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Parmi tous les concepts évoqués dans la Paracha de cette semaine, relevons les commandements de donner la dîme et de la charité.
Interprétant l’un des versets de la Sidra, nos Sages commentent : «Donnez la dîme pour devenir riches». Le mot bichvil, que l’on traduit ici par «pour» ou «en vue de», peut aussi signifier : «par la voie». En donnant un dixième de ses possessions, la dîme, l’homme crée la voie qui permettra aux bénédictions divines de l’inonder. Manifester de la générosité à l’égard d’autrui est un moyen adéquat pour attirer sur soi la générosité et la bénédiction divines.
Les Sages nous éclairent sur le sens de cette approche en expliquant le verset : «Donne- lui et ne le ressent pas mal dans ton cœur », qui signifie que l’on ne doit pas mal ressentir le fait de donner la charité car ce que l’on donne est tout simplement ce que D.ieu nous a donné.
Rien ne nous est dû. Tout ce que nous possédons est un cadeau, généreusement attribué d’En Haut. Si l’on pousse l’idée plus loin, l’on peut affirmer que dans ce que D.ieu nous attribue est également inclus ce qui doit être remis à autrui. Il nous donne pour qu’à notre tour nous donnions aux moins fortunés.
Quand D.ieu observe que l’homme est généreux avec l’argent qui lui a été confié pour les autres et le redistribue sans arrière-pensée, Il augmente le quota réservé au donateur, lui donnant l’occasion d’ajouter encore aux dons destinés aux pauvres.
En fait, le verset cité plus haut peut être ainsi interprété : «Ne donne pas parce que tu te sens mal pour l’autre». Car il ne faut pas donner seulement parce que l’on est ému devant les besoins de l’autre. Mais nous devons prendre conscience que c’est là la raison pour laquelle nous ont, d’emblée, été attribués le succès et la richesse : pour que nous puissions les partager et répartir la bonté dont nous avons été gratifiés par D.ieu.
Le fait de mettre l’emphase sur l’appréciation intellectuelle de la nécessité de donner ajoute une dimension supplémentaire à l’idée que donner la dîme conduit à la richesse. Nos Sages enseignent : «Qui est riche ? Celui qui est heureux de son sort». Souvent, l’on voit des gens qui ont obtenu le succès mais non la tranquillité de l’esprit pour en jouir. Ils sont sans cesse en alerte, ressentant inévitablement le besoin de gagner et d’accumuler encore davantage de fortune.
Le donateur sort de cette spirale. Quand il regarde autour de lui et s’engage à apporter de l’aide à ceux qui en ont besoin, la perspective de son monde change. Au lieu de n’être tourné que vers lui-même, son horizon s’élargit. Il gagne alors un point de vue radicalement différent sur ce qu’il possède effectivement. Il est capable de prendre du recul et d’apprécier les bénédictions dont il fait l’objet. Et c’est là la véritable fortune.
Cette richesse doit également être partagée avec les pauvres. Peut-être que l’affliction la plus difficile à supporter dans l’indigence est celle des limites émotionnelles et psychologiques qu’elle suscite. A quelque niveau que ce soit, un donateur doit également s’efforcer d’aider celui qu’il épaule dans ces domaines, lui permettant de se projeter au-delà de sa pauvreté et d’apprécier la bonté divine.
La leçon
La Paracha de cette semaine comporte également le commandement de construire un Temple à Jérusalem. Elle décrit les pratiques d’offrandes païennes dans de nombreux lieux et explique que ce n’est pas ainsi que les Juifs doivent servir D.ieu. Ils doivent Lui construire un Temple où ils lui offriront des sacrifices.
Les commentateurs proposent deux explications pour ce commandement.
Tout d’abord, les Juifs ont un lieu de culte central.
D’autre part, D.ieu a une Résidence dans ce monde, un lieu où Sa présence se révèle et est manifeste.
Ces deux raisons sont significatives. L’un des principes fondamentaux du judaïsme consiste en ce que notre relation avec D.ieu s’exprime en tant que peuple qui partage une identité commune et pas simplement un groupe d’individus. Il est vrai que le service divin de chaque individu est important mais D.ieu considère également le peuple comme une entité. C’est pour souligner cette idée que les sacrifices devaient être offerts dans un lieu unique.
Mais par-dessus et au-delà du service du Peuple Juif, le Temple existe comme (pour citer la Paracha) : «l’endroit que D.ieu a choisi pour y faire reposer Son nom». C’est là le but fondamental du Temple : qu’il existe un endroit où la Présence de D.ieu est perceptible et visible.
L’absence d’un tel lieu constitue la véritable épreuve de l’exil et la motivation pour notre attente de la venue de Machia’h.