Quand Rav Yits’hak David Groner s’installa en Australie en 1958 à la demande du Rabbi, il fut l’un des pionniers de cette institution qui devait prendre des dimensions extraordinaires par la suite (l’envoi d’émissaires tout autour du globe). A cette époque, chaque Chalia’h demandait au Rabbi comment agir sur place et recevait des réponses détaillées. (Plus tard, le Rabbi encouragea chacun à utiliser sa propre logique – en accord avec les lignes générales indiquées par ses lettres et discours).

Rav Groner arriva en Australie peu avant les fêtes de Tichri. Il décida d’organiser une grande soirée en l’honneur de Sim’hat Beth Hachoéva – durant les jours intermédiaires de Souccot – mais hésitait quant à la dimension à donner à l’événement. D’un côté, il aurait préféré commencer en grand afin que chacun entende parler du Rabbi et de l’institution qu’il s’apprêtait à fonder sur cette île du bout du monde ; de plus, cela lui permettrait de connaître rapidement un grand nombre de gens. D’un autre côté, il craignait de générer de la jalousie si son entreprise était couronnée de succès.

Plutôt que de décider par lui-même, il demanda au Rabbi qui l’encouragea à organiser une très grande réception. Il loua donc une grande salle avec les services d’un traiteur, un orchestre et une sono performante. Une semaine auparavant, il avait payé des encarts publicitaires dans les journaux juifs, invitant la communauté à célébrer la joie de Souccot avec Loubavitch.

Tout était prêt : la salle (immense), le buffet (somptueux), l’orchestre (gonflé à bloc) mais personne ne vint. Rav Groner attendit, encore et encore, puis un Juif arriva. Un seul Juif !

D’abord, Rav Groner décida d’attendre encore un peu mais le temps passait et personne d’autre ne se présentait. Il était disons déçu. Amer. Anxieux… Il avait pourtant agi comme le Rabbi le lui avait demandé et c’était non seulement une catastrophe au point de vue financier mais, de plus, il serait la risée de tous !

Mais il se reprit et invita le visiteur à s’asseoir. Il prit le micro et se mit à parler comme s’il s’adressait à une foule immense pour expliquer avec émotion, humour et conseils pratiques le sens de la fête puis demanda à l’orchestre de jouer comme dans un mariage avec des centaines de convives (et vous ne pouvez pas imaginer combien c’est difficile de ne jouer que devant une seule personne !). Rav Groner descendit de l’estrade, attrapa la main de son unique invité et le fit danser avec fougue à en perdre l’haleine.

Une fois que la «fête» fut terminée et que les factures furent (difficilement) payées, Rav Groner écrivit au Rabbi : «Je suis désolé ; je pensais avoir obéi exactement aux instructions du Rabbi mais seule une personne se présenta». Il espérait que le Rabbi lui indiquerait quelle avait été son erreur.

Peu après, il reçut une réponse : le Rabbi n’évoquait pas du tout l’échec de Sim’hat Beth Hachoéva mais précisait déjà que l’année suivante, la fête devrait être deux fois plus importante ! Rav Groner ravala sa salive, espéra que les gens avaient oublié sa piètre performance de l’année dernière et que tous ceux qui n’étaient pas venus feraient cette fois-ci l’effort d’être présents et d’amener leurs amis. Cette année-là, il ne se contenta pas des journaux mais il paya aussi une publicité à la radio ; il loua une salle deux fois plus grande, deux traiteurs au lieu d’un et un orchestre encore plus fourni.

Mais cette fois-là aussi, seul un Juif se présenta. Le même !

Rav Groner ne comprenait pas ce qui lui arrivait, il avait agi exactement comme le Rabbi l’avait demandé, avait contracté d’énormes emprunts pour couvrir ces dépenses mais, comme la fois dernière, il demanda aux musiciens de jouer avec enthousiasme pour réjouir cet unique invité.

Et Rav Groner termina de raconter son histoire : «Sachez que toutes les institutions, éducatives, culturelles, cultuelles, charitables que Loubavitch a construit à Melbourne l’ont été avec l’aide financière de ce Juif qui nous honora de sa présence à Sim’hat Beth Hachoéva !».

Traduit par Feiga Lubecki

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