mais, en allant plus loin, si le sixième jour de la création correspond au 1er Tichri, cela signifie que son premier jour, début concret de cette création, tombe… le 25 Elloul. En d’autres termes, ce Chabbat, il nous est donné de revivre ce moment littéralement fabuleux où, la bonté de D.ieu se déversant sur l’univers en devenir, Il le crée.

Il est clair que chacun est concerné par cet événement qui dépasse les considérations de temps et d’espace pour embrasser le cadre même de notre existence. En regardant cette date, apparemment anodine, nous nous trouvons replongés dans un impensable début de toutes choses, quand le Créateur donne place à la création. C’est presque le début de l’Histoire… Certes, celle-ci ne prendra pleinement forme qu’à Roch Hachana, avec la création concrète de l’homme, mais elle est déjà là en potentiel et nous sommes les héritiers et les continuateurs de ce processus.

A quelques pas des fêtes solennelles qui nous attendent au-devant de nous, il faut approfondir la conscience que ces jours nous transmettent. Créés par D.ieu dans Son monde, pour y réaliser le but éternel, nous sommes porteurs de beaucoup plus que d’un rêve ou d’un espoir. Nous portons une réalité en marche et, par nos actes de chaque jour, faisons qu’elle se concrétise : la venue de Machia’h.

Etincelles de Machiah

 Chaque prière est un progrès

Pour la Délivrance du Peuple juif, une Délivrance éternelle qui ne sera suivie d’aucun autre exil, nous devons augmenter nos prières, les premières et les dernières générations. Les prières des premières générations aideront celles des dernières générations.

Ce sera plus facile pour les dernières générations qui sont plus proches de la Délivrance finale. Leurs prières seront plus acceptées que celles des premières générations. Puisque le sujet est si important, il doit y avoir une abondance de prières, génération après génération, afin que les prières pour la Délivrance soient acceptées.

(d’après Beth Elokim LéHamabit, Porte de la prière, chap. 17)

Vivre avec la Paracha

 NITSAVIM-VAYÉLEKH

La Paracha Nitsavim comporte certains des principes fondamentaux de la foi juive.

L’unité d’Israël : nous nous tenons tous devant D.ieu, depuis les chefs jusqu’aux puiseurs d’eau.

La Rédemption future : l’exil et la désolation seront suivis de la réunion de tous sur la terre de nos pères.

La pratique de la Torah : elle nous est accessible, elle est proche de nous et nous avons la capacité de nous y adonner.

Le libre-arbitre : devant nous sont la vie et le bien, la mort et le mal. Marchons dans les voies de D.ieu, gardons Ses commandements, choisissons la vie.

 

La Paracha Vayélè’h relate les événements du dernier jour de la vie de Moché sur cette terre. Il transfère sa gouvernance à Yehochoua et écrit un rouleau de la Torah qu’il confie aux Léviim afin qu’ils le conservent dans l’Arche de l’Alliance.

On y lit la Mitsva du Hakhel : au cours de la fête de Souccot, lors de l’année de la Chemita, le Peuple entier se réunira au Saint Temple où le Roi lira la Torah.

La Paracha s’achève avec la prédiction que le peuple se détournera de D.ieu qui cachera Sa face mais également avec la promesse que les mots de la Torah ne seront pas oubliés par ses descendants.

Source de toutes les bénédictions

Chaque mois juif est précédé par un Chabbat désigné Chabbat Mevare’him, le Chabbat qui bénit le nouveau mois. À cette occasion, une prière spéciale est récitée afin de bénir le mois à venir. Cette tradition repose sur l’idée que le Chabbat est la source de toutes les bénédictions et qu’il accorde une bénédiction pour la semaine suivante. Le Chabbat précédant un nouveau mois accorde une bénédiction particulière pour l’intégralité du mois.

Le Chabbat qui précède un mariage, le marié est appelé à la Torah, car tant le Chabbat et la Torah sont tous deux des sources de bénédictions.

Il serait donc logique que le mois sacré de Tichri, marquant le début de la nouvelle année, soit béni lors du Chabbat précédent. Pourtant, la coutume veut que l’on ne bénisse pas le mois de Tichri durant ce Chabbat. Cette omission appelle une explication. Plusieurs raisons peuvent être avancées pour justifier cette anomalie.

Confondre le Satan

Une des explications proposées par un élève de Rachi (le Ma’hzor de Vitry) stipule que nous cherchons à confondre le Satan, l'ange accusateur, qui attend Roch Hachana pour présenter toutes nos fautes devant les tribunaux célestes. En ne proclamant pas publiquement à la synagogue l’arrivée du nouveau mois et ses fêtes, nous empêchons le Satan de savoir quel jour tombe Roch Hachana.

Pour mieux comprendre cette explication, il faut préciser que le Satan, contrairement aux conceptions erronées provenant de sources non juives, est un agent spirituel, un ange comme les autres, dont la tâche malheureuse (bien qu’elle lui soit assignée par D.ieu) consiste à distribuer les jugements et de servir d'obstacle au Peuple juif. De ce fait, il est en phase avec les énergies spirituelles générées à certains moments de l'année, tout comme les autres anges. Il serait donc naturel que le Satan perçoive l’approche de Roch Hachana. Cependant, les énergies divines générées à chaque fête dépendent de nos actions humaines visant à les rendre plus visibles et prononcées. En l’absence d'annonce préalable de notre part, le Chabbat avant Roch Hachana, ces énergies spirituelles restent si subtiles que le Satan ne se rend pas compte de l’imminence de Roch Hachana.

Roch Hachana est donc décrit dans le livre des Psaumes comme la fête qui est « cachée ». Cela signifie que les énergies spirituelles de Roch Hachana sont très subtiles et ne sont perçues que par nous-mêmes, le Peuple juif, et non par le Satan.

La bénédiction de D.ieu

Le Baal Chem Tov, fondateur du mouvement ‘hassidique, dont l’anniversaire a été récemment célébré le 18 Elloul, a donné l’explication suivante concernant la coutume de ne pas bénir le mois de Tichri :

Le septième mois (Tichri), premier des mois de l’année, est béni par D.ieu Lui-même, lors du Chabbat Mevare’him, le dernier Chabbat du mois d’Elloul. Avec cette bénédiction (celle de D.ieu pour le septième mois), Israël bénit les autres mois onze fois par an.

Le Baal Chem Tov ajoute que le contenu de la bénédiction de D.ieu se trouve encapsulé dans la déclaration d'ouverture de la Paracha Nitsavim : « Atem Nitsavim Koule’hem Hayom », « vous êtes tous debout aujourd'hui ». Ce jour fait référence à Roch Hachana, le jour du jugement. Cependant, vous restez fermement debout, ce qui signifie que vous serez justifiés dans le jugement.

Le Chabbat précédant Roch Hachana, nous lisons la Paracha Nitsavim, qui est la bénédiction de D.ieu pour le Chabbat de la bénédiction du septième mois. Ce septième mois (Tichri) est lui-même comblé et, à son tour, il comble tout Israël d'une abondance de biens pour l'année future.

L’idée sous-jacente aux paroles du Baal Chem Tov implique que le moyen d’obtenir la bénédiction de D.ieu pour la nouvelle année repose sur l’unité juive. Ainsi, dans le verset évoquant notre position ferme, il est dit « vous tous, devant l'Éternel votre D.ieu, vos chefs, vos tribus, vos anciens… et l'étranger qui est dans votre camp, du fendeur de bois jusqu'au puiseur d’eau ».

En énumérant toutes ces catégories de Juifs, des plus éminents et influents aux (apparemment) moins importants, l'implication est claire : la manière de garantir notre victoire face au jugement de D.ieu est de réaliser que toutes les classes de Juifs sont inextricablement liées et forment une unité organique.

En nous tenant ensemble avec la compréhension que nos différences s’unissent pour former une nation juive complète, D.ieu nous accordera certainement une année marquée par l’unité et l’harmonie. En effet, cette unité nous rendra encore plus réceptifs à la bénédiction ultime et à la victoire dans le jugement : la véritable et complète Rédemption, par notre juste Machia’h.

Chaque mois juif est précédé par un Chabbat désigné Chabbat Mevare’him, le Chabbat qui bénit le nouveau mois. À cette occasion, une prière spéciale est récitée afin de bénir le mois à venir. Cette tradition repose sur l’idée que le Chabbat est la source de toutes les bénédictions et qu’il accorde une bénédiction pour la semaine suivante. Le Chabbat précédant un nouveau mois accorde une bénédiction particulière pour l’intégralité du mois.

Le Chabbat qui précède un mariage, le marié est appelé à la Torah, car tant le Chabbat et la Torah sont tous deux des sources de bénédictions.

Il serait donc logique que le mois sacré de Tichri, marquant le début de la nouvelle année, soit béni lors du Chabbat précédent. Pourtant, la coutume veut que l’on ne bénisse pas le mois de Tichri durant ce Chabbat. Cette omission appelle une explication. Plusieurs raisons peuvent être avancées pour justifier cette anomalie.

Le Coin de la Halacha

 Qu’est-ce que les Seli’hot ?

Les Seli’hot sont des prières de supplications qui rappellent les besoins de l’homme mais aussi sa petitesse et ses faiblesses. En récitant les Seli’hot, le Juif procède à une introspection approfondie qui lui permet d’aborder la nouvelle année avec la crainte, l’humilité mais aussi l’assurance et la joie requises.

Dans les communautés ashkénazes et ‘hassidiques, on commence à réciter les Seli’hot à partir du samedi soir précédant (d’au moins quatre jours) la fête de Roch Hachana : cette année, samedi soir 28 septembre 2024 vers 1 heure 30. Puis on dit les Seli’hot, à partir du lundi 30 septembre jusqu’au mercredi 2 octobre 2024 inclus, avant la prière du matin. On aura au préalable récité les « bénédictions du matin » ainsi que les bénédictions de la Torah.

On s'efforcera de lire les Seli’hot en présence de dix hommes adultes (plus de treize ans) afin de pouvoir prononcer le Kaddich.

Si possible, on reste debout pendant les Seli’hot, au moins lorsqu’on prononce les « Treize Attributs de Miséricorde » et le « Vidouy » (confession des fautes). Celui qui ne prie pas avec un Minyane (dix hommes) ne prononce ni les « Treize Attributs » ni les prières en araméen.

L’officiant s’enveloppe d’un « Talit » (châle de prière). S’il fait encore nuit, il ne prononcera pas la bénédiction : il serait alors préférable qu’il emprunte un Talit à un ami ou à la synagogue.

L’endeuillé (durant les sept premiers jours) ne sort pas de chez lui et ne peut donc aller à la synagogue pour les Seli’hot, excepté la veille de Roch Hachana (mercredi 2 octobre) où les Seli’hot sont particulièrement longues.

Le Recit de la Semaine

 Essayer toutes les Segoulot

Ils s’appelaient David et Myriam. Mariés depuis plusieurs années, ils n’avaient toujours pas d’enfants. Ils avaient consulté de nombreux médecins, s’étaient soumis à toutes sortes d’examens et procédures médicales complexes, fatigantes, onéreuses mais… en vain. Ils avaient fait appel à toutes sortes de Rabbins, s’étaient recueillis sur toutes les tombes de Tsadikim, s’étaient renseignés sur toutes les prières et Segoulot possibles… On leur avait conseillé de lire plusieurs fois tel Psaume, d’allumer tant et tant de bougies à certains moments…

Un jour, quelqu’un leur expliqua l’importance de la Haftara du premier jour de Roch Hachana : ce texte raconte la naissance du prophète Chmouel (Samuel) après que sa mère ‘Hanna soit restée stérile durant de longues années. « Le jour de Roch Hachana, ajouta-t-il, le responsable de la synagogue « vend » aux enchères le mérite d’être appelé à la Torah le dernier et d’avoir ainsi le privilège de lire la Haftara. Celui qui acquiert ce mérite, D.ieu sait comment le récompenser ! ».

Oui mais voilà : les enchères pouvaient monter très haut. David en discuta avec son épouse et celle-ci l’encouragea : « A quoi nous sert notre argent si nous n’avons pas d’enfants ? Voilà une Segoula que nous n’avons encore pas essayée et il ne faut pas la laisser passer ! Accepte le défi, quel que soit le prix !

Le grand jour de Roch Hachana arriva. Les enchères commencèrent d’emblée très haut : 1000, 5000, 10 000… David persistait, renchérissait de son mieux : les enfants jubilaient devant cette animation soudaine, les fidèles suivaient avec intérêt, se demandant jusqu’où les protagonistes seraient prêts à proposer pour la dernière montée à la Torah. Finalement, David emporta la mise avec 25 000 dollars, une somme colossale mais il était heureux d’approcher enfin de son but.

On commença la lecture. Juste après la sixième montée, un inconnu s’approcha de David : « Je sais que vous avez acheté cette montée mais j’ai un grand service à vous demander : Voilà ! Cette semaine, il y aura le Yahrzeit (l’anniversaire du deuil) de mon père et, selon la coutume, je dois monter à la Torah. Mais mon frère est déjà monté en quatrième ! D’après la Hala’ha, deux frères ne doivent pas monter à la Torah l’un après l’autre : pouvez-vous me laisser monter maintenant à la Torah afin que je puisse respecter mon père comme il se doit ? ».

Comment auriez-vous réagi à la place de David ?

Il aurait pu expliquer sa situation, demander à cet homme d’aller prier dans une autre synagogue, lui reprocher de s’y prendre au dernier moment…

Mais non.

David accepta sans hésiter et laissa sa place à cet inconnu, un Juif qui semblait tout-à-coup tellement attaché aux traditions même s’il n’en avait pas vraiment le « look »…

En-haut, dans la galerie des dames, Myriam regardait sans comprendre ce qui se passait, elle retenait ses larmes et tentait de se concentrer sur les mots du Ma’hzor (le livre de prières). Elle avait accepté que son mari paye une somme considérable et un inconnu venait de prendre cette place tant convoitée… Il faudrait donc attendre encore un an pour tenter cette Segoula

Après l’office, David expliqua à son épouse ce qui s’était passé et conclut : « Après tout, nous n’avons pas encore essayé la Segoula de l’amour du prochain. En permettant à cet homme d’accomplir la Mitsva de respecter ses parents, nous avons peut-être acquis le droit d’être nous aussi bientôt respectés en tant que parents… ». Myriam hocha la tête et approuva la décision de son mari.

L’année suivante, le même inconnu se présenta dans la synagogue et s’approcha de David pour s’excuser :

- Je ne savais pas… On m’a expliqué, on m’a fait comprendre que je me suis très mal conduit l’année dernière ! Je suis prêt à payer tout ce qu’il faudra pour que tu puisses monter à la Torah en sixième et ainsi, lire la Haftara de Hanna !

- Ce n’est pas la peine, le rassura David avec un grand sourire. Nous avions essayé toutes les Segoulot mais nous avions encore à essayer la Segoula d’Ahavat Israël, l’amour du prochain, l’amour gratuit, même envers un inconnu. Le mois dernier, ma femme a donné naissance à des jumeaux…

Rav Shneor Ashkenazi

Traduit par Feiga Lubecki