Samedi, 26 février 2022

  • Vayakhel
Editorial

 Des hommes égaux ?

Nous vivons un temps de revendications. Sur les sujets les plus divers, les citoyens font entendre leur voix, sans doute avec plus ou moins de raison, et parfois plus ou moins de violence. Pouvoir se faire entendre, ne pas totalement déléguer la fonction de décision à d’autres, revenir à la démocratie du village où tout se décide en commun sur la place centrale : certains rêves ont beau être anciens, ils n’en perdent pas pour autant leur séduction. Il est d’autant plus intéressant de relever un thème largement commun à toutes ces demandes, celui de l’égalité. Encore faut-il définir complètement l’idée…

Justement, cette semaine, nous lisons un passage de la Torah supplémentaire lié à la période que nous traversons : l’ordre d’offrir, pour le Temple, une pièce d’un demi-Chékel. C’est en effet à ce moment de l’année qu’on en faisait l’appel en Israël, cette lecture rituelle en est le souvenir. Cette sorte d’impôt est étonnante. Voici donc une contribution obligatoire qui s’applique à tous sans distinction et de façon parfaitement égale, au point que le texte va jusqu’à insister « le riche n’y ajoutera pas et le pauvre n’en déduira rien. » La logique est ici davantage spirituelle que sociale car ce don exprime, au sens le plus profond, l’essence de l’âme de chacun. C’est dire que personne ne peut rien y modifier dans un sens ou dans l’autre car il s’agit de la réalité intangible de l’existence et de son fondement.

Voici donc l’égalité parfaite et absolue dont chacun rêve. Elle n’est cependant pas synonyme d’identité totale. De fait, les hommes sont tous différents. Porteurs de qualités et d’insuffisances diverses, il leur appartient de développer les premières et d’effacer les secondes. Et cela, chacun le fait à son rythme, à sa mesure et surtout à sa façon. Il n’en reste pas moins que le socle d’égalité, celui de l’essence de l’âme, lie tous les hommes les uns aux autres permettant de faire de tous ces efforts multiples, une construction commune. Cette égalité-là n’est pas un espoir insensé. Elle est, au contraire, une réalisation de tous les jours. Elle n’est pas une simple revendication, sa nature même en fait un acquis.

L’entendre proclamer dans le texte de la Torah, le vivre en conséquence, c’est voir en l’autre un être différent et pourtant aussi proche de soi qu’on peut l’être de soi-même. Et cette égalité mène alors à ce dont tous les hommes ont tant besoin : l’unité. Parce que le monde peut être tellement plus beau pour chacun.

Etincelles de Machiah

 L’amour du prochain :

« Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lev. 19 : 18). C’est là un commandement qui incombe, depuis toujours, au peuple juif. Les Pirkei Avot nous l’enseignent également sous cette forme : « Sois des disciples d’Aharon : aime la paix, poursuis la paix, aime les créatures et approche-les de la Torah ».

Cette idée est particulièrement essentielle en notre temps alors qu’approche la Délivrance qui nous fera sortir de cet exil, conséquence d’une haine fratricide. Il nous appartient aujourd’hui de passer à l’étape suivante, de sentir, dès à présent, l’atmosphère nouvelle d’amour du prochain qui apparaîtra avec la venue de Machia’h. En la vivant maintenant, alors que nous sommes encore en exil, nous hâterons l’avènement du nouveau temps.

(D’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch

Chabbat Parachat Matot Massei 5751)

Vivre avec la Paracha

 Vayakhel

Moché réunit le peuple d’Israël et réitère le commandement d’observer le Chabbat. Il transmet alors les instructions de D.ieu concernant la construction du Michkan (le Tabernacle). Le peuple fait don, en abondance, des matériaux requis, apportant de l’or, de l’argent et du cuivre, de la laine teinte en bleu, violet et pourpre, des poils de chèvres, du lin tissé, des peaux de bêtes, de la laine, du bois, de l’huile d’olive, des herbes et des pierres précieuses. Moché doit leur demander de cesser leurs dons.

Une équipe d’artisans au cœur sage construit le Michkan et son mobilier (comme cela a été décrit dans les Parachiot précédentes : Terouma, Tetsavé et Ki Tissa) : trois couches pour les couvertures du toit, 48 panneaux muraux plaqués d’or et 100 socles d’argent pour les fondations, la Paro’hèt (voile) qui sépare les deux chambres du Sanctuaire et le Massakh (écran) pour le devant, l’Arche et son couvercle avec les Chérubins, la Table et ses Pains de Proposition, la Menorah à sept branches avec son huile tout spécialement préparée, l’autel d’or et les encens qui y sont brûlées, l’huile d’onction, l’autel extérieur pour les offrandes que l’on doit brûler et tout son équipement, les cintres, les poteaux, et les socles de fondation pour la cour et enfin le bassin et son piédestal, fait de miroirs de cuivre.

Le réceptacle

« Et tous les gens au cœur sage, les artisans, construisirent le Tabernacle. » (Chemot 36 :8)

Pourquoi sommes-nous là ? Cette question, mère de toutes les interrogations, est traitée par différents courants de la Torah, chacun à sa façon.

Le Talmud déclare simplement et succinctement : « J’ai été créé pour servir mon Créateur. » (Talmud, Kidouchin 82b)

Les travaux du Moussar orientés vers la morale décrivent le but de la vie comme le raffinement de ses traits de caractère.

Le Zohar avance que D.ieu nous a créés « pour que Ses créations Le connaissent. » (Zohar 3 : 42b)

Le Maître cabaliste, Rabbi Its’hak Louria propose l’explication suivante pour la création : D.ieu est l’essence du Bien et la nature du Bien est de répandre la bienfaisance. Mais la bienfaisance ne peut se pratiquer là où il n’y a personne pour la recevoir. C’est donc à cette fin que D.ieu a créé notre monde : pour qu’il y ait des réceptacles à Sa Bonté.

Les enseignements ‘hassidiques expliquent que toutes ces explications, ainsi que celles données par d’autres travaux cabalistiques et philosophiques ne sont en fait toutes que les aspects variés d’une Volonté divine unique pour la création, comme cela s’exprime dans les différents « mondes » ou royaumes de la Création divine.

Le ‘Hassidisme offre également sa formulation propre, pour ce désir divin : « que nous fassions une résidence pour D.ieu dans le monde matériel. » (Tanya, ch. 36)

Une résidence pour D.ieu

Que signifie faire une résidence pour D.ieu ?

L’une des pierres angulaires de notre foi est que « le monde entier est rempli de Sa présence. » (Yichayahou 6 :3) et qu’ « il n’existe aucun lieu vide de Lui. » (Tikouné Zohar 57) Il ne s’agit donc pas de faire venir D.ieu dans le monde matériel, Il s’y trouve déjà ! Mais D.ieu peut être dans ce monde sans y être dans Sa résidence.

Être chez soi signifie être dans un lieu qui est réceptif à notre présence, un lieu consacré à remplir nos besoins et accomplir nos désirs. Cela signifie être dans un lieu où nous sommes nous-mêmes, contrairement à l’attitude que nous adoptons publiquement dans un autre environnement.

Le monde de la matière n’est pas, dans son état naturel, un lieu accueillant pour D.ieu. S’il existe un point commun pour tous les objets matériels, c’est leur égocentrisme intrinsèque, la priorité qu’ils donnent à leur moi comme fondement et but de l’existence. Avec chaque iota de sa masse, la pierre proclame : « je suis ». Chez l’arbre et chez l’animal, la préservation et la propagation de soi est la principale visée de chaque instinct et le but de chaque action. Enfin, qui plus que l’être humain est consumé par une ambition dévorante pour réaliser un idéal qui le mettra au premier plan ?

Le seul problème dans tout cet égocentrisme est qu’il masque la vérité sous-jacente, la vérité que la création n’est pas une fin en soi mais un produit de son Créateur et un véhicule pour Lui. Et cet égocentrisme n’est pas une caractéristique de notre monde, épisodique ou secondaire, mais son aspect fondamental. Pour faire de notre monde « une résidence » pour D.ieu, nous devons en changer sa nature elle-même. Nous devons remodeler les fondements-mêmes de son identité, transformer cette entité tournée vers elle-même en quelque chose qui existe pour un dessein qui la dépasse.

Chaque fois que nous nous emparons d’un objet matériel ou d’une ressource et l’utilisons pour le service de D.ieu, nous effectuons cette transformation. Quand nous prenons une peau d’animal pour en façonner une paire de Tefilines, quand nous prenons une pièce et la donnons à la charité, quand nous utilisons notre esprit pour étudier un chapitre de Torah, nous effectuons cette transformation. Dans son état initial, le morceau de peau proclamait : « J’existe ». Maintenant elle s’écrie : « J’existe pour servir mon Créateur ». Une pièce dans la poche dit : « l’avidité est bonne ». Dans la boîte de charité, elle dit : « Le but de la vie n’est pas de recevoir mais de donner ». L’esprit humain demande : « Enrichissez-moi ». Le cerveau étudiant la Torah s’exclame : « Connais ton D.ieu ! »

La frontière du moi

Deux pas sont fondamentaux dans l’entreprise de faire de notre monde un foyer pour D.ieu. Le premier pas implique de préparer la ressource matérielle pour en faire « un réceptacle de Divinité » : façonner le cuir en Téfilines, donner de l’argent à la charité, faire un programme d’étude de la Torah.

Le second pas est l’utilisation concrète de ces « récipients » pour accomplir la Volonté divine : attacher les Téfilines sur le bras et la tête, utiliser l’argent distribué pour nourrir ceux qui ont faim, étudier la Torah, etc.

A priori, il semblerait que le second pas soit le plus significatif alors que le premier ne permet que de rendre possible le second. Mais le récit que donne la Torah de la première maison de D.ieu érigée dans notre monde matériel met davantage l’accent sur la construction de cette « maison » que sur son utilisation comme résidence Divine.

Une partie significative du livre de Chemot est consacrée à la construction du Tabernacle érigé par les Enfants d’Israël dans le désert. La Torah, qui d’ordinaire est si parcimonieuse dans les mots, au point que certaines lois sont contenues dans un seul d’entre eux voire dans une lettre, innove ici de façon inhabituelle. Les quinze matériaux utilisés dans la construction du Tabernacle ne sont pas cités moins de trois fois. Les composants et les meubles du Tabernacle sont listés huit fois. Et chaque détail infime de la construction, comme les dimensions de chaque panneau, les couleurs de chaque tapisserie, sont énoncés non une fois mais deux, dans le récit des instructions de D.ieu à Moché et à nouveau dans celui de la construction effective du Tabernacle.

En tout, cela fait treize chapitres consacrés à la description du façonnage de certains matériaux pour l’édifice dédié au service de D.ieu et à l’entraînement des Cohanim qui devaient y officier. Tout cela est bien davantage que les chapitres consacrés à la description du service qui s’y déroulait.

Le Tabernacle est le modèle et le prototype de toutes les « maisons » de D.ieu construites sur terre. Cela signifie donc que la profusion de détails donnés à propos de l’étape de sa construction (par rapport à sa mise en œuvre) a également certaines implications dans notre vie. Il est très spécial de faire de nos ressources personnelles quelque chose qui a le potentiel de servir D.ieu. Faire de nous-mêmes des « réceptacles » pour la Divinité est, dans une certaine mesure, un exploit plus extraordinaire que d’apporter concrètement la Divinité dans notre vie.

Car c’est là que réside la véritable transformation : rediriger un objet concentré sur lui-même vers quelque chose qui le dépasse. Si D.ieu avait simplement désiré un environnement hospitalier, Il n’aurait pas eu besoin de se préoccuper d’un monde matériel. Un monde spirituel aurait pu parfaitement Le servir à cette fin. Mais ce que D.ieu désire est cette transformation elle-même : le défi et le dépassement de l’égocentrisme et la redéfinition de la matérialité.

Cela se produit à la première étape, lorsque quelque chose de matériel devient un instrument pour le Divin. La seconde étape ne consiste qu’à actualiser un potentiel déjà établi.

Bonjour

Vous rencontrez une personne qui doit encore inviter D.ieu dans sa vie, une personne dont les entreprises et les accomplissements, quelques réussis et louables soient-ils, n’ont pas encore transcendés l’égo et des projets égocentrés.

Vous souhaitez élargir son horizon, lui montrer une vie qui dépasse les limites du moi. Vous désirez lui mettre les Téfilines, partager un moment d’étude de la sagesse de la Torah.

Mais elle n’est pas prête. Vous savez que le concept du service de D.ieu est encore étranger à une vie conditionnée à tout voir à travers le prisme de l’égo. Vous savez qu’avant de pouvoir l’introduire au monde de la Torah et des Mitsvot vous devez au préalable la rendre réceptive à la Divinité, réceptive à une vie d’intimité avec le Divin.

Alors, quand vous la rencontrez dans la rue, vous souriez tout simplement et dites : « bonjour ! » ; vous l’invitez chez vous pour prendre un café ou à un repas de Chabbat. Vous bavardez de tout et de rien. A ce moment précis, vous ne suggérez pas de changements dans sa vie. Vous voulez juste qu’elle s’ouvre à vous et à ce que vous représentez.

Apparemment, vous n’avez rien fait. Mais essentiellement s’est produit une transformation profonde et radicale. La personne est devenue un réceptacle pour la Divinité. Bien sûr, le but des réceptacles est d’être remplis de contenu. Le but d’une maison est d’être habitée. Le Tabernacle fut construit pour abriter la présence de D.ieu. Mais c’est la construction des ustensiles pour la Divinité qui représente le défi le plus important et son accomplissement le plus révolutionnaire.

Le Coin de la Halacha

 Qu’est-ce que les « quatre Parachiot » ?

Nos Sages ont institué de lire, en plus de la Sidra hebdomadaire, une « Paracha » supplémentaire durant les semaines qui précèdent Pourim et Pessa’h.

  • La première s’appelle « Chekalim ». Elle rappelle la nécessité pour chacun de donner chaque année un demi-chékel pour l’entretien du Temple et l’achat des sacrifices communautaires. Cette Paracha (Exode 30, 11 à 16) est lue le Chabbat qui précède Roch ‘Hodech Adar 2 (cette année, le Chabbat Vayakhel 26 février 2022). On sortira donc deux rouleaux de la Torah :

- un pour la Paracha de la semaine : Vayakhel dans lequel on lira sept montées ;

- un pour la Paracha « Chekalim » (un appelé qui lira aussi la Haftara tirée du livre des Rois.

  • La seconde s’appelle « Za’hor» et rappelle la nécessité de se souvenir d’Amalek (Devarim – Deutéronome 25, 17 à 19). Elle est lue le Chabbat précédant Pourim, cette année le Chabbat Vayikra 12 mars 2022. La Haftara relate le combat du roi Chaoul contre Amalek (Samuel I – 15, 1 à 34).
  • La troisième s’appelle « Para » (Bamidbar – Nombres 19, 1 à 16) et rappelle la nécessité de se purifier avant la fête de Pessa’h. Elle est lue le Chabbat Chemini 26 mars 2022. La Haftara rappelle la pureté du Temple.
  • La quatrième s’appelle « Ha’hodech » (Chemot – Exode 12, 1 à 20) et rappelle l’importance du mois de Nissan et le sacrifice pascal. Elle est lue le Chabbat Roch Hodech Tazrya 2 avril 2022. Ce Chabbat, on sortira 3 rouleaux de la Torah : pour Chabbat, pour Roch Hodech et pour la Parachat Ha’hodech. On lira la Haftara dans Ezékiel de 45, 15 à 46,18. avec des versets sur Roch ‘Hodech.
Le Recit de la Semaine

 Vous pouvez toujours agir : le moment de vérité

Alors que je m’occupais des étudiants juifs des universités de Los Angeles, je me rendis compte que nombre de missionnaires chrétiens s’activaient sur les campus pour tenter de les convertir. De plus, au Beth ‘Habad je recevais des coups de téléphone de parents inquiets d’apprendre que leurs enfants se laissaient convaincre – sans doute faute d’arguments à opposer aux citations bibliques tronquées ou sorties de leur contexte.

Devant la multiplication de ces cas, je décidai d’écrire au Rabbi afin de recevoir sa bénédiction pour contrecarrer ce phénomène. Le Rabbi me répondit immédiatement avec sa bénédiction en précisant qu’il prierait pour moi sur la tombe de son beau-père, le Rabbi précédent. Son secrétaire, le regretté Rav Leib Groner me fit remarquer qu’il s’agissait d’une réponse inhabituelle car, dans le passé, le Rabbi n’avait pas encouragé ce genre d’initiative. Je me suis donc investi à fond dans ce projet et, au fil des années, j’ai vu les fruits de mes efforts quand des jeunes gens se mirent à réfléchir et à revenir au judaïsme.

Une famille me contacta car un de leurs fils s’était totalement impliqué dans un groupe chrétien. Il ne communiquait plus avec sa famille, refusait de répondre aux appels angoissés de ses parents et à mes invitations à le rencontrer. Je suggérai aux parents d’écrire eux-mêmes au Rabbi. Non seulement la maman reçut sa bénédiction pour que le fils retourne au judaïsme mais reçut aussi une longue lettre, datée du 25 Av 5740 (1980) avec un message encourageant : « Vu le sérieux de la situation, je suis confiant que vous ne vous contenterez pas de ce qui a été accompli jusqu’à présent ; vous allez certainement intensifier vos efforts, aussi bien votre mari que vous-même et vos amis pour empêcher cette tragédie. En effet, quand il s’agit d’un cœur juif, on ne sait jamais quand et comment viendra le moment de vérité ».

Puis venait un conseil inattendu – que j’ai partagé depuis avec d’autres parents dans la même situation :

« Je dois attirer votre attention sur le point suivant – que, j’espère, vous accepterez dans l’esprit avec lequel il est offert : tous les membres d’une famille juive constituent un organisme. Quand une partie a besoin d’un traitement spécial, il peut être effectué soit directement – si possible – soit indirectement : en renforçant les autres parties de l’organisme, surtout les principales, celles qui en gouvernent toutes les fonctions.

Dans le cas présent, il convient de garder à l’esprit que le chef de famille est appelé « le maître de la maison » (comme le cerveau qui dirige le corps) tandis que son épouse est appelée « le pilier de la maison » et correspond au cœur de la famille. Cela signifie que, si les parents renforcent leur lien avec la Torah et les Mitsvot, cela aura un effet bénéfique sur tous les membres de la famille dans la même direction. Bien sûr, cela peut impliquer des difficultés s’il faut opérer certains changements, même des changements radicaux d’habitudes et de style de vie etc. Mais si l’on considère les effets à long terme – surtout que, pour les parents, aucun effort n’est trop difficile quand c’est pour le bien de leurs enfants – quelle est l’importance d’une quelconque difficulté ? ».

Ainsi le Rabbi sous-entendait que, lorsqu’une partie d’un corps (leur fils) était « malade » et ne pouvait pas être soignée directement, il appartenait « au cerveau et au cœur », donc aux parents d’agir ! S’ils se renforçaient dans leur judaïsme, cela affecterait leur fils d’une manière ou d’une autre.

Je les encourageais donc à suivre le conseil du Rabbi, ce qu’ils acceptèrent – même si les résultats ne furent pas immédiats.

Cependant, une autre famille qui suivit ce conseil en fut largement récompensée : le fils s’était marié avec une femme non-juive sans en informer ses parents. Il accepta de me rencontrer mais juste cinq minutes, pour leur faire plaisir. Au moment où il sortit, je mentionnai que ma porte resterait toujours ouverte pour lui.

Entretemps, je contactai les parents et je leur fis lire cette lettre du Rabbi. Ils la prirent très au sérieux et fixèrent des Mezouzot aux portes de leur maison, même à la porte de l’ancienne chambre de leur fils. Ils se mirent à étudier la Torah avec moi et participèrent à nos repas de Chabbat.

Une année passa quand, soudain, leur fils me téléphona :

- Vous m’aviez annoncé que votre porte resterait ouverte pour moi. Est-ce toujours le cas ?

Nous avons fixé un rendez-vous et il me raconta qu’au début, il avait été heureux de mener une vie vouée au christianisme. Mais un jour, lui et sa femme avaient visionné à la télévision un documentaire sur la Shoah. Lui avait été ému aux larmes mais, à l’évidence, pas sa femme. De fait, elle laissa échapper des mots plus que désobligeants, même infâmants contre le peuple juif :

- J’ai été si choqué ! avoua-t-il. Cette femme qui était supposée m’aimer avait caché tout ce temps dans son cœur un antisémitisme féroce !

Cela marqua un tournant dans sa vie ; il se mit à réfléchir à la situation dans laquelle il s’était placé et décida de venir m’en parler. Ensemble, nous avons discuté des différences fondamentales entre le christianisme et le judaïsme et il retourna à ses racines.

Cela illustrait exactement ce que le Rabbi avait écrit dans sa lettre : on ne sait jamais quand le moment du réveil se produira, le moment qui change le cours de la vie d’une personne et qui rallume en lui la flamme du judaïsme.

Et les parents avaient certainement joué un rôle primordial en acceptant de renforcer leur lien avec la Torah et ses commandements ; indirectement, ils avaient eu une influence spirituelle évidente sur leur fils.

Les parents ne sont pas seuls, le Rabbi les avait conseillés et la porte était restée ouverte…

Rav Bentsion Kravitz

Jews for Judaism - JEM

Traduit par Feiga Lubecki