Le verset Noa'h 9, 23 dit que : «Chem Et Yephet(1) prirent le vêtement, le placèrent sur leurs deux épaules, marchèrent à reculons et couvrirent la nudité de leur père. Leur visage était tourné vers l'arrière et ils ne virent pas la nudité de leur père».
Les valeurs fondamentales de la moralité, comme le respect de son prochain et la pudeur, sont enseignées ici, dans la Torah, par l'intermédiaire des fils de Noa'h. Ainsi, Noa'h plante une vigne(2), il boit son vin et il s'enivre(3). Il se découvre alors et il gît, ivre, dans sa tente. Son fils 'Ham est témoin de ce qui se passe. Il court à l'extérieur de la tente et il en fait part à ses deux frères, Chem et Yephet(4).
Chem et Yephet sont soucieux de la dignité de leur père et ils veulent éviter son humiliation. Ils pénètrent donc dans la tente, à reculons(5) et ils placent une couverture sur leur père ivre, en prenant bien soin de ne pas observer sa déchéance(6).
En revanche, pourquoi le verset ajoute-t-il ces mots, en apparence superflus : «ils ne virent pas la nudité de leur père». N'était-il pas bien clair que Chem et Yephet n'avaient pas vu la nudité de leur père(7) ? C'est précisément pour cette raison que leur regard était dirigé dans le sens opposé. Ils voulaient couvrir sa nudité et lui éviter l'humiliation.
En fait, la signification de cette expression est la suivante. Chem et Yephet ne se contentèrent pas de ne pas regarder la nudité de leur père, physiquement, de tourner le regard vers l'arrière pour ne pas voir sa honte. Leur geste avait, en outre, une portée morale, beaucoup plus profonde(8). En fait, les fils de Noa'h : «ne virent pas la nudité de leur père», pas du tout(9).
Chem et Yephet n'observèrent même pas le triste état dans lequel leur père se trouvait. Ils ne virent pas son mauvais comportement. Ils adoptèrent une attitude positive, face à l'événement et ils s'employèrent à arranger la situation. Mais, avant tout, ils ne virent pas le mal, ils ne s'y intéressèrent pas(10).
Ce passage de la Torah enseigne ainsi de quelle manière il faut considérer le mal, le défaut, la faute de son prochain(11). Il n'y a pas lieu de se concentrer sur les aspects négatifs de la personnalité de l'autre, sur ses défauts. Il faut, bien au contraire, réparer, s'efforcer d'exercer une influence positive, d'améliorer, mais en aucune façon de voir le mal, de l'observer, d'une façon spécifique(12).
(Discours du Rabbi, Likoutei Si'hot, tome 10, page 24)
Notes :
(1) Deux des trois fils de Noa'h.
(2) Tout de suite après le déluge.
(3) Faisant ainsi la preuve de son comportement peu responsable, alors qu'il aurait dû, en premier lieu, faire des sacrifices pour rendre grâce au Saint béni soit-Il de lui avoir conservé la vie, avec les membres de sa famille.
(4) En revanche, il ne prend lui-même aucune initiative, car le respect de son père n'est pas sa préoccupation majeure.
(5) Pour ne pas être les témoins de sa dégradation.
(6) Le sens des versets, jusqu'à ce point est donc bien clair.
(7) Ce qui était, précisément, toute leur préoccupation.
(8) A laquelle cette expression fait allusion.
(9) Comme si elle n'existait pas, comme si Noa'h était couvert.
(10) Et, leur attitude est, en l'occurrence, un enseignement pour chacun.
(11) Il faut l'ignorer, en faire abstraction, comme si, réellement, il n'existait pas, être capable de ne pas le voir.
(12) Ainsi, précisément parce que l'on ne voit pas le mal de l'autre, on peut faire en sorte qu'il s'estompe, puis qu'il disparaisse totalement.
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- Publication : 5 octobre 2018