Le verset Michpatim 21, 1 dit : «Voici les Jugements». La Parchat Yithro décrivait le don de la Torah, avec des voix et des éclairs. Il était donc nécessaire, après cela, de prendre connaissance du contenu de la Torah, donnée des cieux dans des circonstances aussi miraculeuses. C’est précisément l’objet de cette Parchat Michpatim, qui énonce des Préceptes simples, des règles matérielles, s’appliquant aux relations entre les hommes, qui sont bien évidentes et que chacun comprend clairement(1).
En ce sens, la Parchat Yithro et la Parchat Michpatim représentent deux aspects oppo-sés. La première décrit une révélation de D.ieu qui fut surnaturelle, céleste, transcendant la raison, alors que la seconde traite d’objets matériels, courants et quotidiens, perceptibles à l’intellect le plus immédiat.
Pourtant, une analyse plus profonde révèle que ces deux Sidrot au contenu si opposé sont, en réalité, deux étapes complémentaires, dans le prolongement du fait nouveau et extraordinaire qui fut introduit lors du don de la Torah. La finalité de la révélation du Sinaï était la suppression de la coupure qui existait(2) entre le monde spirituel et l’existence matérielle, afin d’introduire la sainte Torah dans le monde, à proprement parler, d’unifier pleinement le matériel et le spirituel.
Le principe, en la matière, n’est pas que la Sainteté divine supprime et brise l’existence matérielle. Bien au contraire, celle-ci doit rester ce qu’elle est, une existence matérielle soumise aux limites de ce monde, mais la Sainteté céleste doit y régner. C’est l’unité véritable entre le spirituel et le matériel(3).
La première étape de cette unification entre le spirituel et le matériel est décrite dans la Parchat Yithro. Le verset(4) : «L’Eternel descendit sur le mont Sinaï» décrit, en effet, une révélation divine merveilleuse, des voix et des éclairs.
Lors de cette révélation, une formidable terreur saisit le monde entier et le Midrash constate que(5) : «aucun oiseau n’a gazouillé, aucun volatile n’a volé, aucun bœuf n’a mugit, le monde était silencieux et muet(6)». Cette révélation divine conduisit le peuple d’Israël à la soumission la plus intense(7), au point de fuir le mont Sinaï et de se tenir à distance. Ce fut la première étape. L’Eternel descendit ici-bas.
Mais, le but, comme on l’a indiqué, n’était pas que le monde perde son existence. Il doit, bien au contraire, continuer à fonctionner comme un monde matériel, mais, simultanément, se mettre au service du domaine de la Sainteté. C’est pour cette raison qu’une seconde étape fut nécessaire, celle qui est décrite par la Parchat Michpatim.
La Parchat Michpatim présente les lois financières et celles de la réparation du tort causé, c’est-à-dire des principes s’appliquant aux domaines de ce monde, à proprement parler. Elle montre comment un Juif peut mettre en pratique les Mitsvot de D.ieu, dans son existence physique, précisément ces Mitsvot simples et logiques qui sont définies dans la Paracha, car ce sont elles qui permettent à la Sainteté de D.ieu de s’introduire dans le monde, de s’en revêtir et d’en devenir partie intégrante.
La Parchat Michpatim établit clairement que la sainteté n’est pas synonyme de soumission totale de la matière et d’élévation au-dessus des règles s’appliquant au monde matériel. Bien au contraire, elle doit se manifester dans les actes les plus modestes et les plus quotidiens, qui sont également effectués en conformité absolue avec les dispositions de la Torah, comme le dédommagement du tort causé, le traitement approprié d’un dépôt en gage ou le paiement d’un dû en son temps(8). Grâce à tout cela, la Sainteté divine peut être véritablement reliée à la vie concrète et matérielle.
Toutefois, pour qu’un Juif dispose de la force nécessaire et puisse introduire la sainteté dans sa vie courante, est nécessaire l’étape de la Parchat Yithro, la révélation surnaturelle de D.ieu(9), à l’origine de la foi et de la soumission à D.ieu. C’est uniquement après cela qu’il est possible de sanctifier l’existence quotidienne(10).
(Discours du Rabbi, Likouteï Si’hot, tome 16, page 242)
(1) C’est pour cette raison que ces Préceptes sont appelés Michpatim, des «jugements». Tout comme le jugement est rendu après une analyse rationnelle, qui doit pouvoir être justifiée, ces Préceptes s’inscrivent parfaitement dans la rationalité humaine.
(2) Depuis la création du monde.
(3) Qui, depuis le don de la Torah, ne sont plus antinomiques.
(4) Chemot 19, 20.
(5) Midrash Chemot Rabba, à la fin du chapitre 29.
(6) La soumission était totale, dans le monde entier.
(7) S’il en était ainsi dans le monde, combien plus était-ce le cas pour les enfants d’Israël.
(8) C’est-à-dire également dans les relations entre les hommes.
(9) Qui doit nécessairement précéder l’approche rationnelle.
(10) De la manière qui est décrite dans la Parchat Michpatim.
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- Publication : 31 janvier 2018