Générations
Regarder avec attention se dérouler le cycle de lecture de la Torah est toujours une expérience bouleversante, en ce qu’elle rappelle bien des évidences et que celles-ci remettent en cause bien des certitudes. C’est ainsi que, successivement, nous avons vu s’écouler le temps d’Abraham, le premier de nos ancêtres, puis celui d’Isaac et de Jacob, ses descendants et successeurs. Il faut prendre la pleine mesure de ce qui n’est pas une simple généalogie : c’est un peuple différent, le nôtre, que nous voyons apparaître. Des siècles plus tard, après la sortie d’Egypte, un prophète non-Juif, Bilaam, exprimera cette différence essentielle dans des termes que D.ieu met dans sa bouche : « C’est un peuple qui demeure solitaire et il ne se confond pas avec les autres nations », proclame-t-il. L’histoire a largement confirmé cette affirmation.
De fait, au travers des époques, le peuple juif a bien souvent vécu à contre-courant. Tour à tour qualifié de révolutionnaire puis d’obscurantiste par les uns ou les autres, il a continué son chemin. Sans accorder de considération particulière à ce qu’affirmaient ceux qui l’entouraient, il s’est contenté de rester fidèle à l’héritage transmis scrupuleusement depuis Abraham. Cette condition historique de l’identité juive n’est évidemment pas toujours aisée à porter. Quelquefois, la route semble longue et on se prend à rêver d’y avoir des compagnons qui comprendraient le sens de notre action, le poids de la tâche à accomplir et l’urgence de sa réalisation. Cela arrive parfois mais, trop vite, cette différence subtile et essentielle remonte à la surface et nous n’avons plus, une fois de plus, qu’à poursuivre notre chemin.
Il est clair que cette route est celle de la paix et de la concorde, qu’elle a pour but et pour moyen ultimes la réalisation de l’harmonie universelle. Mais nous traversons des temps où la différence, même respectueuse de tous, est probablement une des choses les moins comprises et, par conséquent, les moins acceptées. Le peuple juif est, de fondation, un peuple minoritaire et il n’ambitionne pas de position particulière. Il entend simplement vivre sans oublier car, pour lui, oublier c’est trahir l’héritage des siècles, se trahir et finalement disparaître. Dans ce cycle de lecture de la Torah où s’écoulent les générations, nous découvrons enfin une sorte de secret de la pérennité et ainsi du bonheur. A partager.
Une œuvre parfaite
Pendant le temps de l’exil, l’offrande de sacrifices est impossible du fait de l’absence de Beth Hamikdach. Certes, les Sages ont instauré les prières en remplacement de ces cérémonies. Cependant, un tel remplacement est, semble-t-il, imparfait comme l’exprime la liturgie : « Et là, (dans le Beth Hamikdach, après la venue de Machia’h) nous ferons devant Toi… Selon l’ordre de Ta volonté ».
C’est précisément cette idée qui pose question. L’œuvre spirituelle accomplie par la prière est supérieure à celle des sacrifices, la première s’attachant à l’âme de l’homme tandis que la seconde porte sur son aspect animal. Pourquoi, dès lors, souligner l’importance primordiale des sacrifices ?
En fait, l’impossibilité d’offrir un sacrifice en temps d’exil a également un sens spirituel : comme l’homme est attaché « en bas », il n’a pas la force d’élever « l’animal » et doit se contenter d’agir sur l’âme par la prière. En revanche, lorsque le Machia’h viendra, l’homme parviendra à la plénitude et son œuvre pourra englober tous les aspects.
(D’après Torah Or, Vaye’hi 46b)
Vayétsé
Yaakov fuit Beer Sheva et se dirige vers ‘Haran. En chemin, il se trouve face à « l’endroit », y dort et rêve d’une échelle qui relie le ciel et la terre, des anges y montent et y descendent. D.ieu lui apparaît et lui promet que la terre sur laquelle il se trouve sera sienne. Au matin, Yaakov fait de la pierre, sur laquelle il a reposé sa tête, un autel, priant pour qu’il devienne la Maison de D.ieu.
A ‘Haran, il va devenir le berger du troupeau de son oncle Lavan, pour obtenir la main de sa fille cadette, Ra’hel. Mais Lavan le trompe et le fait épouser sa fille aînée, Léa. Yaakov épouse Ra’hel une semaine plus tard en échange de sept années de travail supplémentaires.
Léa donne naissance à six garçons : Réouven, Chimone, Lévi, Yehouda, Issa’har et Zevouloun et à une fille, Dina. Ra’hel, quant à elle, reste stérile. Elle offre alors à Yaakov d’épouser sa servante Bilha et deux fils lui naissent : Dan et Naphtali. Léa en fait de même avec sa servante Zilpa qui donne naissance à Gad et à Acher. Finalement, D.ieu répond aux prières de Ra’hel et elle met au monde Yossef.
Yaakov veut quitter ‘Haran, après ces quatorze années, mais Lavan le persuade de rester en échange de troupeaux. Malgré les efforts de Lavan pour le tromper, Yaakov s’enrichit et part subrepticement au bout de six ans. Menacé par D.ieu s’il le poursuit, Lavan abandonne son intention de nuire et conclut une alliance avec Yaakov.
Yaakov se dirige vers la Terre Sainte où il est accueilli par des anges.
Les quatre questions
Yaakov fuit la colère de son frère Essav et vient vivre chez son oncle Lavan. Après un mois, Lavan lui dit : « Juste parce que tu es mon frère, travaillerais-tu, pour moi, pour rien ? »
Finalement, Yaakov travaille sept ans pour Lavan. Son salaire sera la femme qu’il veut épouser : Ra’hel, la seconde fille de Lavan.
Le Or Ha’hayim, l’un des plus éminents commentateurs sépharades, pose deux questions : tout d’abord, qui dit que Yaakov n’avait pas l’intention de lui demander une rémunération pour son travail ? Par ailleurs, pourquoi Lavan n’aimait-il pas la perspective que Yaakov travaille gratuitement ? Après tout, Lavan « le fourbe » n’aura aucun scrupule à dépouiller Yaakov des possessions qu’il aura péniblement acquises ! Pourquoi serait-il réticent à accepter le don de Yaakov ?
L’on peut poser une troisième question : Si Lavan ne voulait pas que Yaakov travaille gratuitement, pourquoi a-t-il attendu un mois avant de lui proposer de le payer ?
Et finalement, pourquoi Lavan ne demanda pas simplement : « Quel prix demandes-tu pour ton travail ? »
Pourquoi devait-il ajouter : « Juste parce que tu es mon frère, travaillerais-tu, pour moi, pour rien ? »
La découverte de Lavan
L’explication qui suit s’appuie sur l’œuvre ‘hassidique « Rav Tov » qui traite de certaines de ces questions.
Quand Yaakov arriva, Lavan lui dit : « Tu es mes os et ma chair ». Il invitait, par ces paroles, Yaakov à rester chez lui. Cependant, au cours du premier mois du séjour de Yaakov, il découvrit quelque chose sur Yaakov qu’il ignorait complètement.
A l’arrivée de Yaakov, Lavan pensait qu’il n’était en rien différent de lui. Il pensait que c’était quelqu’un qui avait les mêmes préoccupations matérialistes que lui. C’est pourquoi, Lavan dit à Yaakov : « Tu es mes os et ma chair ». Nous partageons les mêmes caractéristiques physiques, nous sommes génétiquement liés.
Toutefois, après un mois, Lavan réalisa que Yaakov n’était pas « son frère » au sens du commun des mortels. Certes, ils partageaient le même sang, puisqu’il était son oncle, mais en termes d’éducation, de buts et d’aspirations, tout les séparait. Lavan était un matérialiste, un opportuniste pour lequel la fin justifiait les moyens, alors que Yaakov était une personne entièrement spirituelle. Lavan réalisa qu’il y avait un immense fossé, infranchissable, qui les séparait.
C’est pourquoi Lavan demanda à Yaakov : « Es-tu mon frère ? »
Ces mots ne signifient pas qu’en dépit du fait qu’il était son frère, il devait quand même le payer. Bien au contraire, il se soustrayait à l’idée qu’ils étaient frères. D’où sa question : « Es-tu mon frère ? Tu es tellement différent de moi, par ton caractère et par ta spiritualité, comment cela serait-il possible ? Dans ce cas, comment peux-tu travailler pour moi ? Comment pouvons-nous coexister alors que nous avons des intérêts et des attentes dans la vie si différents ? » Que pourrais-je te payer pour que tu sois un partenaire dans mes entreprises qui sont tout sauf saintes ? »
La rémunération de Yaakov doit être spirituelle
Yaakov n’aurait pu être à l’aise de travailler pour Lavan, quel qu’ait pu être son salaire. La seule forme de rémunération qui lui conviendrait, conclut Lavan, devait être de nature plus spirituelle et non éphémère. Elle devait inclure une Mitsva.
Si Yaakov devait devenir riche sans que cela n’implique son service de D.ieu et de l’humanité, il ne se sentirait jamais à l’aise avec ses gains. Quand l’on reçoit quelque chose « pour rien », on s’y réfère comme au « pain de la honte ». L’on ne peut véritablement être satisfait d’un cadeau gratuit. La nature humaine est telle que nous devons gagner ce que nous obtenons. Et pour une personne du calibre de Yaakov, gagner signifiait : « faire une Mitsva ».
En effet, Lavan dit à Yaakov : « puisque, de toute évidence, tu n’es pas mon frère d’âme, tu ne voudras pas travailler pour moi, pour tout l’or du monde, parce que toi tu considéreras que tu n’as rien obtenu ».
Lavan sentait donc que Yaakov ne travaillerait pas pour rien, sans véritablement gagner son droit au travail et vivre de son travail, s’il n’y avait pas une connexion spirituelle.
La Mitsva du mariage
Quelle Mitsva Lavan pouvait-il donner à Yaakov ?
S’il existait une Mitsva qui pouvait alors être observée, il est sûr que Yaakov l’accomplissait déjà.
Cependant, il y avait une Mitsva qu’il n’avait pas encore pratiquée. Il était toujours célibataire et ne pouvait donc établir le foyer et la famille qui deviendrait le noyau de la nation juive, à laquelle serait confiée la Torah.
Pour Yaakov, le mariage était la Mitsva, « par excellence ». Son amour et sa passion pour Ra’hel n’était pas simplement de nature romantique. Mais ils étaient motivés par son désir intense d’être celui qui forgerait un autre lien dans la chaîne commencée par Avraham et Yits’hak et qui aboutirait au Don de la Torah, au Mont Sinaï. La plus grande passion de Yaakov était d’être un maillon intégral dans cette chaîne, un maillon et une chaîne qui existent jusqu’à ce jour.
Qui défie toute logique
Cette analyse jette un peu de lumière sur une autre déclaration plutôt étonnante de Yaakov, quand il dût travailler sept ans pour épouser Ra’hel. Le dur labeur de Yaakov durant sept ans, nous enseigne la Torah, « était ressenti comme quelques jours, à cause de son amour pour elle ». Ce sentiment ne va-t-il pas à l’encontre de la logique ? Si quelqu’un est terriblement épris, chaque minute devrait être ressentie comme une année. Et pourtant, sept ans furent ressentis comme quelques jours !
La réponse tient dans le fait que ce que ressentait Yaakov était l’expression d’une passion spirituelle. Dans le royaume spirituel, chaque minute de préparation en vue du but à atteindre n’est pas moins une Mitsva et une source d’accomplissement et de félicité que d’atteindre le but lui-même. Aussi, chaque jour où Yaakov travaillait dans le but d’épouser Ra’hel était en soi un des rouages du futur. Ces jours étaient donc gratifiants et épanouissants parce qu’ils construisaient un conduit pour le plan Divin.
L’enseignement que nous pouvons tirer de ce qui précède est double.
Tout d’abord, pour que tout ce que nous entreprenons soit gratifiant, cela doit être en relation étroite avec un dessein supérieur. Cela doit contribuer à l’amélioration de notre personne et du monde autour de nous. En d’autres termes, cela doit tourner autour d’une Mitsva.
Par ailleurs, quand nous sommes engagés dans les étapes préparatoires d’une Mitsva, notre joie et notre enthousiasme ne doivent pas être moindres que lorsque nous accomplissons la Mitsva elle-même.
Demander la venue du Machia’h
A ce point, une question peut encore se soulever. Pourquoi demande-t-on avec tant d’insistance le Machia’h et la Rédemption et tout particulièrement au cours des dernières décades ? Du moment que nous sommes sur la route qui nous conduit à cette fin, nous accomplissons la Volonté de D.ieu et nous faisons partie du processus. Quelle différence cela fait-il si nous n’y sommes pas encore ? Chaque pas le long du chemin n’est-il pas inhérent au plan divin ?
En fait, il existe une différence fondamentale entre l’attente de Yaakov pour épouser Ra’hel et notre attente du Machia’h et de la Rédemption.
Yaakov savait, quant à lui, qu’il était destiné à élever la famille qui se dirigerait vers le Sinaï. Il savait que la réalisation de l’œuvre de sa vie n’aurait pas lieu de son vivant. Sa mission ne consistait pas en l’aboutissement final. Pour lui, il s’agissait de mettre en branle le processus. Il savait n’être que l’un des maillons dans la chaîne des événements. Il chérissait donc chaque moment, non parce qu’il savait que chaque moment le rapprochait de la fin mais parce que chaque pas possède une valeur et un sens intrinsèques. En bref, son rôle n’était pas d’achever le processus mais juste d’en faire partie.
Nous sommes au bout
En revanche, aujourd’hui, nous sommes au bout du processus. Toute la littérature biblique, talmudique, kabbalistique etc. souligne que nous sommes la dernière génération de l’exil et la première de la Rédemption ? Nous ne pouvons nous satisfaire de la conscience d’être un lien crucial de la chaîne. Notre génération a été investie d’une mission sans précédent, celle de compléter le processus.
Il est sûr, que chaque instant où nous sommes encore en exil doit être rempli de sens, de bien et donc chéri. Mais le but essentiel de nos actions devrait être de nous préparer à recevoir le Machia’h, à intérioriser la Rédemption, achevant ainsi le processus entamé par nos Patriarches et couronnant leurs efforts de succès.
Qu’est-ce qu’une maison juive ?
Une maison juive est différente d’une maison non-juive, non seulement le Chabbat et les jours de fête mais même les jours ordinaires de semaine.
On s’y conduit selon les lois de la Torah car la Torah est appelée Torat ‘Haïm, le guide de la vie. Les moindres détails de ses lois sont explicités dans le Choul’han Arou’h (Code de Lois juives).
On y ressent la Che’hina, la Présence de D.ieu, même en dehors de la prière ou de l’étude de la Torah, même dans les aspects les plus ordinaires comme boire et manger – selon le verset : « Connais-Le dans toutes tes voies » (Proverbes 3 : 6).
C’est une maison où les repas ne sont pas pris à la sauvette et juste pour satisfaire sa faim mais la table devient un « autel » sanctifié par le lavage rituel des mains, la récitation des bénédictions adéquates et, bien entendu, par le respect rigoureux des règles de la cacherout.
C’est une maison où le respect mutuel entre mari et femme est imprégné de l’observance méticuleuse des lois de la Pureté Familiale : grâce à ces lois, les enfants naissent dans une pureté et une sainteté qui leur permettront de lutter contre les tentations du monde. Ces lois sont aussi un facteur de base dans la préservation de Chalom Bayit, l’harmonie du couple.
(d’après une lettre du Rabbi - 18 éloul 1975)
Sa judaïté lui a sauvé la vie
Une grande enveloppe arriva sur le bureau de cet homme d’affaires au Bengladesh. Le nom de l’expéditeur lui était inconnu. Il ouvrit l’enveloppe et y trouva un livre appelé Tanya. Comme il ne savait pas lire l’hébreu et qu’il n’avait jamais entendu parler de ce livre, il se contenta de le ranger dans un tiroir et oublia son existence.
Ce Juif, Kévin (Akiva) était né en Angleterre et avait été envoyé diriger la succursale de son entreprise dans ce lointain pays asiatique, à majorité musulmane.
Quelques temps plus tard, Kevin se rendit à un congrès international en Allemagne : on y exposait des objets en rapport avec son travail. Chaque pays disposait de maisonnettes pour vanter ses marchandises. Quand Kevin aperçut un des stands réservés au Bengladesh, il fut surpris de voir qu’il était dirigé par un Juif d’apparence pratiquante, avec barbe et kippa. Kevin s’approcha et remarqua :
- Je pensais être le seul Juif dans ce pays…
- Je vous connais, le coupa son interlocuteur. Vous êtes Kevin Weit, originaire d’Angleterre. C’est moi qui vous ai fait parvenir un Tanya.
- Mais qui êtes-vous ? s’étonna Kevin.
- Je suis le directeur de ce stand.
Kevin connaissait cette société et savait que les propriétaires étaient musulmans. L’homme précisa qu’il était l’associé du directeur. Celui-ci apparut alors et l’homme barbu le héla :
- Savais-tu que cet homme est juif lui aussi ?
Kevin avait l’impression de vivre une scène complètement surréaliste. Cela faisait des années qu’il essayait de cacher son identité religieuse et voilà que cet homme en parlait sans complexes ! Qui sait combien de problèmes cette révélation allait lui causer dans un pays musulman ?
Les deux hommes devinrent de bons amis. Le barbu était Loubavitch et s’appelait Max Cohen. Depuis de longues années, il traitait des affaires dans ce pays et avait même une fois rempli une mission incroyable pour le Rabbi de Loubavitch.
Plusieurs mois passèrent. Un matin, Kevin entra dans son bureau et comprit que la situation avait changé. La compagnie pour laquelle il travaillait avait fait faillite mais les dirigeants ne l’en avaient pas informé – ce qui aurait pu lui permettre de sortir à temps du pays. En effet, les nombreux ouvriers n’avaient pas été payés et s’étaient maintenant engouffrés dans les luxueux bureaux : ils décidèrent de prendre Kevin comme otage jusqu’à ce qu’ils reçoivent leurs salaires. Hébété, Kevin comprenait que ses proches collaborateurs en qui il avait toute confiance le traitaient maintenant de haut et qu’ils se serviraient de lui comme monnaie d’échange – au risque de le voir perdre la vie. L’heure était grave : les entreprises avec lesquelles il traitait s’apercevraient de la faillite et émettraient un avis pour l’empêcher de sortir du pays. Le processus d’indemnisation risquait de durer des mois, sinon des années et, durant tout ce temps, il ne pourrait pas s’enfuir. De plus, sa tête était certainement mise à prix par la mafia locale et tout pouvait arriver. Les indemnités réclamées par les ouvriers étaient énormes mais, en contactant quelques amis et quelques banquiers, Kevin pourrait peut-être réunir la somme. Malheureusement ses efforts furent vains.
Kevin se souvint alors de l’associé musulman de Max Cohen et décida de lui téléphoner – bien qu’il ne le connaisse que très vaguement
- Je vous envoie immédiatement tout l’argent dont vous avez besoin, promit cet homme. Mon chauffeur va vous aider à parvenir chez vous pour prendre vos affaires et vous amènera à l’aéroport. Il vous aidera à monter dans le premier avion qui quittera le pays !
Cette aventure s’avéra très périlleuse et risquée. L’ami musulman dut investir du temps, de l’argent et beaucoup d’efforts pour satisfaire les exigences des ouvriers, obtenir un billet d’avion et exfiltrer Kevin du Bengladesh. Pourtant, il ne le connaissait pratiquement pas et n’avait aucune assurance que celui qui n’était après tout qu’un employé d’une entreprise en faillite pourrait un jour le rembourser.
- J’ai sauvé ton ami juif, annonça l’associé à Max Cohen.
Auparavant, Kevin n’avait pas apprécié que Max Cohen informe ainsi d’autres gens du fait qu’il était juif mais finalement, c’était justement cela qui lui avait valu la vie sauve.
« Le Rabbi de Loubavitch avait demandé qu’on imprime le Tanya en tout pays où vivent des Juifs, expliqua par la suite Max Cohen. Après chaque nouvelle impression de ce livre, les Juifs locaux se rassemblent autour de l’imprimerie ambulante et étudient quelques lignes de cet ouvrage fondamental de la ‘Hassidout dans les nouveaux exemplaires. Quand j’ai fait imprimer le Tanya au Bengladesh, je n’ai pas eu le temps de trouver des Juifs sur place. J’avais entendu parler de Kevin et je lui ai donc envoyé un livre de Tanya qu’il a gardé dans son bureau sans trop savoir de quoi il s’agissait mais c’est bien le Tanya qui lui a sauvé la vie.
Actuellement, Kevin s’est installé à Shanghai et s’occupe du Beth Habad local. C’est lui-même qui a raconté son histoire lors d’une fête organisée sur place.
Rav Chalom Greenberg – Shanghai – Si’hat Hachavoua 1913
Traduit par Feiga Lubecki