Laissons entrer la lumière !
Lorsque le cultivateur, après tous les efforts investis, voit que la moisson lève enfin, il ne peut retenir une expression de bonheur. Il a tant fait, tant attendu aussi, que, au moment où les premières pousses surgissent, même s’il sait que tout n’est pas encore acquis, c’est une forme nouvelle d’allégresse qui s’empare de lui. D’une certaine manière, les Juifs sont des cultivateurs de lumière. Jour après jour, ils ensemencent le monde de l’accomplissement de leurs Mitsvot et, jour après jour, ils espèrent voir apparaître les fruits de leurs actions. Parfois, le ciel gris, les nuages lourds et bas ne paraissent laisser que peu d’espoir. Pourtant, ils s’obstinent et l’instant suivant les voit, de nouveau, au travail. Jusqu’en ce mois de Kislev, le mois de lumière. Alors, tout se passe comme si la récolte s’annonçait enfin. En haut de tous les chandeliers de la fête, les flammes dansent et éclairent le monde. La fête de ‘Hanoucca arrive sur le monde et, avec elle, la puissance qui en chasse l’obscurité comme les nouvelles pousses vertes qui rejettent au loin l’aridité du désert.
Prendre soin de la lumière est chose difficile. Ils sont parfois nombreux ceux qui voudraient la voir s’éteindre. Au fil de l’histoire, ils ont porté des noms différents – babyloniens, grecs, romains etc. – mais leur projet a toujours été le même. La lumière dérange celui qui préfère ne rien voir, ne rien connaître afin de mieux écraser tout ce qui ne lui ressemble pas et de ne laisser au monde qu’un visage unique, figé pour une apparente éternité. Inlassablement, le peuple juif a relevé ce défi-là. Dans les temps difficiles comme dans les temps aimables, il reste conscient que la lumière est précieuse et que, si elle est à la fois sa vie et son œuvre, c’est aussi parce que le monde entier en a besoin. Sans elle, il ne serait qu’une demeure terne, que les hommes rêveraient de délaisser. C’est pourquoi, pendant toute la semaine de ‘Hanoucca, la lumière grandit encore, dans toutes les maisons juives et sur toutes les places publiques.
Ceux qui cultivent la lumière la voient donc naître et ils ne retiennent pas leur sourire. Celui-ci n’est pas le signe d’un contentement rassasié, il est celui de l’homme qui, ayant beaucoup travaillé, sait que le chemin est encore au-devant de lui. Une différence pourtant : à présent, la lumière naît. Faisons entrer celle de ‘Hanoucca dans notre ville, notre maison et notre cœur – finalement dans notre vie – le chemin s’illumine à l’instant. Et cette lumière-là ne disparaîtra pas.
La Techouva au temps de Machia’h
Le Zohar (III, 153b) enseigne : «Machia’h viendra pour que les Justes fassent Techouva». La définition du «Juste», du «Tsadik» étant précisément qu’il n’a pas commis de faute, pourquoi devrait-il revenir à D.ieu, faire Techouva, en ce nouveau temps ?
En fait, quand Machia’h viendra, c’est un niveau si élevé de la Divinité qui se révèlera que, en comparaison, même le degré le plus haut de la Sagesse Divine sera considéré comme aussi bas que le monde matériel. Du fait de l’intensité et de la grandeur de cette révélation, les Justes ressentiront un sentiment de Techouva. Bien entendu, celui-ci ne correspondra à aucune faute mais à la pure volonté de s’approcher de D.ieu.
(d’après Likoutei Torah, Chir Hachirim, p. 50b) H.N.
Vayéchev
Deux rêves, deux messages
Le commencement de la Paracha de cette semaine relate les deux rêves de Yossef. Le sens de ces deux rêves est le même. Ils font tous deux allusion au fait que Yossef allait gagner l’ascendant sur ses frères et qu’ils s’inclineraient devant lui. (Le second rêve possédait un détail supplémentaire : «le soleil et la lune», Yaakov et Bilha, s’inclineraient également devant lui).
Plus tard, dans la Paracha Mikets, la Torah relate que le pharaon fit également deux rêves. Et là encore, ils avaient tous deux le même sens. Mais en ce qui concerne les rêves du pharaon, la Torah nous indique qu’ils se répétèrent pour montrer que les événements auxquels ils faisaient allusion étaient imminents. Par contre, elle ne livre aucune explication à propos des rêves de Yossef.
Cela implique (car l’addition du fait que Yaakov et Bilha s’inclinent également n’est pas assez significative et cela aurait pu être évoqué dans le premier rêve) que ces deux rêves, bien que partageant le même sens général, reflètent deux concepts différents.
Il nous faut donc comprendre leur signification et la leçon qu’ils nous enseignent. Cela est d’autant plus important qu’il nous est dit : «les actes des Patriarches sont des signes pour leurs descendants». En effet, bien que Yossef ne soit pas considéré comme l’un de nos Patriarches, les événements qui le concernent nous touchent également puisque son service Divin est une extension directe de celui de Yaakov.
Les rêves d’un Juif sont différents
La différence entre les deux rêves de Yossef peut ainsi s’expliquer : le premier concerne des objets matériels : ses frères et lui liaient des gerbes dans le champ. Le second rêve fait intervenir le soleil, la lune et les étoiles, évoluant tous dans les sphères célestes.
Par contre, les rêves du pharaon concernent tous deux des objets appartenant au monde concret. L’un parle d’épis de blé (c’est-à-dire des plantes) et l’autre des vaches (appartenant au règne animal). Le pharaon n’était en rien concerné par les sphères célestes. Plus encore, même dans le domaine matériel, ses rêves suivent une démarche descendante. Tout d’abord, il rêve de vaches puis d’épis de blé. Yossef, quant à lui, suit le mode : «Il faut toujours monter quand il s’agit de sujets saints». Tout d’abord, il rêve d’objets matériels puis de sujets célestes.
Cela souligne une qualité particulière des Juifs. Même lorsqu’un Juif est plongé dans des préoccupations matérielles, il vit simultanément sur deux plans. Non seulement il est engagé dans le monde physique mais il garde un lien avec la vérité spirituelle du Monde Futur.
Fusionner le matériel et le spirituel
Tous les détails des récits de la Torah sont significatifs et nous apportent un enseignement dans notre service Divin. Ainsi, le fait que Yossef ait fait deux rêves, l’un concernant un sujet concret et l’autre concernant un sujet céleste, tous deux portant le même message, enseigne à chaque Juif à faire la fusion de ces deux mondes, son monde matériel et son monde spirituel, en une seule entité. Les préoccupations matérielles ne doivent pas entraver son service Divin mais le compléter. En fait, ils doivent totalement s’unir.
Bien que le Zohar affirme : «la force du corps est la faiblesse de l’âme», cela ne contredit pas nécessairement ce qui précède. Car le Zohar se réfère, non à la santé du corps physique, mais à la force de ses désirs et à la ferveur de son aspiration à jouir de choses matérielles. En ce concerne le véritable bien-être du corps, le Rambam écrit : «garder un corps sain et vaillant fait partie des voies de D.ieu».
Comprenons : toutes les activités matérielles : manger, boire et les autres, doivent être accomplies en ayant en perspective le spirituel : pouvoir servir D.ieu. Cet élan est une tendance naturelle chez chaque Juif, même le plus simple, comme l’illustre l’histoire suivante : Quand ils étaient jeunes, le Rabbi Rachab (cinquième Rabbi de Loubavitch), et son frère, Rav Zalman Aharon discutaient des qualités des Juifs. Pour les aider à trouver une réponse, leur père, le Rabbi Maharach, appela son secrétaire, Rav Ben Tsion, un Juif simple, peu érudit.
- Ben Tsion, as-tu mangé aujourd’hui ? lui demanda le Rabbi.
- Oui.
- As-tu bien mangé ?
- Que voulez-vous dire par «bien» ? Grâce à D.ieu, je suis satisfait.
- Pourquoi as-tu mangé ?
- Pour vivre.
- Et pourquoi vis-tu ?
- Pour être un Juif et faire ce que veut D.ieu, répondit le secrétaire, soupirant légèrement.
Après quoi le Rabbi dit à ses enfants : «Vous voyez ? La nature profonde d’un Juif est de manger pour vivre. Et il vit pour être un Juif et faire ce que veut D.ieu. Et il soupire parce qu’il ressent qu’en réalité, il ne vit pas complètement en accord avec ces valeurs.
Plus encore, puisque le désir et l’intention du juif sont que toutes ses préoccupations matérielles soient en relation avec le spirituel, alors c’est ce qui se produit réellement. Comme le disait le Baal Chem Tov : «Là où se trouve le désir d’une personne, là il se trouve lui-même».
Pour récolter, il faut semer et nos efforts
seront couronnés
Ce qui précède s’applique à l’idée générale des rêves de Yossef. Mais les détails en apportent également des leçons. Le premier rêve commence en nous montrant Yossef et ses frères en train d’attacher des gerbes dans le champ. C’est un détail important. Les rêves de Yossef commencent par un travail, en opposition aux rêves du pharaon qui n’impliquent de sa part aucune activité.
La leçon de l’importance du travail accompagne le Juif quand il progresse sur l’échelle du service divin, commençant par les préoccupations matérielles et avançant pour inclure le spirituel.
Ainsi, tout d’abord, le travail est nécessaire pour grimper les échelons qui nous permettent d’établir une relation avec D.ieu. Bien que les Juifs soient «des fils de rois» et même des «rois», cela ne signifie pas pour autant qu’ils sont exempts d’efforts à faire. Bien au contraire, toutes les bénédictions qu’ils reçoivent du royaume de la sainteté passent par le travail. Mais, puisque l’on parle de «rois», chaque petit effort est considéré comme un labeur ardu. Et en retour, D.ieu accorde «les fêtes de Salomon à l’apogée de son règne» et plus encore. Mais il faut quand même déployer des efforts.
On nous a promis : «Si tu travailles, tu trouveras», c’est-à-dire que nous obtiendrons des réussites inespérées, tout comme l’on ne s’attend pas à retrouver un objet perdu. En fait, ce que nous obtiendrons dépassera de loin ce que nous aurions pu gagner par nos seuls efforts, et nous serons élevés aux plus hauts niveaux spirituels.
Comment allume-t-on les lumières de ‘Hanouccah le vendredi après-midi 29 novembre 2013 ?
Il convient, avant l’allumage, de faire d’abord la prière de Min’ha. On ne peut allumer qu’à partir de 16h 06 (heure de Paris).
Le maître de maison, et éventuellement tous les garçons de la maison, prononceront d’abord les deux bénédictions :
(1) «Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Ner ‘Hanouccah».
Béni sois-Tu, Eternel notre D.ieu, Roi de l’univers qui nous a sanctifiés par Ses Commandements et nous a ordonné d’allumer les lumières de ‘Hanouccah.
(2) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéassa Nissim Laavoténou Bayamine Hahème, Bizmane Hazé ».
Béni sois-Tu, Eternel notre D.ieu, Roi de l’univers qui a fait des miracles pour nos pères en ces jours-là, en ce temps-ci.
On allumera d’abord la mèche ou la bougie située le plus à gauche puis celle qui la précède, etc. à l’aide de la bougie appelée «Chamach».
On aura pris soin de mettre assez d’huile dans les 3 godets (ou d’avoir prévu 3 bougies assez grandes) pour durer jusqu’à une demi-heure après la nuit, c’est-à-dire jusqu’à environ 17h 50 (heure de Paris). Après l’allumage, on récite «Hanérot Halalou».
Ensuite, les jeunes filles et les petites filles allumeront leurs bougies de Chabbat (après avoir mis quelques pièces dans la boîte de Tsédaka (charité) ; les femmes mariées allumeront au moins deux bougies.
Tout ceci devra être terminé avant 16h 39 (heure de Paris) le vendredi 29 novembre.
Une jeune fille (ou une femme) qui habite seule devra elle aussi procéder d’abord à l’allumage des lumières de ‘Hanouccah puis des bougies de Chabbat, avec les bénédictions appropriées.
F. L.
Même au Congo ?
Le vendredi 19 et le samedi 20 Kislev marquent la libération de Rabbi Chnéour Zalman, auteur du Tanya et du Choul’hane Arou’h Harav.
Au mois d’Adar (février) 1985, un ami de Rav Leibel Zaientz le contacta afin qu’il procure à un de ses proches parents de la Matsa Chmoura pour la fête de Pessa’h, comme le font tous les émissaires du Rabbi dans le monde entier. Le problème était que cet homme habitait à Kinshasa, capitale du Zaïre, maintenant République Démocratique du Congo.
En apprenant qu’un Juif habitait dans ce pays lointain et exotique, Rav Leibel fut le plus heureux des hommes ! En effet, Rav Leibel se consacrait corps et âme à la campagne initiée par le Rabbi de Loubavitch : imprimer partout dans le monde, en compagnie de communautés juives locales, le Tanya, l’œuvre maîtresse de Rabbi Chnéour Zalman de Lyadi. Cette nouvelle signifiait donc qu’il pouvait voyager au Congo et… y faire imprimer le Tanya, l’étudier avec ce Juif et donner ainsi une grande satisfaction au Rabbi.
Apparemment, Rav Leibel ne se renseigna pas trop sur l’endroit qu’il s’apprêtait à visiter : sinon il aurait compris qu’il s’agissait d’un pays d’Afrique sub-saharienne qui, à l’époque, était considéré comme difficile, même si la situation était calme.
Mais Rav Leibel ne s’attarda pas sur ces «détails». Il écrivit au Rabbi une lettre dans laquelle il exposait son plan de voyage. Le Rabbi approuva ses projets mais lui demanda d’organiser à l’avance où il pourrait imprimer le Tanya et trouver sur place l’imprimeur qui s’occuperait de l’édition etc. L’ami de Rav Leibel prit en charge toutes ces dispositions techniques et Rav Leibel commença ses préparatifs.
Comme il était très proche de la regrettée Rabbanite ‘Haya Mouchka, Rav Leibel lui rendit visite et lui annonça fièrement qu’il s’impliquait à fond dans la campagne initiée par le Rabbi : il allait même faire imprimer le Tanya à Kinshasa. Si Rav Leibel n’était pas très au courant des événements politiques, la Rabbanit, elle était consciente des dangers qu’il encourrait peut-être en se rendant dans ce pays instable. Inquiète, elle lui demanda : «Vous rendez-vous compte où vous allez ? Savez-vous que ce pays n’est pas très sûr ?»
Rav Leibel affirma que, puisqu’il voyageait avec la bénédiction du Rabbi, le Tout Puissant l’aiderait certainement !
En apprenant qu’il avait obtenu la bénédiction du Rabbi, la Rabbanite le bénit elle aussi en lui souhaitant un bon voyage. Cependant, elle s’inquiétait énormément ! Elle lui recommanda instamment de prendre toutes les précautions nécessaires et de lui faire part de son retour le plus rapidement possible.
Avant de partir pour Kinshasa, Rav Leibel reçut la réponse suivante du Rabbi, alors qu’il devait auparavant se rendre dans plusieurs autres pays d’Afrique du sud :
«On a insisté plusieurs fois sur la nécessité d’étudier le Tanya quand il est imprimé dans un endroit, au moins une fois… Il est inclus dans cette réponse de l’argent à remettre à la Tsedaka dans les endroits qu’il visitera. Je le mentionnerai sur le tombeau (du Rabbi précédent)».
Durant son voyage, Rav Leibel fit face à de nombreuses aventures mais, grâce à D.ieu, il surmonta tous les obstacles et parvint à faire imprimer le Tanya à Kinshasa en quelques jours. Il trouva là-bas une petite communauté soudée. Dès sa mission terminée, Rav Leibel s’empressa de quitter le pays, avec quelques exemplaires du Tanya dans ses valises : il avait laissé aux Juifs résidant sur place tous les autres exemplaires, ainsi que des Matsot Chmourot à l’approche de la fête de Pessa’h.
Le vendredi, veille du Chabbat où on bénit le mois de Nissan, Rav Leibel arriva à Brooklyn : dans ses valises, il avait emballé précieusement les Tanya qu’il avait fait imprimer au Brésil et ceux de Kinshasa.
Le lendemain, lors de la réunion ‘hassidique, le Rabbi appela Rav Leibel et lui remit une bouteille de vodka, comme c’était la coutume à cette époque. Le Rabbi lui demanda de se rendre à nouveau dans les endroits où il avait fait imprimer dernièrement le Tanya et d’apporter aux Juifs locaux de la Matsa Chmoura pour Pessa’h. Avec un grand sourire, le Rabbi précisa cependant : «Mais ne retournez pas à Kinshasa !»
Comme la Rabbanite lui avait demandé instamment de revenir et qu’il savait que, jusqu’à la nouvelle de son retour en bonne santé, elle serait inquiète, il lui annonça son retour. La Rabbanite ne cacha pas sa joie de le savoir revenu sain et sauf et, soulagée, lui demanda de venir lui rendre visite en affirmant à son secrétaire : «Aujourd’hui nous aurons la visite de quelqu’un d’important, important parce qu’il revient d’un pays pareil…!»
Quand Rav Leibel entra dans la maison du Rabbi, sur President Street, la Rabbanite lui transmit que le Rabbi avait demandé que le visiteur se rende dans son bureau situé à l’étage. En général, les rares personnes qui rendaient visite à la Rabbanite étaient reçues au rez-de-chaussée et ne se hasardaient pas dans les chambres situées à l’étage. Mais la Rabbanite affirma à Rav Leibel : «Mon mari a déclaré qu’un invité aussi important doit être reçu dans le bureau !»
Quand Rav Leibel quitta la maison, la Rabbanite lui confia : «Vous avez labouré, semé et sué ! Mais bientôt, on enverra là-bas un Chalia’h (émissaire) !»
Effectivement, le Congo Kinshasa est devenu depuis 1991 le lieu de résidence de Rav Chlomo Bentolila qui, avec sa famille et des jeunes gens qui viennent régulièrement le seconder, s’occupent des besoins culturels et cultuels des Juifs d’Afrique sub-saharienne. Le couple qui avait motivé la venue de Rav Leibel en premier lieu a fait construire un Mikvé (bain rituel). De nombreuses autres institutions éducatives et sociales ont été établies par le Rav Bentolila.
Comme l’avait prédit la Rabbanite, une vie juive intense se développe maintenant dans ce pays ! Sa prophétie s’est pleinement réalisée !
Reb Leibel Zaientz
Traduit par Feiga Lubecki