Au pays de Souccot

Unité, joie et confiance. Ce pourrait être la devise d’un pays où le bonheur est la règle, une de ces devises gravées au fronton des bâtiments publics pour montrer à tous que, en ce lieu, c’est une certaine vision du monde que chacun s’applique à mettre en pratique. Dans le calendrier juif, c’est le « pays » de Souccot, de Chemini Atsérèt et de Sim’hat Torah – le deuxième versant des grandes fêtes de Tichri. C’est que ce mois est décidément comme un grand voyage qui nous donnerait à découvrir tous les secrets inespérés d’une terre de merveilles. Après la grandeur et la puissance de Roch Hachana et de Yom Kippour, c’est un nouveau joyau qui nous est offert. D’une certaine façon, les trois mots « unité, joie et confiance » sont les éclats de lumière qu’il produit. Et nous prenons alors conscience que cette lumière nous est familière, qu’elle nous emplit d’une sérénité que les temps avaient pu parfois obscurcir.

L’unité est d’abord dans la Soucca qui nous réunit tous, sans distinctions ni exclusive, entourés de parois et d’un toit matériellement si fragiles et spirituellement si invincibles. Elle est aussi dans le Loulav, ce bouquet de plantes qui affirme avec tant d’assurance, par sa seule existence, que les différences entre les hommes ne peuvent jamais les séparer. La confiance est toujours présente parce que, lorsque l’unité est là, chacun révèle le meilleur de lui-même. Chacun devient un être plus grand, plus complet.

Avoir confiance en D.ieu, et donc en l’avenir, dans une fragile cabane de branchages, cela peut sembler une gageure. C’est la beauté de Souccot. La pérennité n’est pas toujours due à ce que l’on croit et la fragilité n’est pas obligatoirement son contraire. Dans le mot « confiance », n’y a-t-il pas aussi le mot « foi » ?

Mais tout cela ne trouverait peut-être pas sa concrétisation si la joie ne grandissait pas jour après jour. Car c’est bien ainsi que la période avance. La joie, pure, indépassable, est née dès la fin de Yom Kippour, avec la certitude que D.ieu, cette année encore, a pardonné. Elle s’est affirmée dans les jours qui ont suivi avec les préparatifs de Souccot. Elle s’exprime dans l’allégresse générale de la fête. Elle explose littéralement quand arrive Sim’hat Torah – la « joie de la Torah ». Y a-t-il une plus belle idée ? Se réjouir avec la Torah que D.ieu a donnée à chacun de nous, quel qu’il soit. Et cette joie infinie va loin. Continuation, par d’autres voies, de l’œuvre accomplie depuis Roch Hachana, elle nous ouvre à toutes les bénédictions Divines pour cette nouvelle année. Et à la plus grande d’entre elles : la Délivrance véritable et complète.


 La première danse

Souccot est “le temps de notre joie”, Sim’hat Torah, celui où nous dansons avec la Torah. A cette occasion, il convient de s’interroger sur les danses que la venue de Machia’h suscitera. A ce propos, Rabbi Its’hak Eizick de Homil déclara :

Lorsque le Machia’h viendra et que les morts ressusciteront, se relèveront alors les Patriarches, les enfants de Jacob, fondateurs des tribus d’Israël, Moïse et Aaron. Se relèveront aussi les Prophètes, les Sages du Talmud et les Justes de toutes les générations. Tous se réjouiront avec les Juifs simples.

La première danse, c’est Moïse qui la conduira avec ces Juifs simples. C’est en effet sur eux que tient la Torah et non sur les érudits qui développent leurs commentaires. Quant à la véritable danse, c’est le roi David qui la mènera avec ces Juifs qui récitent des Psaumes.

(D’après les lettres du précédent Rabbi de Loubavitch, vol. VI, p. 371)


 Souccot

La fête de Souccot dérive son nom de l’une des Mitsvot particulières de la fête: la Mitsva de la Souccah. Pendant sept jours, nous résidons dans la Souccah, une cabane au toit de feuillage. Il nous est enjoint de quitter notre résidence permanente pour vivre dans une résidence temporaire. Durant une semaine entière, la Souccah doit devenir notre lieu de résidence permanent et notre maison, notre résidence temporaire . Dans la Souccah, il nous faut utiliser une belle vaisselle, manger, boire, étudier la Torah et même passer nos loisirs.

La Torah elle-même propose une explication pour cette Mitsva. « Pour que votre génération sache véritablement que J’ai fait vivre les Enfants d’Israël dans des Souccot quand Je les ai fait sortir d’Egypte ».

Ainsi la Mitsva de la Souccah vient-elle nous rappeler la manière dont nos ancêtres passèrent les quarante années de leur périple dans le désert. Ils vécurent dans un désert aride et terrifiant, grouillant de serpents et de scorpions, un lieu où il n’y avait ni eau ni nourriture. Et tout au long de ces années, D.ieu pourvut à leurs besoins. Ils étaient nourris par de la nourriture divine, la Manne, ils se désaltéraient au puits de Miryam. La nuée assurait que leurs habits ne s’abîment ou ne se salissent et les protégeait des insectes et reptiles. En d’autres termes, durant ces quarante ans, ils eurent une perception empirique, concrète de la Hachga’hah Pratit, la Providence divine. Tout le monde pouvait réellement constater, non seulement l’existence de D.ieu, mais Son implication directe dans la vie de chaque individu, subvenant à tous les besoins et s’impliquant dans tous les détails, les plus infimes de la gestion du monde. Avec l’exode et les quarante années du désert, tout cela devint clairement visible, à l’œil nu.

Mais cela est aussi réel en tous temps, en tous lieux. Aujourd’hui tout autant qu’aux jours de Moché !

La Mitsva de Souccot nous rappelle ce principe fondamental. Tout au long de l’année, nous vivons dans une maison solide, dans un refuge protecteur que nous construisons, achetons ou louons, en fonction de nos ressources individuelles. Tout au long de l’année, nous vivons une vie qui suit un certain modèle, une routine quotidienne et l’ordre des lois naturelles. Tant que ce modèle naturel perdure, il est facile d’oublier la réalité de la vérité ultime. Il est facile d’oublier que le monde dans son ensemble, chaque individu et chaque existence sont totalement dépendants de D.ieu Qui a créé et soutient l’univers.

C’est la raison pour laquelle il nous est commandé de sortir du doux cocon de notre foyer, de cette structure permanente pour résider dans une cabane au toit de feuilles, exposée aux dangers des éléments.

Si nous habitons un lieu précaire, pendant une semaine, c’est pour nous rappeler la réalité de la vie, pour nous rappeler la vérité de ce monde. Car qu’est notre vie dans ce monde sinon une résidence provisoire, un lieu de passage, une existence précaire dont nous ne pouvons rien prédire du jour au lendemain ?

Vivre dans la résidence précaire qu’est la Souccah, cabane qui peut être emportée par n’importe quelle tempête, totalement exposée, nous renvoie à la vie de nos ancêtres et imprime en nous le principe de la Providence Divine.

Au début de la nouvelle année, après Roch Hachana et Yom Kippour, maintenant que nous avons tous été bénis par le Tout-Puissant pour une année douce et bonne, avec la vie, la santé, la paix et la prospérité, nous ne devenons pas arrogants et imbus de nous-mêmes. Avant de nous replonger dans des préoccupations envahissantes, pour vivre selon les exigences de la matérialité environnante, nous pénétrons dans la Souccah avec humilité. Nos proclamons et réaffirmons avec une conviction profonde que ce ne sont pas notre force et notre puissance personnelles qui nous apportent santé et richesse mais c’est « Hachem Eloké’ha », ton D.ieu personnel Qui donne tout ce qui existe, tout ce que l’on possède.

Et nous le faisons de concert avec une autre Mitsva, liée à ces jours. La Mitsva de Vessama’hta Be’hagé’ha, « tu te réjouiras dans tes fêtes », avec joie. Car quelle plus grande joie peut-on ressentir sinon celle de savoir que le Tout-Puissant est éternellement à nos côtés , qu’Il nous bénit et nous protège avec bonté !


 Que fait-on à Souccot ?

« Dans des Souccot, vous habiterez durant sept jours… afin que vos générations sachent que c’est dans des Souccot que J’ai fait habiter les enfants d’Israël lorsque Je les ai fait sortir du pays d’Egypte ».

Chaque Juif prend ses repas dans une Souccah, une cabane recouverte de branchages depuis mercredi soir 4 octobre 2017 jusqu’à Chémini Atséret inclus, c’est-à-dire jeudi après-midi 12 octobre. On essaiera d’habituer les petits garçons à prendre aussi leur repas dans la Souccah. Les femmes ne sont pas astreintes à ce commandement. Il est recommandé d’avoir des invités dans la Souccah.

Avant d’y manger du pain ou du gâteau, ou d’y boire du vin, on dira la bénédiction adéquate suivie de la bénédiction : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Léchève Bassouccah » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses Commandements et nous as ordonné de résider dans la Souccah ».

Mercredi 4 octobre, on procède au Erouv Tavchiline afin de pouvoir cuisiner vendredi pour Chabat.

Après avoir mis quelques pièces à la Tsedaka (charité), à Paris avant 19h05, les femmes mariées allument au moins deux bougies (les jeunes filles et les petites filles allument une bougie) ainsi qu’une bougie de 48 heures avec les bénédictions suivantes :

1) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chel Yom Tov » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses Commandements et nous as ordonné d’allumer la lumière de la fête ».

2) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous a fait vivre et exister et parvenir à cet instant ».

Jeudi soir 5 octobre (à Paris après 20h05) elles allument les bougies avec les mêmes bénédictions à partir de la bougie de 48 heures allumée avant la fête.

Vendredi 6 octobre (à Paris avant 19h00), elles allument les bougies de Chabbat à partir de la bougie de 48 heures allumée avant la fête avec la bénédiction :

Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chel Chabbat Kodèch.

Béni sois-Tu Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses Commandements et nous as ordonné d’allumer la lumière du saint Chabbat.

Samedi soir 7 octobre, Chabbat se termine à 20h04 et on récite la Havdala dans la Souccah.

A partir de jeudi matin 5 octobre et jusqu’au mercredi 11 octobre inclus (excepté Chabbat), on récite chaque jour la bénédiction sur les « quatre espèces » (cédrat, branche de palmier, feuilles de myrte et feuilles de saule) :

1) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Al Netilat Loulav » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses Commandements et nous as ordonné de prendre le Loulav ».

La première fois, on ajoute : 2) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé ».

Mardi soir 10 octobre, c’est Hochana Rabba – les hommes restent debout toute la nuit, lisent le livre de Devarim (Deutéronome) puis le livre de Tehilim (Psaumes). Dans certaines communautés, on mange dans la Souccah des pommes rouges trempées dans le miel.

Mercredi matin 11 octobre, la prière est particulièrement longue.

On encercle sept fois la « Bimah » au centre de la synagogue puis on frappe cinq fois le bouquet de 5 « Hochanot » (branches de saule) par terre comme l’ont enseigné les Prophètes.

On procède au Erouv Tavchiline afin de pouvoir cuisiner vendredi pour Chabbat.

Mercredi 11 octobre. Après avoir mis quelques pièces à la Tsedaka (charité), à Paris avant 18h50, les femmes mariées allument au moins deux bougies (les jeunes filles et les petites filles allument une bougie) plus une bougie de 48 heures avec les bénédictions suivantes :

1) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chel Yom Tov » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses Commandements et nous as ordonné d’allumer la lumière de la fête ».

2) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous a fait vivre et exister et parvenir à cet instant ».

C’est Chemini Atseret. On mange dans la Souccah, mais sans réciter la bénédiction « Léchève Bassouccah ».

Jeudi matin 12 octobre, on récite la prière de Yizkor à la mémoire des parents disparus.

On mange dans la Souccah mais sans réciter la bénédiction « Léchève Bassouccah ».

Jeudi soir 12 octobre, c’est Sim’hat Torah. A Paris après 19h51, les femmes mariées allument à partir de la bougie de 48 h au moins deux bougies (les jeunes filles et les petites filles allument une bougie) avec les bénédictions suivantes :

1) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chel Yom Tov » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses Commandements et nous as ordonné d’allumer la lumière de la fête ».

2) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous a fait vivre et exister et parvenir à cet instant ».

On danse joyeusement avec la Torah autour de la Bimah dans la synagogue. On ne mange plus dans la Souccah.

Tous les soirs de Souccot, on organise, si possible même dans la rue, une fête joyeuse, Sim’hat Beth Hachoéva.

Vendredi 13 octobre, avant 18h46, les femmes mariées allument à partir de la bougie de 48 heures allumée avant la fête au moins deux bougies (les jeunes filles et les petites filles allument une bougie) avec la bénédiction :

Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chel Chabbat Kodèch.

Béni sois-Tu Eternel notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifié par Ses Commandements et nous as ordonné d’allumer la lumière du saint Chabbat.

Samedi 14 octobre, après 19h50, Chabbat se termine et on récite la Havdala.


 Souccot sur des générations

On était en 1927, à Simferopol, au sud de l’Ukraine en Union Soviétique. Rav Peretz Mochkin était un homme aux abois : ses activités en faveur de l’éducation juive, sous l’autorité de Rabbi Yossef Its’hak Schneersohn de Loubavitch le désignaient comme une proie de choix pour la police secrète. En effet, entretenir des écoles clandestines où des enfants étudiaient la Torah était considéré comme un crime contre la révolution bolchévique. Rav Peretz vivait constamment dans la peur mais continuait avec détermination : nommer des professeurs, les payer, trouver des locaux, veiller à la sécurité des élèves comme des enseignants et des parents tout en déjouant les recherches de la police… Il fallait maintenir le flambeau du judaïsme, même sous le joug communiste, coûte que coûte.

Juste avant la joyeuse fête de Souccot, Rav Peretz attrapa une terrible maladie, souvent mortelle dans les conditions de l’époque : le typhus ! Il sentit que ses jours étaient comptés et se préparait au pire. Qu’allait devenir sa famille ? Qu’allaient devenir tous les enfants dont l’éducation juive dépendait de lui ? Soudain, on entendit des coups frappés à la porte. Son vieil ami Yankel, Rav de la ville de Zhuravitz avait entrepris le pénible voyage de 1200 km pour rendre visite à la famille Mochkin et lui apporter un peu de la joie de la fête, une joie qui n’était vraiment pas évidente. Cette visite inattendue mit du baume au cœur de Rav Peretz, lui enlevant sans doute une partie de sa souffrance comme l’affirment les Sages.

Guita Shapiro, la fille de Rav Peretz se souvint et raconta par la suite à ses petits-enfants avec une pointe d’humour : « Notre Souccah était très petite et dans un état lamentable car il ne fallait surtout pas qu’on la remarque, que des voisins signalent sa présence aux autorités. Rav Yankel était d’un gabarit impressionnant : donc quand il entra dans la Souccah où se tenait mon père, il n’y avait plus de place pour personne d’autre ! ».

Les deux hommes se réchauffèrent avec un verre de vodka et se mirent à chanter « A Soukkele a kleiner », « Une si petite Souccah » : c’est l’histoire d’une famille juive qui passe la fête dans une petite Souccah, une cabane si fragile qu’elle tremble dans le vent et la petite fille se demande quand elle va s’effondrer. Mais le père rassure sa famille : les bougies de la fête ne s’éteindront pas et la Souccah restera debout. Les ennemis ont beau faire souffler toutes sortes de vents mauvais, la Souccah qui abrite le peuple juif est éternelle. Effectivement, la Souccah de Rav Peretz, faite de bric et de broc, menaçait à tout instant de se désintégrer mais les enfants savaient au plus profond de leur cœur que personne, pas même un dictateur aussi sanguinaire que Staline, ne parviendrait à éteindre la flamme éternelle du judaïsme.

L’homme pense et D.ieu rit. Contre toute attente, Rav Peretz finit par guérir et réussit même à fuir l’Union Soviétique en 1947 avec sa famille. Mais Rav Yankel Maskalik fut arrêté en 1937 par le KGB et fusillé pour ses « activités contre-révolutionnaires ». Que son souvenir soit béni !

Bien des années plus tard, les deux familles se retrouvèrent réunies – cette fois-ci dans la joie. L’arrière-petite-fille de Rav Yankel, ‘Hanna Galperin épousa l’arrière-petit-fils de Rav Peretz, Rav ‘Haïm Lazaroff, Chalia’h (émissaire) du Rabbi à Houston, Texas. Le communisme a depuis longtemps été enterré en Union Soviétique mais les Juifs de Russie ont triomphé de leurs ennemis et leurs descendants continuent de répandre le judaïsme aux quatre coins du monde.

Ainsi quelques 90 ans plus tard, Rav ‘Haïm Lazaroff et son épouse ‘Hanna ont maintenu la tradition : leur très grande Souccah peut accueillir plus d’une centaine d’invités, ce qui est le meilleur hommage qu’ils puissent rendre à l’esprit indomptable de leurs ancêtres qui étaient prêts à se sacrifier pour l’avenir du peuple juif - dans les pires conditions. Oui vraiment, « une si petite Souccah » a non seulement survécu aux horreurs de l’exil mais elle a étendu ses ailes protectrices sur les Juifs du monde entier. Les ancêtres ont semé dans les pleurs, les descendants continuent de récolter dans la largesse.

« Chaque année, nous célébrons Souccot dans la joie, les chants, les plats chauds les plus raffinés et surtout un extraordinaire sentiment d’unité, avec tous ces Juifs réunis dans notre Souccah ! affirme Rav ‘Haïm, pensif mais les yeux brillants de satisfaction. Le sacrifice de nos ancêtres n’a pas été vain ! ».

Souhaitons à tous les Juifs de Houston et de Floride de pouvoir célébrer, cette année aussi, malgré les dégâts causés par les ouragans, une joyeuse fête de Souccot.

Menachem Posner - chabad.org

Traduit par Feiga Lubecki

Publié dans 2017

 Yom Kippour : l’appel et la puissance

Yom Kippour fait partie de ces jours que nul n’a besoin d’annoncer ni même d’expliquer. Il est comme chevillé à l’âme de chacun. De fait, tous savent et ressentent, avec une acuité absolue, que Yom Kippour n’est pas une solennité parmi les autres. Tous ont l’intime conscience que ce jour est d’abord celui de notre grand rendez-vous avec D.ieu. Alors que la nouvelle année a commencé, que nous avons d’ores et déjà vécu l’appel du Chofar à Roch Hachana, tout a un sens plus profond, renouvelé. Dans toutes les synagogues, il y a, en ce jour, une atmosphère particulière. Comme si une certaine sainteté, d’habitude ensevelie sous le quotidien, réapparaissait, belle et puissante comme au premier jour des hommes. En ce jour de Yom Kippour, elle flotte dans l’air que l’on respire, elle pénètre les attitudes et les actes de chacun, elle est le bel ornement de synagogues pleines.
Car c’est dans les synagogues que, à ce moment, tout semble plus beau. Côte à côte sont assis celui qui découvre les mots de la prière et celui qui en est familier, le délicat érudit et l’enthousiaste nouveau-venu. Et aussi celui que seule l’essence du jour a conduit là mais qui ne cèderait sa place pour rien au monde. Tous ensemble, plus unis que pourrait le laisser croire leur apparence extérieure, ils forment ce que l’on appelle du beau nom de « communauté ». C’est bien ce qu’ils constituent : un lieu de partage, une unité de vie. C’est bien peu de dire qu’à Yom Kippour, tout un chacun y a sa place. Fondamentalement, chacun est indispensable. Car il s’agit bien là de créer comme une dynamique nouvelle faite de l’addition de tous ces mouvements individuels de l’âme.
Y a-t-il une journée plus propice à un tel projet que Yom Kippour ? Ce n’est évidemment pas en vain, ni pour un artificiel effet de style, que les Sages ont qualifié ce jour de « unique de l’année ». Le lien avec D.ieu, l’attachement de notre âme existent constamment mais, à ce moment, personne ne peut les ignorer. Chacun en ressent à la fois l’appel et la puissance. Nous rêvons tous d’une année merveilleuse, pour nous-mêmes, nos familles, le monde entier. Nous espérons ardemment que cette année 5778 voit le couronnement des efforts millénaires, l’avènement du temps éternel, la venue de Machia’h. Alors que revient Yom Kippour, nous savons que nos rêves sont à portée de notre main. Car Yom Kippour est un jour de vie pour une année, une éternité de vie.


 L’abattage du mauvais penchant

Le Talmud enseigne (traité Souccah 52a) que « dans les temps futurs (à l’époque messianique), D.ieu amènera le mauvais penchant et l’abattra ». Le terme hébraïque employé pour « abattage » étant celui de « Che’hita » qui désigne l’abattage rituel d’un animal, on comprend que l’idée est, ici, très forte.

En fait, le concept de « Che’hita » a pour sens, dans ce contexte, l’élimination de la partie mauvaise du penchant en question comme cette opération, dans son sens premier, a pour effet d’éliminer le sang de l’animal. Ne restera alors que l’aspect positif des choses : le mauvais penchant aura été transformé en un « ange de sainteté ».

(d’après Kéter Chem Tov, 265)


 Yom Kippour

Yom Kippour se distingue, dans le calendrier juif, par maints aspects. Le fait que ce soit un jour plus élevé encore que les autres fêtes est souligné par le service très particulier qui était conduit dans le Temple, uniquement à cette occasion. C’était le seul jour où le Cohen Gadol, le Grand Prêtre, avait la permission de pénétrer le lieu le plus saint du Temple et du monde entier: le Kodèch Hakodachim, le Saint des Saints.

Qu’y faisait-il ? Il ne priait pas, n’offrait pas de sacrifice. Le service, dans le Kodèch Hakodachim consistait en l’offrande des Ketorèt : des encens incandescents.

Cela peut paraître étonnant. En effet, il aurait semblé plus adéquat de conduire un service lié à l’offrande des sacrifices. Ceux que l’on pratiquait dans le Temple s’effectuaient avec des produits cachères, animaux ou farine, par exemple. Or, les encens étaient en partie constituées de produits non cachères et en outre, l’une des essences que l’on utilisait laissait une odeur très désagréable. En conséquence, parmi les onze épices utilisées pour les encens, l’une provenait d’un animal non cachère et l’autre avait un parfum très déplaisant.

N’aurait-il pas été plus approprié d’utiliser des ingrédients entièrement cachères et bons pour le service opéré lors du jour le plus saint, dans le lieu le plus saint et par l’un des êtres les plus saints du Peuple juif ?

Et pourtant c’est de là-même que se dégage l’une des clés les plus importantes du jour de Yom Kippour.

Yom Kippour marque la fin des Dix Jours de Techouva, que l’on a l’habitude d’appeler Dix Jours de Repentance, au cours desquels les Juifs se repentent de leurs mauvaises actions. Cependant, le véritable sens du mot Techouva, n’est pas « repentance » mais « retour », retour vers son essence véritable, vers son âme sainte.

Lorsqu’arrive Yom Kippour, celui qui a, à son acquis, un certain nombre de mauvaises actions, possède certains avantages dans son niveau de Techouva, par rapport à celui qui n’a jamais failli.

Lorsqu’il ressent qu’il s’est éloigné de D.ieu, cela suscite en lui un élan supplémentaire qui le pousse à sortir de sa situation présente et à se rapprocher davantage de Lui. Celui qui n’a jamais péché ne ressent pas cette soif puisque ses besoins spirituels ont toujours été exaucés.

Celui qui se trouve au milieu d’un désert ressent la soif et jaillit en lui un désir profond de satisfaire ses besoins.

De la même façon, celui qui se trouve dans un désert spirituel est envahi d’une urgence impérative à fuir ce lieu et se rediriger dans la voie adéquate. Quand il y parvient, il atteint une élévation que la personne dénuée de tous péchés ne peut atteindre. En effet, la pratique de la Torah et des Mitsvot qu’il adopte est supérieure à celle de celui qui n’a jamais agi de manière inappropriée.

Celui-là ne fait que continuer dans le chemin qu’il a toujours emprunté.

Mais celui qui revient, après s’être perdu dans des chemins éloignés, possède désormais un enthousiasme supplémentaire, pour se rapprocher de ce dont il a toujours manqué, et adopte une adhésion encore plus ferme à la Torah et aux Mitsvot.

Et c’est pour cette raison que nos Sages déclarent que : « le niveau qu’un Baal Techouva (celui revient au Judaïsme) atteint, un Tsaddik (Juste), même parfait, ne peut jamais l’atteindre ».

Le Baal Techouva, grâce à ses regrets, ses remords et son désir ardent, voit ses péchés se transformer en Mitsvot. Puisque ses péchés lui ont permis d’accomplir les Mitsvot qu’il n’avait pas voulu (ou pu) faire, ce sont eux qui sont à l’origine de ses Mitsvot et ils sont donc considérés eux-mêmes comme des Mitsvot, après qu’ils ont été transformés.

C’est pourquoi il est supérieur au Tsaddik qui, certes, possède toutes les Mitsvot qu’il peut accomplir, mais n’a pas eu l’opportunité de ces Mitsvot supplémentaires, nées de la transformation des péchés.

Telle est l’idée que l’on retrouve dans les encens de Yom Kippour. L’on utilisait un ingrédient à l’odeur désagréable et un ingrédient issu d’un animal non cachère.

Il est bien évident que lorsque l’on considère le domaine de l’action, il est invraisemblable de se livrer à un péché dans l’idée de se repentir plus tard et de parvenir à un niveau supérieur.

Mais la Torah fait allusion au fait que, s’il se trouve qu’une personne ait erré et par la suite se soit reprise, ce mal est transformé en bien.

C’est la raison pour laquelle dans les encens eux-mêmes se trouvaient les deux ingrédients dont on a parlé et tout particulièrement une substance non cacher. Cette substance non cachère était nécessaire pour compléter les encens et permettre ainsi qu’on puisse les offrir dans le Saint des Saints et apporter le pardon et le rachat au Peuple juif tout entier.


 Que fait-on à Yom Kippour (cette année samedi 30 septembre 2017) ?

Dans la semaine qui précède Yom Kippour, on procède aux « Kapparot » : on fait tourner autour de sa tête trois fois un poulet vivant (ou un poisson, ou une somme d’argent multiple de 18) en récitant les versets traditionnels ; puis on donne le poulet (ou le poisson ou la valeur monétaire) à une institution charitable.

La veille de Yom Kippour (cette année vendredi 29 septembre 2017), on a coutume de demander au responsable de la synagogue du gâteau au miel, symbole d’une bonne et douce année. Jusqu’à la fin du mois de Tichri, on ne récite plus de Ta’hanoun (supplications).

Il est d’usage que les hommes se trempent au Mikvé (bain rituel), si possible avant la prière de Min’ha. On met les vêtements de Chabbat. Après la prière de Min’ha, on prend un repas de fête, sans poisson ni viande, mais avec du poulet.

Après le repas, les parents bénissent les enfants et leur souhaitent d’aller toujours dans le droit chemin.

Le jeûne de Yom Kippour commence à 19h 15 (horaire de Paris).

On ne récite pas le Kiddouch à Yom Kippour, même quand cela tombe un Chabbat.

Après avoir mis des pièces à la Tsedaka, les femmes mariées allument au moins deux bougies avant 19h15, horaire de Paris (les jeunes filles et petites filles allument une bougie) et récitent les deux bénédictions suivantes :

1) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chel Chabbat Vechel Yom Hakipourim » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous a sanctifié par Ses Commandements et nous a ordonné d’allumer la lumière de Chabbat et de Yom Kippour ».

2) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous a fait vivre, qui nous a maintenus et nous a fait parvenir à cet instant ».

Il est d’usage d’allumer également une bougie qui dure au moins vingt-cinq heures et sur laquelle on récitera la bénédiction de la « Havdala » à la fin de la fête. On allume aussi des bougies de vingt-cinq heures à la mémoire des parents disparus.

On enlève les chaussures en cuir et on met des chaussures en toile ou en plastique. Les hommes mariés mettent le grand Talit et le « Kittel » (vêtement rituel blanc).

Tout Yom Kippour, on récite la deuxième phrase du Chema Israël (« Barou’h Chem… ») à voix haute. Il est interdit de manger, de boire, de s’enduire de crèmes ou de pommades, de mettre des chaussures en cuir, d’avoir des relations conjugales et de se laver (sauf si on s’est sali ; de même, on se lave les mains pour des raisons d’hygiène). On passe la journée à la synagogue. Toutes les interdictions de Chabbat s’appliquent à Yom Kippour.

Ce samedi matin, on ne récite pas la bénédiction : « Cheassa Li Kol Tsorki » (« Qui veille pour moi à tous mes besoins ») car on ne porte pas de vraies chaussures.

Les malades demanderont au médecin et au Rabbin s’ils doivent jeûner ou non.

A la fin du jeûne, on écoute la sonnerie du Choffar.

Après Yom Kippour, on se souhaite mutuellement « Hag Saméa’h ». Si possible, on prononce la bénédiction de la lune. On récite la prière de la Havdala (après 20h19, horaire de Paris), on se lave les mains rituellement et on se rince la bouche. Durant le repas qui suit le jeûne, il est d’usage de parler de la construction de la Souccah et, si possible, on commence à construire la Souccah tout de suite après la fête.


 Le businessman et le cardiologue

Depuis longtemps, j’entretenais des relations avec un important homme d’affaires, un Juif du Brésil qui, auparavant, avait adhéré à un parti de gauche et avait été en son temps un grand ami de Shimon Peres. Au fil des ans, ses opinions évoluèrent. Cela commença quand son fils se rapprocha de la tradition et se mit à pratiquer les Mitsvot : ce qui inquiéta beaucoup le père car il était persuadé que ceux qui suivaient cette voie coupaient les liens avec le monde autour d’eux et surtout leurs familles. Quand je fis sa connaissance et qu’il me fit part de ses craintes, je le rassurai : « Comment pouvez-vous émettre des opinions sur le judaïsme orthodoxe quand vous-même n’avez jamais côtoyé ce milieu ? Venez, étudions et ainsi vous comprendrez de quoi il s’agit ! »

Il accepta et, au fur et à mesure que nous approfondissions les textes et les discussions, il comprit davantage de concepts fondamentaux. Pourtant un jour, il affirma : « Je ne parviens pas à comprendre comment un D.ieu aussi grand peut s’intéresser à des sujets aussi futiles que le trajet d’une feuille qui tombe d’un arbre… »

En effet, je lui avais expliqué ce que déclarait le Baal Chem Tov : même lorsqu’une feuille tombe d’un arbre, D.ieu en connaît toutes ses circonvolutions et prévoit exactement son point de chute afin qu’elle puisse protéger un petit ver des intempéries… Cela, il ne l’acceptait pas ! Que D.ieu ait créé le monde, ait donné la Torah et s’intéresse aux grandes questions de l’humanité, pourquoi pas ? Mais la Providence Divine qui s’exerce véritablement sur chaque détail de la Création… ? Non !

Plutôt que de perdre du temps à tenter de le convaincre, je préférai cesser la discussion et avancer dans notre étude.

Cet homme d’affaire pria dans notre synagogue à Roch Hachana ; pour Yom Kippour, il pria dans celle de Westport, dans le Connecticut. Après Sim’hat Torah, il tint à me raconter un incident qui lui était arrivé mais à une condition : que je ne m’exclame pas « je vous l’avais bien dit ! » J’ai promis et voici donc son récit :

« L’année dernière, j’avais voulu prier dans la même synagogue que ma famille. J’avais téléphoné à mon fils qui, lui, était devenu pratiquant et il avait accepté à condition que ce soit une synagogue orthodoxe. Cela ne me posait pas de problème, l’essentiel étant à mes yeux que nous soyons tous ensemble. Cette année, nous irions avec lui, l’année prochaine, il viendrait avec nous…

L’après-midi avant Yom Kippour, à la sortie de mon travail, j’ai téléphoné à mon fils pour lui annoncer : « J’espère que tu ne m’en voudras pas, j’ai invité un de mes amis à venir avec nous à la synagogue ; c’est un cardiologue. »

Nous avons donc pris la voiture en direction de la synagogue. Mais nous nous sommes perdus en route : mon fils s’inquiétait ! Le soleil allait bientôt se coucher ! Soudain, nous avons remarqué à un feu rouge que la voiture arrêtée à côté de nous était conduite par un homme portant la Kippa. Il ne connaissait pas la synagogue où nous voulions aller mais nous proposa l’adresse d’une autre synagogue, orthodoxe elle aussi, plus proche.

A notre arrivée dans cet endroit inconnu, nous avons été très bien accueillis. Nous avions à peine commencé l’office de Kol Nidré et soudain, nous avons entendu un grand cri : l’un des fidèles était victime d’une grave crise cardiaque ! Mon ami le cardiologue se précipita vers lui pour lui prodiguer les premiers soins en attendant l’ambulance qui l’emmena à l’hôpital.

Dans la salle d’attente des urgences, j’ai fait remarquer à la femme du patient : « Quand je rentrerai chez moi, j’appellerai mon rabbin pour lui raconter ce qui s’est passé et il me dira sûrement : je vous avais prévenu ! La Providence Divine existe ! ».

Mais ce n’est pas la fin de l’histoire. Cette année aussi, notre businessman a prié chez nous à Roch Hachana et, à Yom Kippour, dans le Connecticut. Les membres de la famille avaient décidé de retourner là où ils avaient prié l’année précédente. En emmenant à nouveau le cardiologue. Dès leur arrivée, l’homme qui avait subi la crise cardiaque s’avança vers eux pour remercier le spécialiste de lui avoir sauvé la vie et son épouse déclara alors : « Vous souvenez-vous que, dans la salle d’attente, vous m’aviez raconté avoir rencontré à un feu rouge un homme au volant d’une voiture avec une Kippa sur la tête ? J’étais curieuse de savoir qui était l’homme qui, sans le savoir, avait contribué à sauver mon mari. Et voici ce que j’ai découvert après avoir mené ma petite enquête : ce n’était autre que mon fils aîné ! Il avait décidé d’aller prier dans une autre ville avec des amis. Donc, de fait, D.ieu a permis à mon fils d’envoyer un cardiologue dans cette synagogue pour sauver son père ! »

Le cardiologue qui avait suivi la conversation s’est retourné vers mon ami le businessman en remarquant : « Qu’allez-vous raconter maintenant à votre rabbin ? » 

En me rapportant ces faits, l’homme déclara : « J’ai bien compris la leçon ! J’admets que la Providence Divine existe ! J’en ai eu une preuve éclatante ! » Et il ajouta :

- Cela me donne envie d’accomplir une bonne action : une proposition ?

- Vous en voulez à votre fils qui s’est rapproché de la pratique religieuse et vous prétendez qu’il est devenu borné… Laissez-le vivre sa vie, vous voyez bien que c’est D.ieu qui dirige le monde !

Depuis ce jour, le fils vécut en bonne entente avec ses parents. Il se fiança avec une jeune étudiante de l’université de Miami qui, elle-même, s’était rapprochée de la Torah grâce à mon fils Mendel (le Chalia’h de cet établissement prestigieux) et ils ont fondé un véritable foyer ‘hassidique ouvert à tous.

Rav Yaakov Fellig – Floride – Moussaf Pessa’h de Kfar Chabad

Traduit par Feiga Lubecki

Publié dans 2017

 Roch Hachana : le moment du choix

Roch Hachana est là et chacun de nous se trouve devant un choix essentiel à opérer. Car le monde autour de nous est loin d’être simple. Ne nous donne-t-il pas à voir bien des motifs de crainte, bien des raisons d’inquiétude ou d’insatisfaction, personnelle ou collective ? Ne nous propose-t-il pas bien des modèles aux antipodes de nos espérances ? Nous pouvons alors choisir de fermer les yeux, de rester enfermés dans la prison de nos peurs, de nos ressentiments ou de notre désespoir, victimes passives des circonstances. Ou bien profiter de cette occasion pour nous envoler, nous aligner avec notre destinée, apprendre à être libres.

La liberté est un concept très noble mais elle se vit dans les choix que nous faisons à chaque instant. Dans nos relations, dans notre spiritualité, dans notre engagement à vivre une vie de joie, d’accomplissement. Dans notre conscience de la présence de D.ieu dans les détails les plus intimes de notre vie. Dans le souvenir que nous sommes là pour un but et qu’il nous faut faire chaque jour quelque chose qui donne du sens à ce but.

Si nous pouvions créer un nouveau futur, débarrassé de nos craintes et de nos erreurs passées, quel serait-il ? Comment nous comporterions-nous ? Qu’oserions-nous créer ? Qui remercierions-nous ? Qui écouterions-nous et que partagerions-nous ? Que ferions-nous pour embellir notre relation avec D.ieu et avec notre propre essence ? Quelle partie de nous-mêmes abandonnerions-nous et laquelle nourririons-nous ? Lesquels de nos rêves se réaliseraient-ils ?

Roch Hachana renferme une puissance considérable. Il nous est enseigné qu’à ce moment la lumière Divine, nécessaire à l’existence du monde et qui le pénètre, qui a soutenu la création toute l’année passée, est épuisée. C’est une lumière nouvelle qui doit à présent descendre dans le monde et dans notre vie pour animer l’avenir. C’est dire qu’en ce jour tous les possibles s’étendent devant nous. Le Livre est ouvert. Qu’allons-nous choisir ?

C’est de ce choix premier que tout va découler. Il faut savoir l’affirmer au son du Chofar. Il faut savoir le porter en cœur et en tête. Il faut le vivre pleinement. Tout est possible a-t-on dit. Et tout dépend de nous. Pour une année 5778 couronnée de joie, de bénédictions… et de Délivrance.


 « D.ieu sera Un et Son Nom sera Un »

Le prophète Zacharie (14:9) enseigne au sujet du temps de Machia’h : «En ce jour, D.ieu sera Un et Son Nom sera Un». Il est clair que l’unité de D.ieu est un fondement du judaïsme mais pourquoi lier la révélation de cette idée à la venue de Machia’h ?

C’est qu’en notre temps, l’unité divine n’apparaît pas à l’évidence. Le monde paraît constituer une existence autonome. Au contraire, dans le monde de Machia’h, l’unité du Créateur sera manifeste aux yeux de tous. Chacun verra que le monde est inexistant devant la lumière divine qui le fait vivre.

(d’après Torah Or, Vaéra p. 55c)


 Roch Hachana

Le Choffar : au-delà des mots

L’une des Mitsvot les plus importantes associées à Roch Hachana est celle de sonner du Choffar. Le Baal Chem Tov explique ce commandement et ce qu’il suscite à Roch Hachana par la parabole suivante.

Il arriva que le fils d’un roi partît très loin du palais de son père et de son lieu de naissance. Peu à peu, il s’éloigna des voies que son père avait tracées pour lui et il perdit toutes ses ressources et toute trace de royauté dans son comportement. Son état se détériora à tel point que finalement, quand il décida de revenir au palais royal, il était vêtu de haillons et dans un état pitoyable. Arrivé aux grilles du palais, il supplia qu’on le laisse pénétrer, clamant qu’il était le prince royal.

Mais après tant d’années d’éloignement, il avait même oublié sa langue natale et ne pouvait plus se faire comprendre. Bien entendu, les gardes lui interdirent l’accès du palais. Il se mit alors à gémir et à pousser des cris sans paroles, ce que le Baal Chem Tov exprime par « une simple voix », des sons déformés.

A l’intérieur du palais, quand son père entendit ces sons, il reconnut la voix de son fils. Il le fit entrer dans le palais, le lava, le revêtit d’habits royaux, le nourrit et le fit peu à peu réintégrer l’apparence et le statut dignes du fils du roi.

Cette analogie paraît cependant assez troublante.

Bien que Roch Hachana soit le Jour du Jugement pour toutes les bénédictions matérielles et spirituelles de l’année à venir, ce jour est bien différent de Yom Kippour.

A Yom Kippour, nous récitons Al ’Hèt, prière de contrition. Nous confessons nos mauvaises conduites de l’année passée.

A Roch Hachana, comme nous pouvons l’observer dans la liturgie de ce jour, nous évitons soigneusement de mentionner tous péchés ou mauvaises actions.

Or, dans cette parabole rapportée par le Baal Chem Tov, grande mention est faite des mauvaises conduites du prince, au point qu’en s’éloignant tant du palais, il en ait même oublié la langue, indiquant de sa part un comportement pour le moins inadéquat.

Mais en y portant un regard plus attentif, nous observons que non seulement cela n’est pas un comportement indésirable mais que, bien au contraire, il met en lumière les qualités exceptionnelles du fait de sonner du Choffar.

Roch Hachana est le moment qui permet au Juif de restaurer et de renforcer le lien qui l’unit à son Créateur. Ce lien est celui de l’essence, l’essence de la pure âme juive avec l’essence de son Créateur. Cette attache est inconditionnelle, éternelle et au-delà de toute expression verbale. La seule chose qui manque est l’expression extérieure, ouverte et dévoilée de ce lien, sa révélation.

Pour y parvenir, cependant, le langage est insuffisant. Il ne s’agit pas seulement du fait que les mots ne permettent pas de révéler cette relation mais les mots eux-mêmes font obstacle à la révélation d’un tel sentiment. Les mots, l’intellect ou même les émotions sont une expression limitée de cette essence. Ils l’empêchent de se dévoiler.

Le Juif, à Roch Hachana doit lui-même réaliser qu’il s’est éloigné du roi. Cette prise de conscience fait jaillir ce qu’il a de plus profond en lui, son essence intime qui est au-delà de toute expression verbale.

Telle est la signification de ce détail dans la parabole : le fils du roi a atteint le niveau où il a même oublié sa langue natale.

Il a atteint le niveau où le langage n’interfère plus.

Il a atteint le niveau où son essence se révèle. Il n’y a plus de langage. En transcendant le langage, il exprime son essence.

Telle est la signification profonde de la Mitsva du Choffar. Par les sons primitifs et gutturaux qui sortent de la corne d’un animal, du Choffar, nous exprimons et révélons ce qu’il y a de plus profond, de plus sacré en nous, notre essence et par là, nous suscitons la réponse de l’essence de D.ieu qui apporte avec elle toutes les bénédictions pour l’année à venir, qu’elles soient dans le domaine spirituel ou dans nos besoins matériels.

La grenade : une antidote

Une tradition bien connue veut qu’à notre table de Roch Hachana, nous consommions une grenade.

Des explications variées sont données pour cette coutume et l’une d’entre elles se réfère à une histoire relatée dans le Talmud.

Rabbi Méir, l’un des grands Sages du Talmud, avait un maître qui devint hérétique. Et malgré ce fait, Rabbi Méir continua à se rendre chez lui pour étudier. Les gens lui demandèrent : « pourquoi étudies-tu avec un hérétique ? ». Il répondit : « Eh bien, c’est comparable au fait de manger une grenade. Quand vous mangez une grenade, vous enlevez la peau et vous pouvez jouir des graines juteuses. Quand je me rends chez mon maître, A’hèr, et que j’étudie avec lui, j’enlève la peau, son comportement de pécheur, et je me délecte des graines juteuses, des enseignements précieux qu’il a à offrir. »

A Roch Hachana, nous nous tournons vers D.ieu et lui demandons, quand Il nous regarde, d’enlever notre enveloppe pleine de péchés et de regarder le bien profond qui se trouve en chacun de nous.

Mais peut-être Rabbi Méir possédait-il la connaissance profonde de ce qu’il y a à l’intérieur de la grenade, connaissance à laquelle nous venons d’accéder, il n’y a que quelques années. La grenade possède une quantité inhabituelle d’antioxydants. Et ces antioxydants sont extrêmement puissants pour combattre les radicaux libres (extrêmement nocifs dans notre organisme) qui circulent dans notre système sanguin.

Peut-être Rabbi Méir avait-il compris que la grenade est le symbole d’un thème fondamental de Roch Hachana : se débarrasser de nos radicaux libres spirituels en se liant plus profondément à notre essence, l’étincelle de D.ieu, la Nechama, que D.ieu a placée en chacun de nous. Car cela nous relie à notre essence profonde et à notre source, D.ieu Tout-Puissant.

Peut-être Rabbi Méir avait-il vu que l’antidote à nos radicaux libres spirituels est la leçon tirée de la grenade.


 Que fait-on la veille de Roch Hachana (cette année mercredi 20 septembre 2017) ?

On ne récite pas le Ta’hanoun. On ne sonne pas le Choffar, afin de marquer la différence entre la coutume (du mois d’Elloul) et l’obligation (de Roch Hachana).

En présence de dix hommes (ou éventuellement trois hommes), chacun récite le texte de « Hatarat Nedarim », l’annulation des vœux, afin de ne pas commencer la nouvelle année tant qu’on n’aurait pas accompli tout ce qu’on a promis l’année précédente : en effet, à Roch Hachana, chacun promet de mieux faire. Mais quelle serait la valeur d’une telle promesse si on n’a pas tenu les promesses de l’année précédente ?

Les hommes se coupent les cheveux, s’immergent dans le Mikvé. On revêt les vêtements de fête car on est confiant que D.ieu jugera chacun avec miséricorde.

On augmente les dons à la Tsedaka (charité) en s’assurant que chacun a de quoi faire face aux dépenses de la fête.

Nombreux sont ceux qui se rendent au cimetière sur les tombes des êtres chers disparus et des Tsadikim (Justes) afin qu’ils intercèdent en faveur de leurs descendants et de leurs fidèles.

On procède au Erouv Tavchiline (voir Sidra de la Semaine dernière) afin de pouvoir cuisiner avant Chabbat Haazinou qui suit immédiatement la fête.

Que fait-on à Roch Hachana ?

Mercredi 20 septembre 2017, après avoir mis des pièces à la Tsedaka (charité), les femmes, les jeunes filles et les petites filles allument les bougies de Roch Hachana ainsi qu’une bougie qui dure au moins 48 heures (avant 19h34, horaire de Paris) avec les bénédictions suivantes :

1) : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Ner Chel Yom Hazikarone » ; et (2) : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé ».

(« Béni sois-Tu Eternel notre D.ieu Roi du monde qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné d’allumer les lumières du jour du souvenir. Béni sois-Tu Eternel notre D.ieu Roi du monde qui nous a fait vivre, exister et arriver à cet instant »).

Après la prière du soir, on se souhaite mutuellement : « Lechana Tova Tikatev Veté’hatème » - « Sois inscrit(e) et scellé(e) pour une bonne année ». Après le Kiddouch, on se lave les mains rituellement et on trempe la ‘Hallah dans le miel (et ce, jusqu’à Hochaana Rabba, mercredi 11 octobre inclus).

Ensuite on trempe un morceau de pomme douce dans le miel, on dit la bénédiction : « Haètz » et on ajoute : « Yehi Ratsone Milfané’ha Chete’hadèche Alénou Chana Tova Oumetouka » (« Que ce soit Ta volonté de renouveler pour nous une année bonne et douce »). Durant le repas, on s’efforce de manger de la tête d’un poisson, des carottes sucrées, une grenade et, en général, des aliments doux, pas trop épicés, comme signes d’une bonne et douce année.

Jeudi soir 21 septembre, les femmes, les jeunes filles et les petites filles allument les bougies de la fête (après 20h35, horaire de Paris) à partir de la flamme allumée avant la fête, avec les mêmes bénédictions que la veille.

On aura auparavant placé sur la table un fruit nouveau, qu’on mangera après le Kiddouch, avant le repas.

Jeudi 21 et vendredi 22 septembre, on écoute la sonnerie du Choffar. Si on n’a pas pu l’entendre à la synagogue, on peut encore l’écouter toute la journée.

Jeudi après-midi, après la prière de Min’ha, on se rend près d’un cours d’eau et on récite la prière de Tachli’h.

Durant les deux jours de Roch Hachana, on évite les paroles inutiles et on s’efforce de lire de nombreux Tehilim (Psaumes).

Il est permis de porter des objets dans la rue les deux jours de Roch Hachana.

Jusqu’à Yom Kippour inclus, on ajoute dans la prière du matin le Psaume 130 et on récite matin et après-midi (sauf Chabbat) la prière « Avinou Malkénou » (« Notre Père, notre Roi »). On ajoute certains passages de supplication dans la prière de la « Amida ». On multiplie les actes de charité et, en général, on s’efforce d’être davantage scrupuleux dans l’accomplissement des Mitsvot.

Dimanche 24 septembre, c’est le jeûne de Guedalia (qui commence, à Paris, à 6h06 et s’achève à 20h23).


 La panne de Roch Hachana

3 heures du matin

Mon bébé se réveille en pleurant : il a attrapé un mauvais rhume et n’arrive pas à se calmer. Je le prends dans mes bras, je tente de le réconforter, je chantonne doucement. Dehors, j’entends la pluie qui commence à tomber puis, d’un coup, sans crier gare, la lumière s’éteint. Je n’ai pas entendu le bruit caractéristique du court-circuit qui se produit de temps en temps dans notre appartement. Je suppose que la lumière s’est éteinte à cause de la pluie, comme cela arrive de temps en temps à Rome, notre ville, la capitale italienne. Un coup d’œil par la fenêtre me confirme que la panne affecte au moins tout le quartier, si ce n’est toute la ville puisqu’aucune lumière ne filtre du dehors. La pluie ? Un problème d’approvisionnement de la compagnie d’électricité ? Peu importe pour le moment, on ne voit absolument rien. Je tiens mon bébé dans les bras mais je ne le vois même pas. Je commence à comprendre ce que les Égyptiens avaient ressenti lors de la neuvième plaie, celle de l’obscurité ; plus près de nous, je remercie D.ieu qui m’a donné des yeux et je plains silencieusement les aveugles condamnés à subir cette situation jour et nuit.

Mon fils se met à balbutier : « mière, mière » pour demander la lumière. Mon mari se dirige à tâtons vers la cuisine : il y trouve une bougie et parvient à l’allumer grâce à la flamme qui est restée allumée sur la cuisinière pour nous permettre de réchauffer les plats pendant la fête de Roch Hachana. Avec précaution, il rapporte cette bougie qui nous permet maintenant de nous sentir plus à l’aise dans notre environnement familier : « Et la lumière fut ! » nous dit la Torah et ces mots prennent tout leur sens. Jamais la bénédiction de cet élément fabuleux qu’est la lumière ne m’a semblée plus importante.

Mon fils se calme, retrouve ses repères et finit par se rendormir. Je continue à le bercer machinalement tout en contemplant la flamme de la bougie qui danse gaiement. Si petite mais capable d’éclairer toute une pièce… ou comme le font remarquer nos Sages : « Un peu de lumière repousse beaucoup d’obscurité ». Alors qu’auparavant, tout n’était que néant et même appréhension, la petite bougie a apporté paix et tranquillité. Si seulement chacun d’entre nous produisait au moins un peu de lumière, en effectuant une bonne action, quelle qu’elle soit, nous pourrions nous débarrasser de tant d’obscurité et faire de ce monde un endroit où la vie serait vraiment meilleure.

Juste avant de me rendormir, j’ai le temps de réaliser combien nous avons de la chance que les lumières se soient éteintes pendant Roch Hachana, l’anniversaire de la Création du monde : cela me donne une vague idée de ce que pouvait être le monde avant qu’il ne soit créé si on peut s’exprimer ainsi…

9h30

L’électricité n’est pas revenue et je commence à m’inquiéter sérieusement pour les montagnes de nourriture que j’ai stockées dans le congélateur : durant des jours et des semaines, j’ai acheté, préparé, cuisiné, emballé, congelé pour notre petite famille mais aussi pour tous nos invités… Le préposé à la sécurité de notre synagogue arrive et nous informe que la panne touche toute l’Italie. C’est surprenant et presque choquant mais, bizarrement, cela ne m’impressionne pas trop : je me sens comme sur une autre planète, dans une autre dimension. Pour la première fois depuis très longtemps, je ressens vraiment Roch Hachana : privée de toute technologie, avec seulement la lumière naturelle du jour qui traverse les nuages gris, je me sens plus proche de D.ieu que je ne l’ai jamais été.

Mais j’ai peur que les gens n’osent pas affronter la pluie et ne viennent pas à la synagogue… Mes craintes sont infondées : comment ai-je pu douter de la détermination de nos fidèles ? Vers onze heures trente, notre petite synagogue est remplie à craquer : plus de cinquante personnes s’y pressent, venues de tous les coins de la ville pour prier avec nous dans notre jeune structure. Ce qui est remarquable, c’est que personne ne parle de la panne ; d’ailleurs personne ne parle du tout, ni les hommes ni les femmes : chacun est concentré sur le texte de la prière, sur l’importance cruciale de cette journée de Roch Hachana. Peut-être chacun ressent confusément comme moi que nous sommes loin des tracas du monde, que nous sommes si proches de notre Père qui, panne ou pas, nous voit, nous écoute et nous aime.

11h55

Nous allons bientôt écouter la sonnerie du Choffar. Et la lumière revient.

Le Choffar symbolise entre autres, notre acceptation du couronnement divin. D.ieu est notre Roi. A Roch Hachana, D.ieu choisit de créer à nouveau le monde, de lui donner une nouvelle chance, de lui octroyer de nouvelles forces. En même temps, nous, humains, nous reconnaissons et nous acceptons le règne de D.ieu sur nous et nous Le couronnons au son triomphant et plaintif à la fois du Choffar.

Quand la lumière revint, mon esprit se mit à réfléchir à toute vitesse. Quel miracle que cette panne ne se soit pas produite un mois plus tôt, en pleine vague de chaleur, quand nous avions tant besoin des ventilateurs et climatisation de toutes sortes ! La vie aurait été insupportable et tant de gens et d’animaux auraient souffert. Cette panne s’est produite à Roch Hachana, un froid dimanche d’automne, quand la plupart des magasins sont fermés, ce qui a considérablement réduit les pertes pour l’économie du pays et ce qui nous a rappelé ce qui est vraiment important en ce jour sacré.

A Roch Hachana, nous supplions D.ieu de nous accorder santé, subsistance, paix dans la famille et dans la société en général afin de pouvoir mieux accomplir nos devoirs envers Lui et envers notre prochain. Mais que Lui accordons-nous de notre côté ? Cette panne de Roch Hachana m’a appris que le plus beau cadeau que nous puissions Lui offrir – et nous offrir – c’est une petite bonne action, cette petite lumière qui repousse tant d’obscurité.

Et nous en sommes capables !

‘Hannie Benjaminson - chabad.org

Traduite par Feiga Lubecki

Publié dans 2017

 Quand le monde fut créé…

Alors que nous approchons de Roch Hachana à vive allure et que l’atmosphère est emplie de cette sensation d’attente si particulière aux jours qui arrivent, voici que nous traversons, presque sans y prendre garde, la date du 25 Elloul. Moins d’une semaine avant nos rendez-vous spirituels majeurs, ce Chabbat, c’est de l’anniversaire de l’univers qu’il s’agit puisque cette date fut le premier jour de la création. Beaucoup a été dit sur le fait que Roch Hachana, début de tout, ait été fixé au jour anniversaire de la création de l’homme et non à celui de la création du monde. Ce choix de D.ieu souligne, s’il en était besoin, le rôle essentiel de l’homme, créature qui donne sens à l’ensemble.

Pourtant, ce premier jour de l’existence de l’univers garde un caractère profondément bouleversant. Avant qu’il arrive, disent nos textes, D.ieu est l’existence unique. Il choisit donc, à ce moment, de – pour ainsi dire – restreindre Sa présence afin que le créé puisse se percevoir comme une entité autonome. Cette véritable « contraction » de la lumière Divine ouvre ainsi un espace à l’action des créatures et à leur liberté. Cependant, il ne faut pas s’y tromper : l’Existence qui soutient toutes les autres est bien celle du Créateur. Pour reprendre les termes de Maïmonide, D.ieu est « l’Existence première et de Lui proviennent toutes les existences… S’Il n’existait pas, rien n’existerait… » C’est dire que la création ne cache la lumière Divine que devant notre conscience et qu’il nous appartient de déchirer ce voile.

Justement, le 25 Elloul, alors que l’univers revit le jour de sa création, il nous est donné de prendre la pleine mesure de cette réalité. Il est enseigné que « l’homme est l’associé de D.ieu dans l’œuvre de création ». Cela implique que son rôle est réel et constant, comme la création même. Cela veut dire aussi qu’il prend sa place complète lorsqu’il assume sa noble condition. En substance, cela revient à dire qu’il nous faut faire vivre l’œuvre Divine en n’oubliant jamais qu’au cœur de la création ne se trouve que le Créateur. Et même si le monde a repris son tumulte quotidien, toute trêve terminée, chacun est capable de faire que le vacarme social n’éteigne pas la voix intérieure qui n’est autre que celle de son âme.

En cette période où nous espérons une nouvelle année bonne et douce, un chemin nous est tracé. Comprendre, reconnaître, savoir : les maîtres mots de la conscience pour une vie de bonheur et de grandeur.


 « Pleine de rire »

Evoquant le temps de Machia’h, les Psaumes (126 : 2) annoncent : «Alors, notre bouche sera pleine de rire». Il faut souligner que ce rire-là a un sens et une motivation profondes.

En effet, la valeur numérique du mot «rire» en hébreu est de 414. C’est aussi celle des mots «Or Ein Sof» qui signifient « Lumière Infinie » et font référence à l’Essence Divine. Cette équivalence indique que la signification véritable de ce « rire » est la révélation de D.ieu.

(d’après Likoutei Torah, Bamidbar, p. 19d)


 Nitsavim-Vayélè’h

La Paracha Nitsavim comporte certains des principes fondamentaux de la foi juive.

L’unité d’Israël : nous nous tenons tous devant D.ieu, depuis les chefs de tribus jusqu’aux puiseurs d’eau.

La Rédemption future : l’exil et la désolation seront suivis de la réunion de tous sur la terre de nos pères.

La pratique de la Torah : elle nous est accessible, elle est proche de nous et nous avons la capacité de nous y adonner.

Le libre-arbitre : devant nous sont la vie et le bien, la mort et la mal. Marchons dans les voies de D.ieu, gardons Ses commandements, choisissons la vie.

La Paracha Vayélè’h relate les événements du dernier jour de la vie de Moché sur cette terre. Il transfère sa gouvernance à Yehochoua et écrit un rouleau de la Torah qu’il confie aux Léviim afin qu’ils le conservent dans l’Arche de l’Alliance.

On y lit la Mitsva du Hakhel : au cours de la fête de Souccot, lors de l’année qui suit celle de la Chemita, le Peuple entier se réunira au Saint Temple où le Roi lira la Torah.

La Paracha s’achève avec la prédiction que le peuple se détournera de D.ieu Qui cachera Sa face mais également avec la promesse que les mots de la Torah ne seront pas oubliés par ses descendants.

Cette année, les Parachiot de Nitsavim et Vayélè’h sont lues ensemble. Apparemment, elles présentent deux postures diamétralement opposées. Nitsavim signifie « se tenir debout » et, plus précisément, adopter une position forte, droite et constante. Dans son commentaire sur le verset : « Datane et Aviram sortirent Nitsavim », Rachi interprète le terme Nitsavim comme signifiant « se tenant droit ». De la même façon, le livre de Mela’him (1, 22 :48) utilise l’expression Nitsav Mélè’h. Mélè’h signifiant « roi », représente la force ultime, comme le déclarent nos Sages : « La parole du roi déracine des montagnes ».

A l’opposé, Vayélè’h a pour sens « et il alla ». « Aller » est l’antithèse-même de Nitsavim. Cela représente le changement et le progrès. Le véritable sens du progrès est d’abandonner totalement sa position antérieure.

Et pourtant, ce Chabbat, Nitsavim et Vayélè’h sont lues ensemble et considérées comme une seule Paracha.

Cette contradiction apparente peut ainsi se résoudre : les approches de Nitsavim (la fermeté) et de Vayélè’h (le progrès) sont toutes deux nécessaires dans le service de D.ieu. Ce concept s’exprime au tout début du Choul’han Arou’h (Code de Lois Juives). Son premier statut est : « Yehouda ben Teima déclare : ‘Sois effronté comme un léopard, léger comme un aigle, rapide comme une biche et fort comme un lion, pour accomplir la volonté de ton Père dans le Ciel’ ». « Effronté comme un léopard » et « fort comme un lion » représentent l’approche de Nitsavim alors que « léger comme un aigle » et « rapide comme une biche » celle de Vayélè’h.

Bien qu’il paraisse difficile qu’une même personne puisse entreprendre ces deux sortes d’approches, une telle combinaison est possible dans le service de D.ieu. Le Sifri écrit qu’en général il est impossible d’avoir de « l’amour à la place de la crainte ou de la crainte à la place de l’amour ». Cependant, c’est une Mitsva d’aimer et de craindre D.ieu, tout à la fois.

De la même façon, les deux types de services mentionnés plus haut sont accessibles au même individu. Toutefois, parce que cela est difficile, on les accomplit généralement à des moments différents. (C’est pour cette raison que très souvent Nitsavim et Vayélè’h sont lues lors de deux semaines différentes).

Mais le niveau ultime du service divin permet de les combiner lorsqu’on s’y adonne complètement. La ‘Hassidout explique que lorsqu’un serviteur s’investit totalement dans le service de son maître, les forces de son maître deviennent siennes. Il en va de même dans le service divin d’un Juif. A ce niveau d’investissement, les forces de son maître, D.ieu, deviennent les siennes.

D.ieu a le potentiel de combiner les contraires. Ainsi ce potentiel se reflète-t-il dans l’individu et il est à même d’unifier ces deux services en un seul.

Cette idée peut se clarifier dans les termes de l’explication de la différence d’opinion entre Rabbi Akiva et Rabbi Ichmaël à propos de la réponse du Peuple juif aux Dix Commandements. Rabbi Ichmaël maintient que les Juifs répondirent « oui » aux commandements positifs et « non » aux commandements négatifs. Rabbi Akiva, quant à lui, soutient qu’ils répondirent « oui » à tous les commandements, ce qui impliquait un engagement à se conformer à la volonté Divine, quelle qu’elle soit.

Rabbi Ichmaël considère la Torah avec la perspective de l’homme. Ainsi un commandement positif requiert un « oui » et un commandement négatif, un « non ».

La position de Rabbi Akiva représente l’état d’un engagement absolu de l’homme à D.ieu. Pour lui, toutes les formes de service sont donc identiques. L’accomplissement des commandements négatifs possède également une intention positive : le service de D.ieu.

Par le même biais, la ‘Hassidout engage à une combinaison des deux sortes de service. D’une part, comme le déclarait le Rabbi précédent, la manière d’établir une relation avec un Rabbi est d’étudier la Torah qu’il étudie.

Par ailleurs, les Rabbis ont toujours mis l’accent sur le commandement d’ « aller ». Aller vers un Juif qui ne connaît pas le Judaïsme ou ignore la ‘Hassidout. La Torah et la ‘Hassidout doivent se diffuser dans soixante-dix langues dans un effort pour atteindre chaque Juif, et leurs enseignements doivent être adaptés de manière à être compris par chaque Juif.

Il est évident que lorsque l’on est impliqué dans le monde et que l’on se bat contre son insensibilité, notre statut personnel change. Cependant, c’est en s’impliquant dans le monde que l’on devient le Chali’ah (émissaire) du Rabbi et comme l’affirment nos Sages : « Un chalia’h est considéré comme l’individu (celui qui l’envoie) lui-même ».

C’est ainsi que la force de Nitsavim et le progrès de Vayélè’h sont réunis en une seule forme de service.

Pratiquement parlant, cela implique que l’on fournisse des efforts dans les Mivtsaïm : Ahavat Israël (l’amour du prochain), ‘Hinou’h (l’éducation), Torah (l’étude de la Torah), Tefilines, Mezouza, Tsedaka (la charité), Bayit Malé Sefarim (une maison remplie de livres de Torah), Néroth Chabbat Kodèch (les bougies de Chabbat), Cacherout, Taharat Hamichpa’ha (les lois de pureté familiale), la rectification de Mihou Yehoudi (la définition de « qui est Juif ? »), l’institution de Kollels (des centres d’étude) pour les hommes plus âgés, pour les femmes, pour les jeunes et également aider les nécessiteux dans leurs besoins. Tout le monde doit sentir que le Rabbi précédent lui adresse directement ces paroles. Ainsi nous entrerons dans cette nouvelle année avec de la joie, confiants que nous l’emporterons dans le jugement et que nous sortirons accueillir Machai’h qui nous conduira à la véritable et complète Rédemption dans l’allégresse et le bonheur.


 Qu’est-ce que les Seli’hot ?

Les Seli’hot sont des prières de supplications qui rappellent les besoins de l’homme mais aussi sa petitesse et ses faiblesses. En récitant les Seli’hot, le Juif procède à une introspection approfondie qui lui permet d’aborder la nouvelle année avec la crainte, l’humilité mais aussi l’assurance et la joie requises.

Dans les communautés ashkénazes et ‘hassidiques, on commence à réciter les Seli’hot à partir du samedi soir précédant (d’au moins quatre jours) la fête de Roch Hachana : cette année samedi soir 16 septembre 2017 vers 1 heure 30. Puis on dit les Seli’hot, à partir du lundi 18 septembre, avant la prière du matin. On aura au préalable récité les « bénédictions du matin » ainsi que les bénédictions de la Torah.

On s’efforcera de réciter les Seli’hot en présence de dix hommes adultes (plus de treize ans) afin de pouvoir prononcer le Kaddich.

Si possible, on reste debout pendant les Seli’hot, au moins lorsqu’on prononce les « Treize Attributs de Miséricorde » et le « Vidouï » (confession des fautes). Celui qui ne prie pas avec un Minyane (dix hommes) ne prononce ni les « Treize Attributs » ni les prières en araméen.

L’officiant s’enveloppe d’un « Talit » (châle de prière). S’il fait encore nuit, il ne prononcera pas la bénédiction : il serait alors préférable qu’il emprunte un Talit à un ami ou à la synagogue.

L’endeuillé (durant les sept premiers jours) ne sort pas de chez lui et ne peut donc aller à la synagogue pour les Seli’hot, excepté la veille de Roch Hachana (mercredi 20 septembre) où les Seli’hot sont particulièrement longues.


 Les pérégrinations du Choffar noir et du Choffar blanc

Chaque Roch Hachana, Rabbi Lévi Its’hak Schneerson, le père du Rabbi de Loubavitch, sonnait dans un Choffar noir qu’il avait hérité de Rabbi Chmouel, le cinquième Rabbi de Loubavitch.

En 1940, Rabbi Lévi Its’hak fut arrêté par la police secrète soviétique sous prétexte d’activités contre-révolutionnaires, torturé puis condamné à l’exil au Kazakhstan. Dès qu’elle le put, son épouse, la Rabbanit ‘Hanna le rejoignit pour adoucir ses dernières années. Après la mort de Rabbi Lévi Its’hak, la Rabbanit ‘Hanna confia le précieux Choffar à Rav Yaakov Yossef Raskin qui en sonna jusqu’en Elloul 1950. Il reçut alors la visite de Rav Dov Ber Haskind : celui-ci l’informa qu’à New York, le Rabbi désirait, en tant qu’héritier légitime, récupérer ce Choffar. Rav Yaakov Yossef n’hésita pas et se sépara, le cœur gros, de ce trésor auquel il avait veillé jalousement. Cependant, il demanda un « dédommagement » en échange : le Rabbi lui fit parvenir un mouchoir qu’avait utilisé Rabbi Yossef Its’hak, le précédent Rabbi de Loubavitch. Ce mouchoir pourrait lui servir à recouvrir son propre Choffar quand il soufflerait dedans.

Mais le Rabbi sonnait aussi parfois d’un autre Choffar, blanc. Quelle était son histoire ?

A Alma Ata (où il vécut les derniers mois de sa vie en exil), son père Rabbi Lévi Its’hak avait connu un Juif simple du nom de ‘Haïm Ber qui, après le décès de Rabbi Lévi Its’hak, s’installa à Tchernovitz. Durant son dernier mois d’Elloul sur cette terre, ‘Haïm Ber, affaibli, appela Rav Yossef Nimotin et lui demanda de sonner dans un Choffar blanc qu’il possédait mais dans lequel il n’avait jamais osé sonner lui-même. Et pour cause : ce Choffar revêtait une sainteté spéciale puisqu’il avait appartenu au Rabbi Tsema’h Tsédek, le troisième Rabbi de Loubavitch. Saisi de crainte respectueuse, Rav Nimotin refusa. Cependant, à Roch Hachana, quand Rav Nimotin rendit visite à ‘Haïm Ber, celui-ci insista :

- T’es-tu trempé au Mikvé aujourd’hui ?

- Oui, répondit Rav Nimotin.

- Alors, je t’en supplie, sonne de ce Choffar pour moi !

Il insista tant et si bien que Rav Nimotin fut obligé de sonner dans ce Choffar blanc du Rabbi Tséma’h Tsedek. Quand il s’apprêta à quitter la maison, ‘Haïm Ber l’interpela : « Prends ce Choffar pour toi ! ». Surpris (car il savait combien ‘Haïm Ber tenait à son trésor), Rav Nimotin accepta néanmoins et promit de prendre soin de cet objet inestimable. ‘Haïm Ber avait dû sentir que ses jours étaient comptés et qu’il devait laisser le Choffar à quelqu’un de confiance : il mourut peu après.

Quant à Rav Nimotin, il fut lui aussi arrêté et condamné aux travaux forcés au bagne du Goulag. Durant six ans. Effrayée d’être peut-être un jour arrêtée elle aussi, son épouse confia le précieux Choffar à Rav Hillel Liberow qui y veilla jusqu’au retour de Rav Nimotin. Celui-ci passa Roch Hachana dans une synagogue tenue par des Juifs iraniens : le cœur battant, il s’apprêtait à prier quand, tout à coup, une main déposa un objet devant lui. Il se retourna et ne put qu’apercevoir le dos de Rav Hillel qui s’enfuyait. Rav Nimotin constata alors que l’objet en question n’était autre que le Choffar blanc ! Très ému de le récupérer juste à ce moment crucial de la prière, Rav Nimotin était néanmoins très étonné de cet incident.

Quand ils se rencontrèrent par la suite, Rav Hillel expliqua ce qui s’était passé. Ce matin de Roch Hachana, il avait emporté ce Choffar blanc à la synagogue avec l’intention d’en sonner devant tous les fidèles, sans cesse menacés par la police secrète et tourmentés dans leur vie quotidienne à cause de leur fidélité au judaïsme. Mais, en arrivant à la synagogue, il s’était aperçu avec horreur qu’il l’avait perdu. Choqué, il réalisa que l’objet avait dû tomber de son sac. Le cœur battant, il résolut de revenir sur ses pas et reprit le chemin : effectivement, il aperçut le Choffar dans la rue. Mais juste à ce moment, un bus arriva et se dirigea droit vers l’objet encore à terre. Horrifié, Rav Hillel voyait les roues se rapprocher de plus en plus mais, finalement, il ne s’en valut que de quelques centimètres : le Choffar était resté intact ! Il le ramassa prestement et en déduisit qu’il n’était certainement pas digne de conserver ce Choffar en sa possession. Et c’était pour cela qu’il l’avait rendu en toute hâte à Rav Nimotin.

En 1946, de nombreux Juifs russes purent quitter l’Union Soviétique en se faisant passer pour des Juifs polonais. Parmi eux, Rav Sim’ha Gorodetsky : il avait demandé à Rav Nimotin de lui confier le Choffar afin de le faire remettre au Rabbi à New York. Tout ceci impliqua encore de nombreuses aventures mais les miracles continuèrent et Rav Sim’ha put finalement traverser les frontières et enfin remettre le Choffar blanc au Rabbi, lui-même descendant direct du Rabbi Tséma’h Tsedek.

C’est ainsi que, chaque année, à Roch Hachana, le Rabbi disposait de deux Choffars, un noir et un blanc, tous deux ayant appartenu à ses ancêtres et dans lesquels il soufflait pour assurer au peuple juif une bonne et douce année, matériellement et spirituellement.

Chabad.org

Traduit par Feiga Lubecki

Publié dans 2017

 Et la vie dans tout cela !

A présent, nous le savons : la période que nous vivons est déterminante. Elle est bien plus que l’antichambre du mois de Tichri et de ses grands rendez-vous spirituels, Roch Hachana et Yom Kippour. Elle est ce temps essentiel de préparation pour l’avenir. Car comment vivre pleinement ce qui arrive sans qu’on s’y attende, quand la surprise impose de courir après la réalité du temps qui passe sans jamais parvenir à l’atteindre ? Le mois d’Elloul n’est donc pas simplement un mois utile, il présente un caractère littéralement vital. Sans lui, c’est l’ensemble du mouvement spirituel qui risquerait de nous échapper. Autant dire que chacun ne sera à la hauteur requise par les grandes fêtes si proches que s’il a mené cette œuvre d’élévation préalable. En d’autres termes, c’est aujourd’hui que Roch Hachana et Yom Kippour se façonnent. Allons plus loin : quand on se souvient que ces premières fêtes contiennent d’ores et déjà toute la nouvelle année, cela signifie que tout ce qui va suivre est en germe dans ces jours d’Elloul.

Le lien avec D.ieu, aspiration constante du judaïsme, doit donc prendre une nouvelle puissance. Il doit acquérir une qualité particulière de vie, une de ces qualités qui resplendissent et rayonnent sur tout ce qu’elles touchent. Une date en détient le secret : le 18 Elloul, anniversaire de la naissance du Baal Chem Tov et de l’Admour Hazakène, Rabbi Chnéor Zalman, fondateur du ‘hassidisme ‘Habad. C’est certes là une grande date car elle est liée à deux grands maîtres qui surent ouvrir une voie renouvelée du service Divin et revitalisèrent ainsi des pans entiers du peuple juif. Mais elle ne constitue pas que rappel historique. Elle porte en elle une force que rien ne peut contraindre. Elle est ce qu’est la vie même, vectrice d’infini.

Le 18 Elloul se dit, en hébreu, « ‘Haï Elloul » ou « Elloul vivant » et ce n’est pas un  hasard. Mettre de la vie dans l’œuvre spirituelle du mois est son rôle. Mais les dates, aussi propices soient-elles, ne font pas tout. Il y va aussi de notre décision et de notre action tant il est vrai que le potentiel ne se concrétise que par l’effort de l’homme. La nouvelle année et ses bénédictions sont à notre porte, faisons que la vie y entre !


 Le pouvoir de la joie

La ‘Hassidout pose un principe essentiel : «La joie brise les barrières». A cette idée, il faut ajouter qu’elle brise aussi les limites de l’exil et hâte la venue de Machia’h. C’est dans le même sens qu’il est écrit à son propos (Berechit Rabba 85 : 14 sur Miché 2 : 13) : «Celui qui brise (les limites) montera devant eux».

(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch, Chabbat Parchat Toledot 5741)


 Ki Tavo & 18 Elloul

Moché ordonne aux les Enfants d’Israël d’apporter au Temple, une fois qu’ils se seront installés en Israël, les bikourim, prémices des fruits, pour déclarer ainsi leur gratitude à l’égard de D.ieu.

On lit également les lois de la dîme donnée aux Lévites et aux pauvres.

Moché rappelle au peuple qu’il est « le Peuple choisi » de D.ieu et que ce peuple a choisi D.ieu.

Après avoir énoncé les bénédictions que D.ieu enverra au peuple quand ils suivront les lois de la Torah, la dernière partie de la Paracha consiste en une To’ha’ha (« réprimande »), le récit de ce qui arriverait si les Juifs en venaient à abandonner les commandements.

En conclusion, Moché déclare que maintenant seulement, après quarante ans depuis leur naissance en tant que peuple, les Juifs ont atteint « un cœur pour savoir, des yeux pour voir et des oreilles pour entendre ».

Le Chabbat Ki Tavo tombe cette année le 18 Elloul, ‘Haï Elloul. Ce jour de fête chez les ‘Hassidim est l’anniversaire des deux grands luminaires que furent le Baal Chem Tov, né en 5458 (1698) et Rabbi Chnéor Zalman de Lyadi, le Baal haTanya, né en 5505 (1745).

Puisque tout se produit par Providence Divine, le fait que ‘Haï Elloul coïncide avec Chabbat renferme un enseignement tout particulier.

Le Chabbat est un jour de repos. Mais cela ne signifie pas simplement se reposer de son labeur et paresser. Il s’agit plutôt du fait que la sainteté de ce jour permet d’accomplir un service Divin d’un type plus élevé. Toutefois, ce service ne doit pas être ressenti comme demandant un effort mais comme étant une réelle source de plaisir.

L’on peut imaginer, par exemple, une personne employée pour dépierrer un champ, afin de le préparer à la semaison. Bien que la personne désire travailler, pour pouvoir gagner de l’argent et nourrir sa famille, elle ne ressent pas de plaisir dans l’accomplissement de sa tâche. Cela, parce qu’elle n’investit pas d’intérêt dans son travail et ne l’accomplit que pour le salaire qui en résultera.

Cependant, quand elle enlève les pierres de son propre champ, elle ne ressent pas de la même façon la dureté du labeur. Puisqu’elle se soucie de ses possessions, toutes ses pensées sont concentrées sur le résultat et non sur ses efforts.

On peut apporter un exemple encore plus simple. On dit à quelqu’un que toutes les pierres précieuses et toutes les perles qu’il pourra porter lui appartiendront. Non seulement il ne se souciera pas du poids mais bien plus, plus la charge sera lourde, plus il sera content !

Il en va de même pour le Juif dans son service du Chabbat. Il ne se « repose » pas de la Torah et des Mitsvot mais il en ajoute plutôt. Pourtant, il le ressent comme du repos, puisque c’est une source de plaisir extrême.

Cette leçon peut s’appliquer à ‘Haï Elloul qui tombe Chabbat : il faut observer le service de ‘Haï Elloul de façon encore plus élevée, d’une façon qui sera ressentie comme procurant du plaisir.

On peut tirer un enseignement supplémentaire de la Paracha hebdomadaire, Ki Tavo. Le premier verset déclare : « Quand tu viendras sur la terre que l’Eternel ton D.ieu te donne… ». Cette accent sur le fait d’entrer sur la terre (d’Israël) indique au Juif que sa création et son existence dans le monde (« la terre ») ne sont pas seulement destinées à lui-même mais ont pour but d’améliorer le monde.

Plus encore, le tout premier mot : Vehaya, « et ce sera », est expliqué par le Sifré comme impliquant l’immédiateté. En fait, il existe deux opinions divergentes : celle du Sifré, selon laquelle les prémices des fruits (dont parle la Paracha) devaient être apportées immédiatement, dès l’entrée en Érets Israël, et celle de la Guemara qui déclare que la Mitsva ne devrait être accomplie qu’après que la terre aurait été conquise et partagée.

Bien que la Hala’ha (la loi juive) ne puisse trancher que selon l’une de ces deux opinions, les deux peuvent s’accomplir au sens spirituel, en en tirant une leçon sur notre manière de servir D.ieu.

L’opinion de la Guemara correspond à un service réfléchi, mesuré et ordonné. D’un autre côté, l’opinion du Sifré « saute » par-dessus le service régulier, se dirigeant immédiatement vers un niveau plus élevé. Le Juif doit intégrer ces deux types de service : sauter par-dessus ses limites personnelles mais également accomplir la Torah et les Mitsvot de façon rigoureuse.

La partie des Psaumes que l’on lit est la même tous les ‘Haï Elloul. Elle se conclut par le Psaume 89 qui s’achève en mentionnant les ennemis de D.ieu qui seront présents à l’époque précédant immédiatement la venue du Machia’h.

La leçon est claire : quand on voit des gens s’opposer à la diffusion de la ‘Hassidout, il ne faut aucunement en être affecté. Leur présence est compréhensible. Puisque nous sommes dans une période précédant l’arrivée du Machia’h, bien sûr, certains sont des opposants à la Divinité. Leur présence doit nous inspirer à répandre, encore plus, la ‘Hassidout, à travers le monde.


 Qu’est-ce que Erouv Tavchiline ?

On n’a pas le droit, un jour de fête juive, de préparer de la nourriture pour le soir suivant ou le lendemain. Cependant, lorsqu’un jour de fête tombe le vendredi, on prépare avant la fête deux aliments cuits pour montrer qu’on a pensé, avant la fête, à préparer Chabbat.

Cette année, mercredi 20 septembre 2017 ainsi que mercredi 4 et 11 octobre 2017, on procédera au Erouv Tavchiline : on prépare une ‘Halla ou une Matsa ainsi qu’un mets cuit (viande, poisson ou œuf). On récitera la bénédiction : Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bemitsvotav Vetsivanou Al Mitsvat Erouv. (« Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi de l’univers, Qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné le commandement du Erouv »). Puis on les mettra soigneusement de côté et on les consommera au cours d’un des repas de Chabbat.

Grâce à cet Erouv, tous les membres de la famille (et les invités) pourront cuire, porter, allumer les bougies et, en général, procéder vendredi à tous les préparatifs pour Chabbat.

On veillera à achever les préparatifs au moins une heure avant l’entrée de Chabbat ; on allumera les bougies un peu avant l’heure (à partir d’une flamme déjà existante), de façon à « profiter » de ces préparatifs encore pendant la fête.


 Du bois… de chauffe

Un vendredi soir, un homme « bizarre » entra dans le Beth ‘Habad d’Amherst (Connecticut). Oui bizarre : les cheveux hirsutes, une longue barbe, des habits en loques… Il s’assit, assista à la prière plutôt que d’y participer et, de l’expression ahurie de son visage, on pouvait déduire que c’était sans doute la première fois qu’il mettait les pieds dans une synagogue.

Après la prière, il descendit – comme tous les autres fidèles – pour participer au repas de Chabbat. Il ne chercha à parler à personne et Rav Israël Deren – l’émissaire du Rabbi pour le Massachussetts – n’eut pas vraiment l’occasion de lui adresser plus que quelques mots de courtoisie. L’homme passa la nuit au Beth ‘Habad, assista aux offices et repas du Chabbat puis, dès la nuit tombée, repartit sans un mot.

Le même scénario se reproduisit le Chabbat suivant : prière, repas, nuit sur place puis retour chez lui – toujours sans échanger une parole avec quiconque.

Le 3ème Chabbat, il demanda à parler en privé avec Rav Deren et raconta sa vie et ses tourments : encore quelques années auparavant, il avait été professeur de philosophie à l’université d’Amherst. Un beau jour, d’étranges pensées lui avaient trotté dans la tête et l’avaient bouleversé : « Si ce que j’enseigne n’est que mensonge, comment puis-je éduquer mes étudiants au mensonge ? Et si c’est vrai, de quel droit profiterais-je d’un salaire pour transmettre la vérité ? ».

La réflexion le mena à l’action : il quitta l’université et « s’enfuit du monde ». Il se construisit une baraque dans les bois et se suffit de l’œuvre de ses mains.

Environ un an plus tard, un couvent s’établit non loin de lui. Notre professeur y entrait de temps en temps, écoutait les pensionnaires et étudiait avec eux. Lui leur enseignait la philosophie et eux lui enseignaient le christianisme. Ce bon élève envisagea même - D.ieu préserve – de se convertir. Comme de toute manière, il ne connaissait rien du judaïsme, il était impressionné de voir des gens prêts à vivre selon leur croyance, des gens dévoués en qui il voyait des exemples de vérité.

Cette même semaine, il dut se rendre à New York. Dans une des rues de Manhattan, un jeune Loubavitch l’arrêta gentiment et lui posa la question traditionnelle : « Excusez-moi, êtes-vous Juif ? Oui ? Alors venez mettre les Téfilines ! ». Il accepta avec un haussement d’épaules – après tout, il avait accompli tellement d’autres actes bizarres dans sa vie… Le moment d’après, il avait déjà oublié tout cela mais, inconsciemment, cela avait fait bouger quelque chose en lui, déclara-t-il par la suite.

Il rentra « chez lui », dans sa tanière au fond de la forêt et ne pensa plus à tout cela.

Quelques jours plus tard, un ami lui apporta du bois pour se chauffer. Ces fagots étaient enveloppés dans un vieux papier journal. Cet ancien professeur ne pouvait résister à l’appel de l’écriture et, machinalement, se mit à lire ce qui était écrit sur ce papier d’emballage. Cela faisait si longtemps qu’il n’avait pas lu un journal ! Outre quelques vieilles informations, il lut un article à propos de Rav Israël Deren qui venait d’inaugurer un Beth ‘Habad dans son fief de l’université d’Amherst…

« C’est déjà trop ! se dit-il. Jamais de ma vie, je n’avais entendu parler de Loubavitch et soudain, deux fois en l’espace de quelques jours, je « tombe » sur eux… Cela vaut la peine de creuser un peu plus… ».

- Voilà tout, conclut-il. Maintenant je suis ici, j’ai déjà passé trois Chabbat avec vous et je souhaite en connaitre davantage…

Il avait enfin trouvé la vérité…

Actuellement, le professeur Yerachmiel Elinson a repris une vie normale et, avec son épouse, ils mènent une vie en tous points ‘hassidique, avec leurs six enfants.

Aharon Dov Halperin – Moussaf Pessa’h de Kfar Chabad

Traduit par Feiga Lubecki

Publié dans 2017