Rambam 3 Chapitres

Notons que bon nombre de ces lois ne sont pas la halakha, c'est-à-dire la pratique observée dans les communautés juives. Elles ne sauraient donc en aucun cas être prises comme référence. Veuillez noter également que cette version est un premier essai qui fera l'objet de corrections ultérieures.

16 Nissan 5782 / 04.17.2022

Lois des prétentions : Chapitre Treize

1. Voici d’eux auxquels on ne laisse pas la possession d’un terrain, même s’ils ont joui [des fruits] pendant trois ans : les artisans, les métayers, les administrateurs [ce qui inclut aussi les tuteurs], les associés, un homme le terrain de son épouse, une femme le terrain de son mari, un homme le terrain de son père, et un homme le terrain de son fils, car ceux-ci ne prêtent pas attention [à la présence de l’autre]. C’est pourquoi, le fait qu’ils ont joui [des fruits] ne prouve pas [qu’ils sont propriétaires du terrain], même si le propriétaire n’a pas émis de protestation ; plutôt, le terrain est restitué à son propriétaire qui produit une preuve que ce terrain est connu lui appartenir, et il prête un serment d’incitation qu’il ne l’a pas vendu, et n’en a pas fait don, comme nous l’avons expliqué.

2. Et de même, les exilarques de l’époque, un brigand et un non juif, le fait qu’ils ont joui [des fruits d’un champ pendant trois ans] ne prouve pas [leur titre], parce qu’ils sont des gens de force. Et de même, un sourd-muet, un aliéné, et un mineur, le fait qu’ils ont joui [des fruits d’un champ pendant trois ans] ne prouve pas [leur titre], parce qu’ils n’ont pas de prétention [c'est-à-dire que leur prétention n’est pas prise en compte], pour que le terrain reste en leur possession, et il [le champ] est [donc] restitué à son propriétaire. Réciproquement, qui prend possession de leurs biens [de ces personnes], le fait qu’il a joui [des fruits] ne prouve pas [son titre].

3. Que signifie que l’on ne laisse pas le terrain en la possession [des dites personnes] ? [Prenons l’exemple suivant :] Réouven a joui [des fruits] du champ de Chimone pendant les années [suffisantes pour avoir une] présomption de propriété, et prétend avoir acheté [le terrain], et Chimone produit des témoins [qui attestent] qu’il est connu qu’il [ce terrain] lui appartient, et produit également des témoins [qui attestent] que Réouven était connu pour être son associé, son métayer, ou son administrateur, et [il prétend que] c’est pour cela qu’il n’a pas émis de protestation, le champ est restitué à Chimone, et il prête serment qu’il n’a pas vendu, ni fait don [de ce champ]. Et identique est la loi pour les autres [types de personnes précédemment évoquées]. Par contre, si Chimone n’apporte pas de preuve que Réouven était son associé ou son métayer, et il [Réouven] reconnaît [cela] de lui-même et dit : « Certes, il est mon associé, mais il m’a vendu [le champ] », étant donné qu’il a joui [des fruits] pendant les années [suffisantes pour avoir] une présomption de propriété, et qu’il aurait pu dire : « Il [Chimone] n’a jamais été mon associé » [puisqu’il n’y a pas de témoins du contraire], il est cru comme toute autre personne.

4. Les artisans [n’ont pas de présomption de propriété]. Quel est le cas ? Par exemple, ils construisent ou réparent [un bâtiment] durant de longues années. S’ils se démettent de leur fonction, et jouissent ensuite [des fruits d’un terrain] pendant trois ans, ils ont une présomption de propriété.

5. [Nous avons également cité] les métayers. Quel est le cas ? Par exemple, il [un homme] était le métayer du père du propriétaire du champ, ou de sa famille. [La raison pour laquelle il n’a pas de présomption de propriété s’il a joui de tous les fruits du champ est que] puisqu’il était métayer de la famille, le propriétaire n’a pas émis de protestation [le propriétaire lui fait confiance et sait que s’il a joui des fruits durant trois ans, il (le métayer) lui donnera (au propriétaire) toute la récolte les trois années suivantes]. Mais si c’est la première fois qu’il est métayer [dans la famille], et qu’il a joui [de tous les fruits du champ] pendant les années [suffisantes pour avoir une] présomption de propriété, on laisse [la terre] en sa possession, et on dit au propriétaire : « Comment a-t-il pu jouir [des fruits] une année après l’autre sans que tu protestes ? »

6. Si un métayer de la famille fait venir d’autres métayers [pour travailler] sous son autorité, il peut avoir une présomption de propriété, car [on présume qu]un homme ne se tait pas lorsque l’on fait venir d’autres métayers dans sa propriété [le propriétaire aurait donc dû réagir]. Toutefois, s’il partage [le terrain] entre les métayers qui y travaillent [déjà], il ne peut pas avoir de présomption de propriété, car peut-être [le propriétaire] l’a-t-il désigné comme surveillant [des autres métayers]. Un métayer qui démissionne et jouit ensuite pendant trois ans [des fruits du champ] a une présomption de propriété.

7. [Nous avons également cité] les tuteurs. Quel est le cas ? Qu’un administrateur [tuteur] ait été désigné [précisément] pour ce champ ou pour tous les biens, qu’il ait été nommé par le tribunal ou par le père des orphelins, et les orphelins ont atteint leur majorité, et lui ont laissé [les biens entre ses mains], ou [autre cas envisageable] une personne désigne un administrateur pour gérer ses recettes et ses dépenses, [dans tous ces cas,] étant donné qu’il [le tuteur ou administrateur] a fait usage [du bien] avec l’autorisation [du propriétaire], il n’a pas de présomption de propriété.

8. Les associés [n’ont pas de présomption de propriété]. Quel est le cas ? S’il [une personne] était associé [avec un autre] sur un champ, où la loi du partage n’était pas applicable [le champ est trop petit et ne peut être partagé entre les associés car aucun d’eux ne bénéficierait d’un champ normal], même s’il a joui de tous [les fruits du champ] pendant plusieurs années, il [le champ] est présumé [appartenir] à tous les deux [son associé peut en effet prétendre : « J’ai accepté que tu jouisses pendant trois ans des fruits de ce petit champ, pour que moi ensuite, je puisse jouir des fruits pendant la même période, car la récolte annuelle est trop peu abondante pour être partagée »]. Et si la loi du partage était applicable et que l’un [d’eux] a joui [des fruits] de tout [le champ] pendant les années [suffisantes pour avoir] une présomption de propriété, il a une présomption de propriété, car il peut dire à son associé : « S’il est vrai que tu ne m’as pas vendu […] » ou « […] ne m’en a pas fait don, comment est-il possible que j’ai joui [des fruits] de tout [le champ] et que tu t’es tu, et n’as pas protesté durant toutes ces trois années ? » Et de même, l’homme qui a joui [des fruits] de la propriété de son épouse pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété [n’a pas de présomption de propriété. Cela s’applique] même s’il a convenu avec elle qu’il n’aurait pas droit à l’usufruit de ses biens, et [même plus encore,] a convenu avec elle lorsqu’elle était consacrée [avant les nissouine] qu’il n’hériterait pas [de ses biens, condition effective, si stipulée avant les nissouine], et [malgré l’abandon de ses droits] a ensuite joui [des fruits], a construit et détruit [sur ce champ], et a agi à son gré [car la femme peut prétendre ne pas avoir protesté pour préserver la paix au foyer]. Et de même, une femme qui a joui des fruits de la propriété de son mari et en a fait usage [de la propriété] à son gré pendant plusieurs années, [n’a pas de présomption de propriété. Cela s’applique] même s’il [son mari] lui avait affecté un champ pour sa subsistance, et qu’elle a joui [des fruits] d’autres champs. Et de même, [dans le cas d’]un fils qui est à la charge de son père, et est considéré comme faisant partie des membres de la maison, s’il jouit [des fruits] de la propriété de son père pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété, ou si le père jouit [des fruits] de la propriété de son fils qui est à sa charge pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété, [dans les deux cas,] le fait qu’il [le fils dans le premier cas ou le père dans le second] a joui [des fruits de la propriété de l’autre] ne constitue pas une preuve [de son titre].

9. Un fils qui s’est séparé de son père [c'est-à-dire qui a quitté la maison paternelle] et une femme qui a divorcé, même si son divorce fait l’objet d’un doute [s’il est effectif ou non], sont considérés comme toute personne.

10. Les exilarques de l’époque des sages, étant donné qu’ils avaient le pouvoir de frapper le peuple, le fait qu’ils jouissent [des fruits d’un terrain] ne constitue pas une preuve [de leur titre]. Et de même, quand une autre personne prend possession de leurs biens, même s’il a joui [des biens] pendant plusieurs années, le fait qu’il a joui [des fruits] ne prouve pas [son titre], parce qu’ils n’[ont pas besoin de] protester ; ayant main est forte, ils peuvent l’expulser quand ils désirent. Toutefois, ils doivent prêter un serment d’incitation qu’ils n’ont pas vendu ou n’ont pas fait don [du champ en question]. Et s’ils ont pris possession d’une propriété appartenant à une autre personne, et que celle-ci prétend ne pas leur avoir vendu [ce terrain], elle prête un serment d’incitation qu’elle ne leur a pas vendu et ne leur a pas fait don [de ce terrain, et le terrain lui est restitué].

11. Le brigand [n’a pas de présomption de propriété]. Quel est le cas ? Celui qui est tenu pour avoir volé ce champ [c'est-à-dire que des témoins attestent qu’il a volé le champ, ou il a déjà volé ce champ à son propriétaire, et le champ lui a été retiré, et maintenant de nouveau, le champ est en sa possession], ou celui dont les pères sont connus pour tuer pour de l’argent [même si lui-même n’est pas connu pour avoir une telle conduite], même s’il a joui [des fruits de] ce champ pendant plusieurs années, il n’a pas de présomption de propriété, et le champ est restitué à son propriétaire.

Lois des prétentions : Chapitre Quatorze

1. Tous ces [personnes] pour qui la jouissance ne prouve pas [leur titre], si elles produisent des témoins [qui attestent] que le propriétaire leur a vendu ce champ ou leur en a fait don, leur preuve est effective, sauf dans le cas du brigand, et d’un homme par rapport aux biens de son épouse. [Quand les sages ont énoncé ce dernier cas,] de quel type de biens ont-ils parlé ? Des biens inaliénables (niksei tsone barzel), d’un champ affecté [par le mari d’une hypothèque] pour le paiement de la [somme mentionnée dans le] contrat de mariage, d’un champ mentionné [par le mari dans le contrat de mariage comme grevé d’une hypothèque pour le paiement de la somme mentionnée dans] le contrat de mariage, ou d’un champ qu’il lui a apporté [en considération de la dot]. Par contre, pour ce qui est des nikhsei melog, il peut prouver [que son épouse le lui a vendu avec le témoignage de témoins], comme nous l’avons expliqué dans les lois sur le mariage.

2. Que signifie que le brigand n’a pas de preuve ? Dès lors qu’il [une personne] est tenu pour voleur concernant ce champ, même s’il apporte une preuve que le propriétaire a reconnu devant témoins lui avoir vendu ce champ et en avoir reçu le prix, et que le propriétaire dit : « Je n’ai pas vendu [le champ]. C’est simplement par crainte que j’ai reconnu cela », on lui retire le champ et il n’a droit à rien. [Toutefois,] si les témoins attestent qu’il [le voleur] a compté telle somme pour [le propriétaire] en leur présence, on retire le champ au brigand, et le propriétaire lui restitue l’argent, comme nous l’avons expliqué dans les lois sur le brigandage.

3. Le fils d’un artisan, le fils d’un métayer, ou le fils d’un administrateur qui a joui [des fruits] du champ [où a travaillé son père] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété, s’il prétend que le propriétaire lui a vendu ou lui a fait don [du champ], a une présomption de propriété. Et s’il déclare l’avoir reçu en héritage de son père qui a joui [des fruits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété, il n’a pas de présomption de propriété. Et s’il produit des témoins [qui attestent] que le propriétaire a reconnu à son père lui avoir vendu le champ ou lui en avoir fait don, on laisse le champ en sa possession.

4. Le fils d’un brigand [qui déclare avoir hérité un champ de son père], même s’il produit des témoins [qui attestent] que le propriétaire a reconnu à son père lui avoir vendu [le champ], cela n’est pas une preuve, comme nous l’avons expliqué. Toutefois, le fils du fils d’un brigand, même s’il vient avec la prétention de son père [c'est-à-dire qu’il prétend que le propriétaire a vendu le champ à son père], il a une présomption de propriété. S’il vient avec la prétention du père de son père [le voleur, c'est-à-dire qu’il déclare avoir hérité ce champ de son grand-père], il n’a pas de présomption de propriété.

5. Un non juif, même s’il a joui [des fruits d’un champ] pendant plusieurs années, cela ne constitue pas une preuve [de son titre]. Et s’il ne produit pas d’acte [de vente attestant que le champ lui a été vendu], le champ est restitué à son propriétaire sans aucun serment [de la part de celui-ci], car ils [les sages] n’ont institué le serment d’incitation qu’en [réponse à la réclamation d’]un juif. Un juif qui a acheté [un champ] d’un non juif a le même statut que le non juif, c'est-à-dire que le fait qu’il a joui [des fruits pendant trois ans] n’est pas une preuve [de son titre, car aucune prétention valable n’accompagne cette possession, car le juif ignore comment ce champ est parvenu en la possession du non juif qui le lui a vendu, et le propriétaire initial peut donc le lui reprendre].

6. Si ce juif qui a acheté [le champ] au non juif déclare : « Le non juif qui me l’a vendu l’a acheté à ce juif qui conteste [mon droit de propriété] en ma présence ! », il est cru, et prête un serment d’incitation sur [sa déclaration]. [La raison est que] puisqu’il aurait pu dire [s’il avait voulu] : « Je te l’ai acheté, et voici que j’ai joui [des fruits] les années [suffisantes pour avoir] une présomption de propriété » [et aurait été cru], il peut dire : « Je l’ai acheté à untel, qui te l’a acheté en ma présence » [et sa déclaration est acceptée].

7. La possession des biens d’un mineur [ne confère pas au détenteur une présomption de propriété], même si celui-ci a atteint la majorité. Quel est le cas ? S’il [une personne] a joui [des fruits du champ appartenant un mineur] en sa présence lorsqu’il était mineur pendant un an, et deux ans après sa majorité et prétend : « Tu me l’as vendu » [ou] « Tu m’en as fait don », cela n’a aucune valeur ; il faut [pour qu’il ait une présomption de propriété] qu’il jouisse [des fruits] pendant trois années consécutives après qu’il [le mineur] a atteint sa majorité.

8. Celui qui a eu possession de la propriété d’un mineur pendant de nombreuses années, et fait une réclamation, disant : « Je possède [ce terrain] en antichrèse, et j’ai telle créance sur celui-ci », étant donné qu’il aurait pu dire, s’il avait voulu : « Je l’ai acheté [à son père] », il est cru, car il n’a pas été établi qu’il [le terrain] appartenait à son père [du mineur ; c’est le détenteur qui a reconnu cela de lui-même]. Il [le détenteur] peut donc recouvrer [la créance] qu’il réclame sur les produits [de la terre], et elle [la terre] est restituée aux orphelins. Par contre, si une rumeur court qu’elle [cette terre] appartient aux orphelins [et qu’il n’a pas joui des fruits pendant les années suffisantes pour avoir une présomption de propriété du vivant de leur père], il n’est pas cru, car on ne peut avoir de présomption de propriété sur les biens appartenant à un mineur ; le champ est [donc] restitué, ainsi que tous les fruits dont il a joui, aux orphelins, jusqu’à ce qu’ils atteignent la majorité, et il intentera alors une action en justice contre eux.

9. S’il a joui [des fruits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété du vivant de leur père [et prétend qu’il détient le champ en antichrèse], étant donné qu’il peut dire : « Je l’ai achetée à votre père », il est digne de foi s’il dit : « J’ai une créance sur votre père », et recouvre celle-ci sur les produits [de la terre], sans prêter serment, étant donné qu’il pourrait dire : « Il [le champ] m’appartient ».

10. Une personne qui s’est enfuie parce que sa vie était en danger, par exemple, [une personne] que le roi cherchait à tuer, on ne peut avoir une présomption de propriété sur ses biens. Même si celui qui prend possession [de sa propriété] jouit [des fruits] pendant plusieurs années, et prétend l’avoir achetée, sa jouissance n’est pas une preuve [de son titre], et on ne dit pas au propriétaire du champ : « Pourquoi n’as-tu pas protesté », parce qu’il se préoccupait de sauver sa vie. Par contre, celui qui s’enfuit du fait à cause d’un problème d’argent est considéré comme toute autre personne, et s’il ne proteste pas, celui [qui détient] son terrain [le temps nécessaire] a une présomption de propriété.

11. On peut avoir une présomption de propriété sur les biens d’une femme mariée. Quel est le cas ? [Une personne] a joui [des fruits du terrain d’une femme mariée] une partie des années [nécessaires pour constituer] une présomption de propriété durant la vie de son mari, et trois ans après le décès de son mari, et prétend : « Vous me l’avez vendu, toi et ton mari », on le laisse [le terrain] en sa possession, étant donné qu’elle aurait pu dire : « Je te l’ai acheté après le décès de ton mari », puisqu’elle a joui [des fruits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété après le décès de son mari, et elle [la veuve] n’a pas protesté. Par contre, si elle a joui [des fruits du terrain] pendant plusieurs années du vivant de son mari, mais n’a pas joui [des fruits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété après le décès de son mari, elle n’a pas de présomption de propriété.

12. Toute présomption de propriété qui n’est pas accompagnée d’une prétention [valable] est sans effet. Quel est le cas ? Il [une personne] jouit des fruits de ce champ pendant plusieurs années, et un contestataire vient et lui dit : « D’où as-tu eu ce champ ? C’est le mien ! », et il [le détenteur] lui répond : « J’ignore à qui il appartient, mais étant donné que personne ne m’a rien dit, je m’y suis installé », il n’a pas de présomption de propriété, car il ne prétend ni l’avoir acheté, ni l’avoir reçu en donation, ni en avoir hérité. Et bien qu’il n’ait pas de prétention, on ne lui retire pas [le champ] jusqu’à ce que le contestataire produise des témoins [qui attestent] qu’il [le terrain] lui appartient. Une fois qu’il a apporté des témoins, le champ lui est restitué, et l’on exige du [détenteur] le paiement de tous les fruits dont il a joui. On n’éveille pas l’attention du détenteur, en lui disant : « Peut-être avais-tu un acte [de vente], que tu l’as perdu ? » ; il faut qu’il fasse cette déclaration tout seul. Et s’il ne fait pas [une telle déclaration], il doit payer tous les fruits dont il a joui. Et de même, celui qui a joui [des fruits d’un champ] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété, sur la base d’un acte [de vente ou de don] en sa possession, et celui-ci se trouve être nul, sa présomption de propriété est nulle, et le champ est restitué avec le paiement de tous les fruits à son propriétaire.

13. Celui qui est venu [dans un champ] par héritage doit apporter une preuve que son père a habité dans ce champ ou en a fait usage, même un jour [et n’a pas besoin de montrer comment son père a obtenu ce champ]. Et puisqu’il lui a joui [des fruits de ce champ] pendant trois années du fait de son père, on le laisse en sa possession. Par contre, s’il n’apporte pas de preuve que son père y a habité, le champ, ainsi que tous les fruits, sont restitués au contestataire qui a des témoins [qui attestent] qu’il [ce champ] lui appartient. [La raison en est] qu’il [le détenteur du champ] ne prétend pas qu’il [le contestataire] le lui a vendu ou lui en a fait don, et ce terrain n’est pas connu comme ayant appartenu à son père. S’il apporte une preuve que son père y a été vu [dans ce champ], cela n’a aucune valeur, car peut-être il [son père] est venu visiter [ce champ] et ne l’a pas acheté. Plutôt, il doit apporter une preuve que son père y a habité, même un seul jour.

14. [Soit le cas suivant :] il [une personne] a joui [des fruits] d’un champ défini pendant de nombreuses années, et un contestataire se présente et lui dit : « Qu’as-tu à faire avec ce champ ? ». Il reconnaît et lui dit : « Je sais qu’il t’appartenait, mais untel qui te l’a acheté me l’a vendu », et le contestataire lui dit : « Untel qui te l’a vendu est un voleur ». Étant donné qu’il [le détenteur] a reconnu qu’il [le champ] appartient [au contestataire] et qu’il ne lui a pas acheté [le champ], le champ est restitué, avec tous les fruits [dont le détenteur a joui], au contestataire, bien que le contestataire n’ait pas de témoins qu’il [le champ] lui appartient [l’admission du détenteur est considérée comme le témoignage de cent témoins]. Et de même pour tout cas semblable. Si le détenteur produit des témoins qu’untel, qui lui a vendu [le champ], y a habité même un seul jour, ou il [le détenteur] lui dit [au contestataire] : « Il te l’a acheté en ma présence, et me l’a ensuite vendu », on le laisse en sa possession, car il a une prétention qui accompagne sa présomption de propriété, et s’il avait voulu, il aurait pu dire : « Je te l’ai acheté », car [il a joui des fruits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété.

Lois des prétentions : Chapitre Quinze

1. Si quelqu’un émet une contestation concernant un champ [détenu par une autre personne] et produit des témoins [qui attestent] qu’il [le champ] est connu lui appartenir, et le détenteur produit un acte [de vente qui atteste du fait] qu’il lui a acheté [ce champ], et produit des témoins [qui attestent] qu’il a joui [des fruits du champ] pendant les années [suffisantes pour avoir] une présomption de propriété, on lui dit en premier lieu : « Authentifie ton acte ». S’il [l’acte] est authentifié, cela est préférable, et le jugement est basé sur l’acte [de vente]. Et s’il lui est impossible de l’authentifier, on s’appuie sur les témoins [qui attestent] de sa possession [du champ], et il prête un serment d’incitation qu’il l’a acheté.

2. Les témoins de la possession, si l’un d’eux témoigne qu’il [le détenteur] a joui du blé pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété, et le second témoigne qu’il a joui de l’orge, leur témoignage est valide, car [on considère que] les témoins ne prêtent pas attention à ces [détails]. Si l’un témoigne qu’il [le détenteur] a joui [des fruits] la première, la troisième et la cinquième [année], et le second témoigne qu’il [le détenteur] a joui [des fruits] la seconde, la quatrième, et la sixième [année ; il est ici question d’un lieu où l’usage local est de laisser le champ en friche tous les deux ans, cf. ch. 12 § 4, car si l’habitude est de semer chaque année, même si les deux témoins attestent qu’il a semé la première, la troisième et la cinquième année, il n’a pas de présomption de propriété], leurs témoignages ne sont pas liés, car leurs témoignages ne portent pas sur les mêmes années, et le terrain, ainsi que les fruits, sont restitués [au propriétaire].

3. Quand quelqu’un prend possession d’un champ avec la présomption qu’il en est l’héritier, et il se trouve qu’il y a un héritier plus proche [dans son lien de parenté avec le défunt] que lui, qui aurait dû en hériter [à sa place], que des témoins [attestent de son lien de parenté], ou que celui qui a pris possession premier [du champ] reconnaisse [son lien de parenté], il a l’obligation de payer tous les produits dont il a joui.

4. Si deux personnes sont en litige concernant un champ, chacune disant : « Il m’appartient », et qu’aucune d’elle n’a de preuve [de son titre], ou que chacune d’elles produit des témoins [qui attestent] qu’il [le champ] lui appartient ou appartenait à ses pères, ou chacune d’elles produit des témoins [qui attestent] qu’elle a joui [des fruits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété, et les témoins de l’une et de l’autre font référence [dans leur témoignage] aux mêmes années, [dans ce cas,] on laisse le champ entre leurs mains, et le plus fort en prendra possession . [Celle qui en a pris possession la première en est propriétaire, dès lors, si l’autre désire l’en exproprier,] elle est [considérée comme] retirant [quelque chose d’un autre] et doit [donc] apporter une preuve [de son titre ; en l’absence de preuve, même si elle parvient à s’emparer du champ ou du bateau, on le lui reprend]. Et si une tierce personne vient et leur saisit [le champ ou le bateau] et en prend possession, on l’en expulse.

5. [Dans ce même cas de litige,] si l’une produit des témoins [qui attestent] qu’il [le champ] appartenait à ses pères et qu’elle a joui [des fruits] pendant les années [nécessaires pour constituer] une présomption de propriété, et qu’il [le champ] est en sa possession, et que l’autre produit des témoins [qui attestent] qu’elle a joui [des fruits] pendant les années [nécessaires pour constituer] une présomption de propriété, et qu’il [le champ] est en sa possession, les témoignages concernant la présomption de propriété se contredisent.[Par conséquent,] on met [le terrain] en la possession de celle dont les témoins de la présomption de propriété ont attesté qu’il [le terrain] appartenait à ses pères. Si la seconde produit à son tour des témoins [qui attestent] qu’il [le terrain] appartenait à ses pères, de sorte que leurs témoignages se contredisent également concernant ce point, le tribunal en expulse également la première, et laisse [le champ] entre les mains des deux [personnes en litige], et celle qui triomphera en prendra possession.

6. Si l’une dit : « Il appartenait à mes pères », et l’autre dit : « Il appartenait à mes pères », et que l’une produit des témoins [qui attestent] qu’il appartenait à ses pères, et l’autre produit des témoins [qui attestent] qu’elle a consommé [les produits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété, il [le terrain] est restitué à celle qui a produit des témoins [attestant que le champ appartenait à ses pères], et elle [l’autre] doit payer les fruits dont elle a joui. [La raison en est] qu’elle n’a aucune prétention [valable pour revendiquer son droit de propriété étant donné qu’il a été prouvé que le champ appartenait aux parents de la partie adverse], et le fait qu’elle a joui [des fruits] ne constitue pas une preuve, car quand la présomption de propriété n’est pas assortie d’une prétention [valable à ce droit], elle n’a aucune valeur. Si le détenteur réplique alors : « Certes, il appartenait à tes pères, mais tu me l’as vendu, et ce que j’ai prétendu au début, qu’il [le champ] appartenait à mes pères signifie que j’étais certain de [ce champ] et que me droit dessus est comme s’il avait appartenu à mes pères » ou dit : « [Il appartenait] à mes pères, qui l’ont acheté à tes pères », cela est un argument [valable], car il a donné une raison plausible à sa première déclaration, et on laisse [donc le champ] en sa possession. [Toutefois,] si elle a dit au début : « Il appartenait à mes pères, et non à tes pères », on n’accepte pas un tel argument. Et de même pour tout cas semblable.

7. [Soit le cas suivant :] Réouven se trouve dans un champ, et Chimone vient et conteste [son droit de propriété], disant à Réouven : « Ce champ, je l’ai acheté de Lévi, et j’ai joui [des fruits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété. Si Chimone lui dit : « N’est-ce pas que voici un acte [de vente] authentifié en ma possession [qui atteste] que je l’ai acheté à Lévi il y a quatre ans à compter d’aujourd’hui ! » Réouven réplique alors : « Penses-tu que cela fait trois ans que je l’ai acheté. Cela fait de nombreuses années que je l’ai acheté et je t’ai précédé », l’argument de Réouven est valable [bien qu’il ait prétendu au début avoir joui des produits du champ pendant les années suffisantes pour avoir une présomption de propriété], car il est courant de désigner de nombreuses années comme « années [suffisantes pour avoir] une présomption de propriété ». C’est pourquoi, si Réouven produit des témoins [qui attestent] qu’il a joui [des fruits] pendant sept ans, de sorte qu’il a joui [des fruits] pendant les années [suffisantes pour constituer] une présomption de propriété avant que Chimone ne l’a acheté, on le laisse [le champ] en sa possession. Mais s’il [Réouven] a joui [des fruits] pendant moins de sept ans, il [le champ] est restitué à Chimone ; en effet, il n’existe pas de plus grande protestation que cela [de la part de Lévi de l’usage de Réouven], puisqu’il [Lévi] l’a vendu avant que Réouven ait une présomption de propriété.

8. Si l’une [des personnes] dit : « Il [le terrain] appartenait à mon père » et produit des témoins [qui attestent de cela], et l’autre dit : « Il appartenait à mon père », mais n’a pas de témoins, il [le champ] est restitué à celui qui a produit des témoins, et l’on exige le paiement de tous les fruits dont il [l’autre] reconnaît avoir joui, bien qu’il n’y ait pas de témoins qu’il a joui [des fruits]. [La raison en est qu’]il prétend que c’est en vertu [du droit de propriété] de ses pères qu’il a joui [des fruits], et il y a des témoins [qui attestent] qu’il [le terrain] appartenait aux pères de l’autre plaignant. Et de même pour tout cas semblable.

9. [Soit le cas suivant : une personne est en possession d’un champ.] Un contestataire produit des témoins [qui attestent] que ce champ lui appartient, et le détenteur déclare : « Je te l’ai acheté, et voici mon acte [de vente] », produisant un acte authentifié. Le contestataire prétend [alors] qu’il [l’acte de vente] est un faux, et le titulaire de l’acte admet [cela] et dit : « Certes, mais j’avais un acte [de vente] valide, que j’ai perdu ; j’ai donc pris [cet acte] pour l’intimider, de manière à ce qu’il reconnaisse qu’il m’a réellement vendu [ce champ] ». Étant donné qu’il aurait pu s’en remettre [à cet acte], puisqu’il est authentifié, il est cru, et on ne lui retire pas le champ [même s’il n’en a pas la possession depuis trois ans] ; il doit [simplement] prêter un serment d’incitation.

10. Si un contestataire produit des témoins [qui attestent] que le champ lui appartient, et le détenteur déclare : « Je te l’ai acheté, et j’ai joui [des fruits] pendant les années [nécessaires pour constituer] une présomption de propriété », et produit des témoins [qui attestent] qu’il a joui [des fruits] pendant les années [nécessaires pour constituer une présomption de propriété]. Le contestataire déclare alors : « Comment peux-tu prétendre me l’avoir acheté il y a trois ans, alors que je ne me trouvais pas dans cette province », on exige du détenteur qu’il fournisse une preuve qu’untel le contestataire se trouvait dans cette province, même un seul jour, au moment où il prétend qu’il lui a vendu [le champ], de sorte qu’il soit possible qu’il lui a vendu. Et s’il ne fournit pas [de preuve], on l’expulse [du champ].

11. [Soit le cas suivant :] une personne est partie outremer, et le chemin [qui lui permettait d’accéder à son champ] est perdu [c'est-à-dire que les propriétaires des champs voisins en ont pris possession, mais elle ignore lequel], que les quatre champs adjacents appartiennent à quatre personnes [différentes depuis le moment où elle est partie, et n’ont pas changé de propriétaire] ou aient été acquis [par quatre personnes] à une seule personne [qui possédait tous les champs adjacents avant qu’elle ne parte], chacun [des propriétaires des quatre champs] peut la renvoyer et lui dire : « Peut-être ton chemin [pour accéder à ton champ] se trouve [dans le champ] de mon ami ». C’est pourquoi, elle doit acquérir un chemin [au prix qui lui sera demandé, même] cent mané ou voler en l’air [et n’a pas le droit d’emprunter un chemin dans le champ d’un autre pour accéder à son champ]. Et de même, si les quatre champs [adjacents] appartiennent à une seule personne qui les a achetés à quatre personnes [qui en étaient propriétaires avant qu’elle ne parte], elle n’a pas droit à un chemin, car il [le nouveau propriétaire] peut lui dire : « Si je restituais à chacun [de mes vendeurs] son acte [de vente, c'est-à-dire si je me rétractais, et que chacun des quatre propriétaires reprenait son champ], tu ne pourrais pas passer par [le champ] d’aucun d’eux ; or, j’ai acquis de chacun [des anciens propriétaires] tous les droits qu’il avait ». Par contre, s’il y a un seul propriétaire des quatre champs adjacents, qui a été le voisin [de la personne partie outremer] du début à la fin [c'est-à-dire avant qu’elle ne parte, et maintenant encore], elle [la personne partie en voyage] peut lui dire : « Quoi qu’il en soit, j’ai droit à un chemin dans ta [propriété] », et elle empruntera le [chemin le] plus court, dans le champ que désire le propriétaire du champ. Et de même pour tout cas semblable. Et si elle prend possession d’un chemin et dit : « Ceci est mon chemin [je le reconnais] », on ne l’en expulse pas [en lui interdisant l’accès] à moins qu’il [le propriétaire du champ en question] ait une preuve formelle [du contraire].