Ils étaient tous deux prisonniers dans un camp soviétique en Sibérie. Quel avait donc été leur « crime » ? Ils avaient tout simplement voulu continuer à vivre leur judaïsme même sous le régime communiste.

Un Chabbat, le commandant du camp convoqua Guedalia Moché dans son bureau :

- Voici trois papiers pour te rendre la liberté. Si tu les signes, tu seras libre et pourras rentrer chez toi.

- Mais c’est Chabbat ! rétorqua Guedalia Moché. Je ne peux pas et je ne veux pas signer Chabbat !

- Si tu ne signes pas, hurla le commandant (qui savait très bien que Guedalia Moché ne serait pas prêt à signer le jour du Chabbat), tu resteras ici encore huit ans ! Tu entends ?

- Peu importe ! Je n’écrirai pas le jour du Chabbat !

- Si c’est ainsi, susurra le commandant, tu resteras en prison encore huit ans et on verra bien comment ton D.ieu t’en fera sortir !

- Si mon D.ieu veut m’aider, Il le fera sans votre aide, camarade Commandant. Et s’Il veut que je reste dans cette prison encore huit ans, j’y resterai même si vous voulez me laisser partir ! répliqua calmement Guedalia Moché. Ce n’est pas vous qui décidez !

Enragé, le commandant sortit son pistolet de sa ceinture, le pointa sur le cœur de ce prisonnier entêté et éructa :

- On verra bien qui va t’aider maintenant…

C’est justement à ce moment que sa fille entra dans le bureau. Elle vit son père pointer son arme vers Guedalia Moché et, d’un ton ennuyé, remarqua :

- Papa ! C’est dommage de gâcher une balle…

Lentement, le commandant baissa son pistolet :

- Ne t’imagine pas que c’est ton D.ieu qui t’a sauvé, siffla-t-il entre ses dents. Si ce n’était pour ma fille, tu ne serais plus qu’un tas de viande par terre maintenant…

Il se tourna vers son aide de camp et ordonna :

- Fais entrer l’autre Juif qui nous donne du fil à retordre, ce ‘Haïm Chaoul…

Quelques instants plus tard, ‘Haïm Chaoul entra et le commandant lui proposa le même marché qu’à Guedalia Moché :

- Signe ces papiers et tu pourras sortir d’ici !

- Pas question ! C’est Chabbat aujourd’hui et je ne signerai aucun papier !

- Alors tu resteras ici encore huit ans ! tonna le commandant.

- Tant pis, je ne transgresserai pas le Chabbat !

Soudain Guedalia Moché qui s’était tenu à l’écart pendant cette confrontation s’approcha et, à la surprise générale, demanda :

- Donnez-moi ses papiers, je signerai pour lui !

Le commandant était stupéfait :

- Comment ? Je ne vous comprendrai jamais, vous les Juifs ! Tu viens d’affirmer que tu ne signeras pas le jour de Chabbat ! Bien que tu saches qu’à cause de cela, tu resteras encore huit ans en Sibérie… Et maintenant tu veux signer pour lui ?

- Bien sûr, je ne signerai pas pour ma propre liberté, affirma Guedalia Moché. Mais ma situation est différente. Je suis plus vigoureux que lui et je peux supporter les conditions de l’emprisonnement en Sibérie. Mais mon ami, c’est différent : ‘Haïm Chaoul est plus faible que moi et lui ne pourra pas survivre un instant de plus ici. A plus forte raison huit années supplémentaires ! Donnez-moi les papiers, je signerai pour lui (selon le principe qu'il est permis de transgresser le Chabbat pour sauver la vie d'un autre juif) !

Quelques jours plus tard, la Providence divine fit en sorte que les deux amis étaient libérés…

Car, après tout, ce n’était pas le commandant qui pouvait décider de tout mais bien Celui qui avait donné le Chabbat à Son peuple…

Par la suite, Guedalia Moché Goldman devint le Grand Rabbin de la ville de Zvhil tandis que ‘Haïm Chaoul Bruk devint Machpia (conseiller spirituel) à la Yechiva de Kfar ‘Habad.

Chaya Sarah Silberberg - chabad.org

Traduite par Feiga Lubecki

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