Semaine 10

  • Pekoudeï
Editorial
Si le congrès m’était conté

Et si ces hommes et ces femmes qui, depuis des années et jour après jour, changent le visage de la communauté juive d’Ile-de-France, se réunissaient? Et si, de cette réunion, ils faisaient un congrès ? Et si, de ce congrès, germaient des résolutions que chacun concrétisera ? Quel peut bien être ce congrès qui ne se contente pas de ces généreuses déclarations d’intention destinées à rester ce qu’elles sont, des déclarations, mais s’engage dans l’action? C’est celui des délégués du Beth Loubavitch. Il avait lieu la semaine dernière.
Rendre compte de tous les échanges auxquels il donna lieu serait sans doute, dans un tel cadre une entreprise vaine. Trop riches et nombreux, ils dépassent la portée d’un éditorial. Peut-être est-ce plutôt une atmosphère particulière qu’il convient de traduire autant qu’il est possible de décrire ce qui est, par nature, largement indescriptible. Cent couples sont là, réunis, autour des tables d’un banquet. C’est presque une fête de famille mais elle dépasse la célébration. Un commentaire du Rabbi ouvre la soirée. C’est un commentaire dit il y a vingt ans mais sur lequel les années ont passé sans laisser leur marque et il résonne comme des mots d’aujourd’hui: l’importance de 102. Cette année est, en effet, la 102ème depuis la naissance du Rabbi et ce nombre est hautement symbolique puisque c’est pendant 102 ans que les Rabbis successifs résidèrent dans la ville de Loubavitch. “Loubavitch”: un nom qui signifie “amour” et, en ces quelques mots, c’est tout un programme qui est décrit. L’amour de l’autre, l’utilisation d’une langue profane, c’est de volonté d’ouverture et de relation avec le monde qu’il s’agit. Ainsi est révélé un secret: le moteur de l’action est dans l’esprit qui anime ses acteurs.
Vient le tour des invités: Rav Slavatistsky d’Anvers et Rav Halpern, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Kfar Habad. C’est sur le ton du “avant-après” qu’ils entreprennent de décrire ce qu’ils ressentent. Qui aurait pensé que Paris deviendrait la ville où la lumière n’est pas seulement celle des réverbères de la capitale? Qui aurait imaginé que, en bord de Seine, le Hassidisme trouverait ses racines? A ces questions, les deux invités savent répondre: Le Rabbi a œuvré pour cela et cette pensée en action continue de conduire les délégués du Beth Loubavitch, acteurs du changement.
S’il fallait définir ce congrès en une phrase, c’est d’une gigantesque source d’énergie qu’il faudrait parler, qui renverse les derniers obstacles et ouvre le chemin qui nous conduit vers la venue de Machia’h.
Etincelles de Machiah
Pourquoi vouloir la Délivrance ?

L’homme doit attendre la venue de Machia’h car alors sera accomplie la volonté de D.ieu dans la création de l’univers. A ce moment, en effet, sera réalisée Sa “demeure ici-bas”. En d’autres termes, ce n’est pas du fait de ses préoccupations personnelles, pour parvenir à une prospérité matérielle ou même spirituelle plus grande, que l’homme doit désirer la Délivrance.
C’est là le sens de la nécessité de “ne pas y penser” que les Sages relèvent comme indispensable pour l’avènement de ce nouveau temps: il faut retirer sa pensée de tout ce qui touche à soi-même, matériellement ou spirituellement, et ne désirer la venue de Machia’h que parce qu’ainsi se réalisera la volonté Divine.
(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch – Chabbat Parchat Ekev 5713)
Vivre avec la Paracha
Pekoudeï

Après la Paracha de cette semaine, Pekoudeï, nous entrerons dans le quatrième livre de la Torah, Vayikra, et dans sa première Paracha qui porte le même nom. Or il existe un principe dans la Torah: lorsque deux Parachyot se suivent, elles possèdent une relation très importante qui les unit. Quel est donc le lien entre Pekoudeï et Vayikra qui la suivra?

Les derniers versets de Pekoudeï parlent de la nuée, “Anane”, qui reposait sur le Michkan (le Tabernacle). Le mot “Anane” évoque l'idée de quelque chose qui cache, empêchant Moïse de pénétrer dans le Ohel Moed, la tente d'Assignation: “Et Moïse ne put pénétrer”.

La Paracha suivante commence par les mots “Et l'Eternel appela Moïse”. Le mot “Vayikra”, “il appela”, évoque quant à lui la révélation. Ainsi une révélation suivit un voilement. Or, une révélation qui vient après que l'on se soit caché est, par nature, beaucoup plus intense.

Cette idée peut se traduire dans le travail spirituel de l'homme.

Il existe là aussi un service divin qui suit un voilement: il s'agit de la Techouvah, du retour à D.ieu: la Techouvah vient après que l'homme s'est éloigné de D.ieu, une manière de se cacher, et le mot Techouvah signifie littéralement un retour, une manière de se révéler.

Dans la Techouvah, comme dans la révélation qui suit le voilement, apparaît un double aspect du salut et au-delà, le plus haut degré de Techouvah où les “fautes volontaires deviennent des mérites” et où “l'obscurité est transformée en lumière”.

Cela est le véritable sens du principe selon lequel “où se tient un Baal Techouvah, un Juste parfait ne peut se tenir”. Les Tsadikim, les Justes ont de réels mérites. Cela inclut deux niveaux. A un premier stade se produit une descente des effusions divines par le moyen de l'accomplissement des préceptes positifs, qui représentent l'aspect de “fais le bien”.

A un second stade, cette descente s'accomplit par le biais des préceptes négatifs (l'observance des interdictions) mais il ne s'agit ici que de repousser le mal et non de le convertir en bien. C'est ainsi qu'au niveau d'un service divin exclusivement lié aux révélations et aux manifestations, il reste toutefois des restrictions. Le mal reste le mal et doit être repoussé. Par contre, la Techouvah touche le cœur même de l'âme et par-delà, elle atteint l'Essence Divine. Elle dépasse toutes les restrictions et les limites, les fautes volontaires elles-mêmes sont transformées en qualités.

C'est là ce que l'on atteint finalement après ce voilement. Il ne s'agit pas simplement de rejeter et de repousser ce qui cachait mais que “la nuit brille comme le jour”.

Ce principe offre une leçon à tout un chacun dans son service de D.ieu. Il ne faut jamais désespérer, à D.ieu ne plaise, quelle que soit sa situation. Au contraire, le voilement lui-même rend possible une révélation supérieure.

La même idée s'applique aux générations. Une question a été soulevée: il y a eu des générations bien plus méritantes qui ont précédé la nôtre et pourtant elles étaient plus éloignées de la Rédemption Messianique. Comment pouvons-nous comprendre que ce soit notre génération qui méritera la Rédemption ultime? Il est sûr que nous ne sommes pas meilleurs que les générations précédentes!

Justement, c’est ce que nous avons vu qui nous prouve que cette génération sera l'ultime et méritera la Délivrance.

Juste avant que l’aube ne pointe, le sommeil est plus profond. Il nous faut donc faire un effort tout particulier pour ne pas nous oublier dans ce sommeil et nous lever pour la lumière matinale jusqu'à ce que nous méritions de voir “la nuit briller comme le jour”.
Le Coin de la Halacha
Comment se comporte-t-on durant le repas (suite) ?

On ne commence pas à manger tant que le maître de maison ou la personne la plus importante n’a pas commencé.
Si on entre chez quelqu’un à l’improviste et qu’il est en train de manger, on ne s’installera pas pour manger avec lui, même s’il le propose, de peur qu’il soit gêné parce qu’il n’a pas préparé suffisamment.
Quand on entre dans une maison, on ne demande pas à manger, mais on attend que le maître (ou la maîtresse) de maison le propose.
Une femme ne boit ni vin ni liqueur sans la permission de son mari.
On ne mange pas le poisson et la viande ensemble à cause du danger et on évite de mélanger le poisson avec du lait ; on peut cependant manger le poisson avec le beurre, la crème ou le fromage. On a l’habitude de manger (du pain par exemple) et de boire entre le poisson et la viande.
Durant le repas, on ne touche pas les endroits couverts du corps et on ne se gratte pas la tête, sinon on se relave les mains rituellement mais sans bénédiction.
Après le repas, on évite de jeter les miettes de pain dans un endroit où les gens risquent de marcher dessus et donc de les mépriser.
On ne parle pas la bouche pleine, mais on peut parler entre deux bouchées.

F. L.
De Recit de la Semaine
Une bien étrange mission

L’aéroport international de Lod. Une fois que les voyageurs ont enregistré leurs bagages et passé les contrôles de sécurité, ils ont souvent du temps à perdre et aiment flâner autour du stand Loubavitch: là, depuis tôt le matin jusqu’à tard le soir, ils peuvent prendre un café, étudier, mettre les Téfilines, discuter avec les responsables, s’informer des horaires de Chabbat partout dans le monde, faire provision de brochures dans toutes les langues mais aussi d’adresses utiles de restaurants cachères, synagogues etc…
Rav Moché Marinovski et un autre Loubavitch étaient ce jour-là particulièrement occupés : les passagers faisaient la queue pour mettre les Téfilines juste avant de prendre l’avion. C’est justement à ce moment qu’apparut un homme âgé d’environ soixante-dix ans, avec toute l’apparence d’un Juif religieux: observant avec admiration l’agitation autour du stand, il s’approcha de Rav Moché et lui dit : “J’aimerais vous raconter une histoire que vous n’avez jamais entendue à propos du Rabbi”. Tout en continuant à aider les voyageurs à mettre les Téfilines, Rav Moché et son compagnon l’écoutèrent attentivement :
“J’étais encore un adolescent quand les Nazis envahirent la Pologne. Déporté avec tous les Juifs de la région, je suis passé par toutes les étapes de l’enfer et j’ai perdu presque toute ma famille. Ce n’est que grâce à des miracles constants que j’ai survécu. Après la guerre, je me suis retrouvé avec de nombreuses autres “personnes déplacées” dans un camp à Chypre. Là-bas, je me suis lié d’amitié avec d’autres jeunes qui avaient traversé les mêmes épreuves et nous avons décidé de toujours garder le contact entre nous. C’est effectivement ce qui s’est passé: je me suis installé dans la Palestine d’alors, un autre est parti aux Etats-Unis et un troisième au Brésil. Au début, nous nous écrivions souvent, nous téléphonions et j’eus même droit à quelques visites de leur part. Mais l’éloignement géographique eut vite raison de cette belle amitié et, au bout d’un certain temps, nous nous contentions d’une carte de bonne année avant les fêtes. Cela aurait pu durer ainsi si le Rabbi de Loubavitch n’en avait décidé autrement…
Durant l’hiver 1988, je partis en voyage d’affaires à New York. D.ieu avait décidé que je devais rester là-bas plus longtemps que prévu. Comme j’avais souvent eu le désir de voir le Rabbi de Loubavitch, j’en profitai pour me rendre au 770 Eastern Parkway un dimanche matin. Là je fis la queue, patiemment, jusqu’à ce que j’arrive devant le Rabbi qui accordait ses bénédictions à tous ceux qui passaient devant lui, tout en leur confiant un billet d’un dollar à remettre à la Tsédaka (charité). Le Rabbi m’accueillit avec un visage rayonnant et me dit avec un grand sourire, comme à tout le monde: “Bénédiction et Réussite”. Je signalai alors au Rabbi que je m’apprêtais à retourner la semaine suivante en Terre Sainte. Le Rabbi me tendit alors un dollar supplémentaire en me disant, à ma grande surprise: “A remettre à la Tsédaka… au Brésil !” Bien entendu, je voulus faire remarquer au Rabbi que je désirais retourner en Israël et non ailleurs mais déjà on m’avait fait avancer vers la sortie et je ne pouvais plus rien lui demander. Je me retrouvai à l’extérieur, stupéfait, persuadé que j’avais mal compris. Mais en réfléchissant bien, je réalisai que certainement, il n’y avait pas d’erreur car j’avais entendu tant d’histoires sur le Rabbi que, malgré mes doutes, je devais me conformer à ses paroles. J’appelai mon agence de voyages, annulai mon vol direct vers Israël et pris un billet avec une escale au Brésil.
Quand l’avion se posa au Brésil, je ne pus m’empêcher de m’inquiéter: “Que suis-je supposé faire dans ce pays où je ne connais personne ?”. C’est alors que je me souvins de mon ami “d’enfance”: dès que je récupérai mes valises, je téléphonai en Israël pour obtenir les coordonnées de mon ami que j’appelai bien sûr immédiatement. Celui-ci fut très heureux de m’accueillir même à l’improviste et après les premiers instants d’émotion, nous avons pris des nouvelles l’un de l’autre. Il ne me fallut pas longtemps pour comprendre qu’il était très soucieux: je l’avais connu plus jeune, doué d’un humour à toute épreuve, mais, là je lui demandai quel était son problème. Il ne put retenir ses larmes: son fils unique, la prunelle de ses yeux, s’était éloigné de la voie de la Torah, petit à petit et en était arrivé au point de vouloir se marier avec une non-Juive !
Mon ami ne trouvait plus le sommeil, il n’arrêtait pas de prier silencieusement le Maître du monde pour que son fils ne franchise pas cette ligne rouge. Mais rien n’y faisait et il ajouta: “Pourquoi ai-je tant résisté dans les camps, pourquoi ai-je supporté tant de souffrances si, à la fin, l’enfant qui dira le “Kaddich” pour moi ne me donne pas des petits-enfants juifs ?”
Accablé par sa douleur, je ne savais que dire. Puis, pour changer un peu l’atmosphère, je lui racontai comment j’avais décidé, après la bénédiction du Rabbi, de me rendre tout à coup au Brésil. C’est alors que moi-même je réalisai: “Je sais maintenant pourquoi le Rabbi m’a envoyé ici !”
Je demandai à mon ami l’adresse de son fils et me rendis chez lui. Au début, il me reçut avec froideur mais, quand je lui racontai que le Rabbi m’avait envoyé en mission, il accepta de m’écouter. Petit à petit, il s’intéressa à ce que je disais: je lui racontai dans quelles circonstances j’avais connu son père, combien nous avions souffert ensemble du fait d’être Juifs, combien son père avait été heureux au moment de sa naissance et combien il était malheureux maintenant. Je lui expliquai pourquoi un mariage mixte représentait l’antithèse de toutes les valeurs pour lesquelles son père avait fourni tant d’efforts. Je lui rappelai que le peuple juif est seul parmi les nations et que cette situation est un fait que rien ne pourra changer.
Il m’écoutait maintenant attentivement et nous avons parlé toute la nuit.
Le lendemain, il insista pour m’amener lui-même à l’aéroport. Il m’embrassa affectueusement et chuchota à mon oreille qu’il avait bien réfléchi et que, malgré les difficultés que cela impliquait, il avait décidé de ne plus se marier avec une non-Juive. Son père qui nous regardait de loin, comprit ce qui s’était passé et embrassa à son tour longuement son fils en pleurant mais cette fois-ci, de joie !
Je compris alors que la mission que m’avait confiée le Rabbi avait été pleinement accomplie… J’avais donné la Tsédaka au Brésil…

Arié Samit
traduit par Feiga Lubecki
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