Samedi, 17 août 2024

  • Vaet’hanan

 

 

Vivre avec la Paracha

 Vaét’hanane

Moché dit aux Enfants d’Israël que D.ieu ne lui a pas permis d’entrer en Terre Sainte et qu’il ne pourra la contempler que du haut d’une montagne. Il poursuit la répétition de la Torah, évoquant les événements sans précédent qui se sont produits depuis la sortie d’Égypte. Il prédit que des générations futures se détourneront de D.ieu, pratiqueront l’idolâtrie, perdues parmi les nations, mais qu’elles reviendront à D.ieu et Ses commandements.

La Paracha inclut les Dix Commandements, le Chema Israël, les Mitsvot de l’amour du prochain, de l’étude de la Torah, des Tefilines et des Mezouzot.

 

Joindre idéalisme et réalisme

Il existe deux sortes d’individus : les idéalistes et les réalistes. Les idéalistes rêvent d’un monde où règnent la justice sociale, l’harmonie entre le corps et l’âme, le respect de l’environnement et une vie imprégnée d’une conscience supérieure.

Les réalistes, quant à eux, s’investissent dans des objectifs concrets et pragmatiques comme la sécurité matérielle, la gestion du temps et le respect d’un rythme de vie sain.

Pour être un véritable idéaliste, il ne faut pas tenir compte des obstacles que l’on peut rencontrer dans la réalisation de ses rêves. L’idéalisme pur suit les exigences de la vérité seule et ne se plie pas aux contraintes environnementales ou sociales.

Mais par contre, sans réflexion réaliste, les rêves risquent de rester dans le monde de l’imaginaire, jamais expérimentés, jamais réalisés dans le vrai monde et n’apportant aucune aide à quiconque.

En 1940, quand le sixième Rabbi de Loubavitch, Rabbi Yossef Its’hak Schneersohn était sur le bateau quittant l’Europe déchirée par la guerre pour les Etats-Unis, il convoqua l’un de ses secrétaires, le Rav Hodakov, et lui demanda de prendre un papier et un crayon. Le Rabbi dicterait et lui écrirait. Le Rabbi se mit alors à mettre en forme le plan d’actions destiné à épanouir le judaïsme en Amérique. Il développa la manière dont il créerait, dès son arrivée dans le nouveau pays, trois institutions : une maison d’édition, une institution éducative pour les enfants et une autre pour les adultes. Et il en détailla tous les aspects.

Après avoir dicté son plan, le Rabbi déclara : « Peut-être pensez-vous que je devrais attendre d’être arrivé en Amérique pour formuler mon plan. Je pourrais alors évaluer les besoins de la communauté américaine et y adapter mes projets. Non ! Je serais alors influencé par ce que je vois et ma vision pour l’Amérique serait altérée. Je veux un judaïsme européen et non un judaïsme américain (avec des compromis) ! »

Le travail de notre vie consiste à intégrer nos idéaux les plus élevés au cadre de vie le plus concret, affirment les Cabalistes. Et cette fusion nécessite de l’intégrité et beaucoup de travail créatif.

Que sera le monde à l’ère messianique ? Les Cabalistes le caractérisent très simplement : la fusion des plus beaux idéaux pour l’humanité avec un style de vie concret ; une âme qui s’exprime pleinement et qui vit confortablement dans un corps physique.

D.ieu ne laissa pas Moché entrer en Terre d’Israël. Il pria, supplia D.ieu de lui pardonner et de lui permettre d’y pénétrer. D.ieu avait pardonné au Peuple juif quand Moché avait plaidé pour lui, mais quand il s’agit de l’erreur de Moché, D.ieu ne céda pas.

D.ieu ne voulait pas de lui en Israël, péché ou pas. Le péché semble avoir été un prétexte bien utile. Au bout du compte, il n’y entrerait pas.

Cela est difficile à admettre dans la mesure où Moché n’avait jamais voulu de cette mission et que malgré tout, et durant quarante années, il fut un dirigeant dévoué. Et maintenant que le voyage atteignait son ultime destination et que le peuple allait enfin s’installer sur une terre qui était la sienne, Moché était exclu !

Le Talmud compare Moché à la lumière du soleil et Yehochoua à la lumière de la lune. L’intensité des rayons du soleil est telle que lorsqu’il brille, tout est illuminé. La lumière de la lune est plus subtile. Quand elle brille, le ciel reste noir, la nuit conserve son sombre mystère.

La puissance de Moché était telle que s’il avait conduit les Juifs en Israël, les choses auraient été simples. Ils auraient conquis la terre sans difficultés. Si Moché avait construit le Temple, sa sainteté aurait été telle qu’il n’aurait jamais été détruit.

Cela paraît extraordinaire !

Mais D.ieu ne voulait pas que les choses soient si simples. Certes Moché était dynamique et pouvait éclipser l’obscurité mais alors, les Juifs auraient été passifs et l’auraient laissé travailler pour eux. Pour prendre possession de la terre, ils devaient s’impliquer activement.

Yehochoua représentait le candidat idéal. C’était un dirigeant fort, mais pas assez pour bannir complètement l’obscurité. Lui et le peuple agiraient de concert pour surmonter les nombreux obstacles qui allaient se présenter et pour finalement s’installer sur la Terre.

Le peuple avait une vision, un rêve : s’installer sur la Terre Promise. Concrètement, ce rêve était très difficile à réaliser. D’autres peuples vivaient dans ce pays. Il serait difficile de s’autogouverner, de s’entendre. Moché, à leur tête, aurait aplani ces difficultés. Mais D.ieu ne voulait pas qu’ils échappent au sain processus de planter les graines de la vision dans le sol brut de la réalité. Et cela, ils ne pouvaient le faire que sans Moché.

Comme pour souligner combien est sacrée cette fusion avec la vraie vie, Moché répète, dans le cinquième livre de Devarim, les Dix Commandements. Cependant, dans sa version, l’expérience sinaïtique semble bien différente. Dans le récit initial du livre de Chemot, la Torah décrit le Sinaï, rempli de fumée au moment où D.ieu descend sur la montagne, dans le feu. La nation tout entière tremble. Le tonnerre et les éclairs précèdent la voix de D.ieu. Après avoir entendu D.ieu leur parler directement, le peuple supplie Moché de transmettre les Paroles de D.ieu, parce qu’à chacune de Ses Paroles, ils succombent.

Ici, dans cette seconde version, Moché ne mentionne qu’à peine tout cet apparat. Ce qu’il décrit est l’effet de l’expérience du Sinaï sur le peuple. « Il vous fut montré que l’Eternel est votre D.ieu… Sur la terre, D.ieu montra Son grand feu et Ses paroles vous entendirent… Face à face, D.ieu vous parla… »

Les Dix Commandements de Chemot sont à propos de D.ieu. Quand ils sont répétés dans Vaét’hanane (Devarim), ils évoquent l’impact qu’ils eurent ici-bas.

Ces deux versions s’unissent pour faire fusionner l’idéalisme spirituel de la Torah et la réalité de la vie.

La fusion réussie constitue ce que nos Sages appellent : « la Torah de Machia’h ».