(Le 18 Elloul est l’anniversaire de la mort du Maharal de Prague et de la naissance de Rabbi Israël Baal Chem Tov et de Rabbi Chnéour Zalman de Lyadi).
De son vrai nom, il s’appelait Chnéour Zalman Rubashov et était issu d’une famille ‘hassidique. (Par la suite, il contracta les initiales de ses prénoms et nom et se fit appeler Zalman Shazar). A l’âge de 21 ans, en Tamouz 1911, avant de partir pour Eretz Israël, il se rendit dans la ville de Mir pour prendre congé de son grand-père. Celui-ci, Rav Moché Ginsburg, avait été un ‘Hassid du Rabbi Tséma’h Tsédek et, entre autres qualités, était un spécialiste des mélodies ‘Habad.
«Qui donc était plus cher à mon cœur que ce grand-père dont la spiritualité illuminait le large front… ? Depuis ma plus tendre enfance, il m’avait impressionné : ses enseignements pénétraient mes entrailles et ses chants remplissaient notre maison. Le feu de son enthousiasme ne me quitta pas à toutes les étapes de ma vie, durant toutes mes aventures…»
«Mon grand-père m’offrit encore un autre cadeau avant mon départ. Un cadeau inestimable. Il me le confia durant les derniers instants vraiment, avant que le charriot ne démarre.
Durant toute cette journée de Chabbat et la soirée qui suivit, je ne l’avais pas quitté. Nous avions passé la majeure partie de ce temps à échanger des paroles de Torah. Tous deux, nous étions heureux car je pouvais encore soutenir une conversation sur ces sujets, plus en écoutant qu’en parlant. Il évoquait des sujets de Niglé (Torah dévoilée) mais surtout il abondait dans les sujets de ‘Hassidout ; il parlait avec les fidèles de sa synagogue, avec les étudiants de Yechiva qui aimaient se retrouver dans sa maison et il chantait devant son Créateur : quoi qu’il en soit, je ressentais avec une certitude absolue que tout cela m’était destiné. Il tenait à ce que je m’en imprègne complètement, que ceci pénètre dans mon cœur. Et, effectivement, mon cœur s’ouvrait à tout cela «comme l’ouverture d’un palais», selon l’expression talmudique.
Le dimanche matin, le cocher vint me chercher avec ma valise. Mon grand-père avait revêtu son manteau d’été (la chaleur du mois de Tamouz régnait déjà tôt le matin). Il ouvrit la porte pour m’accompagner à pied jusqu’à la sortie du village. En route, alors que nous marchions, il me parla à peu près ainsi :
- Mon fils, tu connais bien la mélodie de Rabbi Chnéour Zalman. Je vais te raconter ce que j’ai entendu un soir d’hiver de la bouche des anciens ‘Hassidim, dans la maison du Rabbi, à propos de la qualité exceptionnelle de cette mélodie.
Parfois l’homme veut se souvenir d’une mélodie qu’il pensait connaître parfaitement. Mais l’air lui échappe et il ne parvient pas à s’en souvenir malgré tous ses efforts. Parfois, une certaine mélodie le poursuit, il n’arrête pas de la chantonner, dans son esprit ou quand il n’en a vraiment pas besoin et que cela le dérange même. Dans ces deux cas, cela prouve que cette mélodie en elle-même, malgré ses qualités éventuelles, n’est pas enracinée dans son cœur : il est à part et la mélodie est à part.
Mais il arrive que la mélodie réponde à l’homme chaque fois qu’il l’appelle et il est heureux chaque fois qu’il la chante : cela prouve que la mélodie lui appartient et que la racine de son âme provient de la même source dont est issue cette mélodie.
Sache maintenant, ajouta mon grand-père, que nous avons la certitude que la mélodie de Rabbi Chnéour Zalman fait partie de l’âme de chaque ‘Hassid ‘Habad, de ses descendants et des descendants de ses descendants jusqu’à la fin des générations. Chaque ‘Hassid et chaque fils de ‘Hassid qui marche droit et qui veut se souvenir de cette mélodie mais elle lui échappe bien qu’il la recherche de toutes les fibres de son être, c’est un signe qu’à ce moment-là précisément, il se trompe dans la voie qu’il a choisie : il doit donc rechercher dans ses actions et ses pensées et retourner sincèrement à D.ieu.
Ce n’est pas pour rien, mon fils, que cette mélodie est oubliée du cœur. C’est pour nous un cadeau et un critère. Souviens-toi de cela, mon fils !».
De nombreux jours se sont écoulés depuis, j’ai vécu de nombreuses épreuves mais la silhouette de mon grand-père, en ce début de journée de Tamouz, sur la route… C’est une personnalité qui éclaire mon cœur tant qu’il pourra battre…
Et ce merveilleux cadeau m’accompagne encore jusqu’à aujourd’hui. Chaque fois, chaque fois que je dus prendre des décisions cruciales, chaque fois que j’hésitais et que je voulais tout à coup retrouver la mélodie de Rabbi Chnéour Zalman, cet air majestueux remontait dans ma mémoire et mes hésitations disparaissaient ; je ressentais une certitude intérieure qui m’indiquait le bon choix. Cela me redonnait des forces et une paix intérieure infinie».
Le journaliste Chimone Piness racontait que, quand il rencontra Zalman Shazar pour la première fois en 1935 et qu’il travaillait dans le journal «Histadrout», il entendait M. Shazar qui chantonnait une certaine mélodie ‘hassidique…
Quand Zalman Shazar se rendit auprès du Rabbi à New York à Pessa’h en 1954, le Rabbi demanda à ses ‘Hassidim de chanter cette mélodie. Rav Binyamine Althaus raconte que, durant tout le temps de ce chant, on voyait que M. Shazar se trouvait dans «des mondes supérieurs»…
Et quand le Président Shazar (car, entretemps, M. Shazar était devenu président de l’Etat d’Israël) se rendit chez le Rabbi à Pourim en 1960, voici ce que rapporte le secrétaire du Rabbi, Reb Leibl Groner : «Quand on commença le chant des ‘Quatre Mouvements’ de Rabbi Chnéour Zalman, on remarqua un changement complet dans l’attitude de M. Shazar. Il laissa tomber sa canne, se redressa, arrangea les boutons de son manteau, ferma les yeux et se mit à se balancer avec une véritable ferveur ‘hassidique… ».
Reb Lev Leibman – Nigoun Arba Babot
Traduit par Feiga Lubecki
Le Chant des 4 Bavot
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- Publication : 26 juillet 2017