Kislev et la joie nouvelle

Lorsqu’un nouveau mois commence, il apporte toujours, avec sa couleur particulière, son lot d’expériences nouvelles. C’est ainsi que le calendrier juif se déroule, faisant se succéder des temps qui se complètent et se soutiennent l’un l’autre jusqu’à former une forme de globalité du service de D.ieu. Le mois qu’il nous est offert de vivre à présent en donne, une fois de plus, la parfaite illustration. C’est celui de Kislev et, après l’éclat du mois des fêtes, Tichri, et la morosité relative du suivant, ‘Hechvan, il apporte une chaleur et une lumière que chacun ressent même sans savoir les désigner. Pourrait-il en être autrement ? Ce mois est celui de la victoire éternelle de la lumière sur l’obscurité.

Bien sûr, il est celui de ‘Hanoucca, dont la brillance resplendit déjà au loin, et celui du Roch Hachana de la ‘Hassidout, le 19 du mois, qui projette sa puissance jusqu’à nous.  Mais ces points de lumière ne se limitent pas aux instants qu’ils animent. Ils traversent la nature même de la période et c’est ce qu’il importe de ressentir au plus profond. De fait, la joie intrinsèque de Kislev est ressentie par chacun. Elle donne sens à tous les jours qui passent et transforme notre manière de considérer les choses. Parce que cette lumière est celle des miracles qui se produisirent en leur temps, elle éclaire jusqu’au nôtre. Parce qu’elle est lumière de victoire, elle illumine notre conscience.

Cela n’est pas un simple rappel des rendez-vous spirituels en cours qu’il ne faut pas manquer. Il s’agit surtout d’être conscient des opportunités nouvelles ouvertes à présent. Car le caractère du mois est une de ces données objectives qui apportent leur contribution aux efforts de l’homme. Temps de lumière et de victoire, le mois de Kislev donne à qui veut s’en saisir la capacité de surmonter les obstacles, d’abattre les barrières qui s’opposent aux avancées harmonieuses et sereines d’une vie de liberté. Lorsque semblent s’élever, en soi-même ou au-dehors, des rumeurs hostiles ou simplement décourageantes, l’enthousiasme de Kislev sait les dissiper. Seules la joie et la confiance ont leur place. Sachons en porter la certitude, toute l’existence peut en être changée.  


 Le cerveau et le cœur

Il est souvent expliqué que l’exil présente un certain nombre d’aspects positifs : il est « une chute pour permettre une élévation supérieure », il manifeste « la supériorité de la lumière qui provient de l’obscurité » etc. Toutefois, toutes ces explications s’adressent au cerveau. Pour les sentiments du cœur, l’amertume de l’exil les rend toutes inacceptables.

C’est pourquoi, bien que ces explications aient été données et comprises, le peuple juif ne cesse de demander que l’exil se termine enfin et que la Délivrance arrive.

(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch – Chabbat Parchat Nitsavim 5741)


 Vayichla’h

Après un séjour de vingt ans à ‘Haran, Yaakov revient en Terre sainte. Il envoie des anges émissaires à Essav, dans l’espoir d’une réconciliation mais il s’avère qu’Essav est sur le chemin de la guerre avec quatre cents hommes armés. Yaakov se prépare à la guerre, prie et envoie un cadeau considérable à Essav.

En cette nuit, Yaakov fait traverser la rivière Yabok aux siens mais il reste en arrière et rencontre un ange, représentant l’esprit d’Essav avec lequel il se bat jusqu’à l’aube. Malgré une hanche disloquée, il sort vainqueur du combat et reçoit de l’ange le nom Israël qui signifie « il l’a emporté sur le Divin ».

La rencontre entre les deux frères a lieu, ils s’embrassent mais se séparent. Yaakov s’installe sur un terrain qu’il achète près de Ch’hem. Le prince de cette ville, Ch’hem abuse de Dinah, la fille de Yaakov et ses deux frères, Chimone et Lévi la vengent en tuant tous les hommes de la ville.

Yaakov continue sa route.

Ra’hel meurt en donnant naissance à son second fils, Binyamine. Elle est enterrée au bord de la route, près de Beth Lé’hem.

Réouven perd son droit d’aînesse en commettant une indiscrétion par rapport à la vie intime de son père.

Yaakov arrive à ‘Hévron, chez son père, qui meurt plus tard, à l’âge de 180 ans (Rivka est morte avant le retour de Yaakov).

La Paracha se conclut par le décompte détaillé des femmes, enfants et petits-enfants d’Essav, l’histoire du peuple de Séir au sein duquel s’installe Essav et par la liste des huit rois qui dirigent Edom, la terre des descendants d’Essav et de Séir.

Dans la Paracha Vayichla’h, Yaakov est informé que lui est attribué un nouveau nom. Il ne sera plus appelé Yaakov mais Israël. Cela ressemble à ce qui se produisit avec son grand-père dont le nom Avram avait été transformé par D.ieu en Avraham. La lettre Hé fut ajoutée à son nom de sorte qu’il ne serait plus appelé Avram mais Avraham.

Cependant, il existe une différence fondamentale entre ces deux situations. Une fois qu’Avram fut renommé Avraham, jamais plus, dans la Torah, il ne fut appelé Avram. Et cela va même jusqu’au point où le Talmud conclut des versets que l’on n’a pas le droit de l’appeler Avram au lieu d’Avraham.

Cela n’est pas le cas de Yaakov. En effet, l’on peut observer, par la suite, que bien que désormais il ait reçu pour patronyme Israël, il arrive que la Torah se réfère à lui en le nommant Yaakov.

On peut également observer que dans nos prières quotidiennes, on le nomme parfois Israël et parfois Yaakov.

Les commentateurs nous expliquent la raison d’être de ces deux noms.

La nation juive, Israël, le représente et chaque individu est un descendant d’Israël. Mais chacun possède deux manières différentes de l’imiter, dans son service de D.ieu. L’une fait référence à Yaakov et l’autre à Israël. Etant donné que tous les hommes servent D.ieu des deux façons, les deux noms sont préservés : Yaakov et Israël.

Nous allons donc nous pencher sur ces deux approches.

Examinons, pour les comprendre, la racine du nom Yaakov. L’une des racines de ce mot est Akvah (ou Mirmah ) qui se réfère à la façon « détournée » dont Yaakov revêtit les vêtements de son frère Essav, pour recevoir, de façon « contournée » les bénédictions de son père, Its’hak. Par la suite, il reçut le nom Israël, parce que, comme l’explique Rachi, D.ieu désirait que ce soit lui qui reçoive les bénédictions destinées à Essav et que donc, il ne devait en rien en être gêné, ne devait aucunement s’en cacher. Son nom serait donc désormais Israël qui vient de la racine yachar, « droit ». Ces bénédictions lui revenaient donc à juste titre, de façon droite, et il ne devait pas s’en cacher.

Qu’est-ce que tout cela signifie pour chacun de nous ? Nous devrions servir D.ieu des deux manières et même de celle qui est mensongère, trompeuse ?

Il est bien évident que cela ne doit pas être pris à la lettre et ne signifie pas qu’il faut être malhonnête, à D.ieu ne plaise ! Cela est bien sûr interdit !

Mais il s’agit ici de la manière dont le Juif se confronte au monde matériel. Nous avons divers besoins matériels. Nous mangeons, nous dormons, etc. Nous nous livrons également, comme chaque être humain, à des occupations professionnelles.

Mais quand nous nous y adonnons, nous le faisons, dans un certain sens, de manière « détournée ». Il ne s’agit certainement pas de manquer d’honnêteté dans les affaires mais de les mener avec un projet intérieur différent. Il ne devrait pas être question pour nous d’accéder à la fortune, au succès dans le simple but d’être riches ou de pouvoir manger à satiété, sans plus. Il est plutôt question ici de servir D.ieu, en élevant spirituellement toute cette matérialité que nous rencontrons, de rester forts et en bonne santé pour mieux servir notre Créateur, d’utiliser l’argent que nous gagnons afin d’offrir à nos enfants une éducation qui les maintiendra dans le chemin du Judaïsme et de posséder un foyer où l’on ressent une atmosphère juive.

Si l ‘on parle ici de « tromperie » c’est parce que les valeurs apparentes ne sont pas les réelles. Nous semblons manger, boire, travailler, comme tout le monde, pour les bienfaits matériels que nous en retirons.

Mais en réalité, il y a autre chose, « derrière » ce que nous faisons.

L’on peut, par certains aspects, comparer cette attitude à celle d’un homme qui en trompe un autre. Il fait semblant d’adopter les mêmes idées, les mêmes comportements. Mais au bout du compte, il le trompe et fait l’opposé de ce qu’il prétendait.

De la même façon, nous menons une vie matérielle, nous nous impliquons dans le monde et le corps pense recevoir tout ce qu’il désire, ce qui est un fait. Mais l’intention est toute autre : le bénéfice n’est pas seulement matériel mais aussi spirituel.

C’est en cela que consiste l’attitude de Yaakov : utiliser le monde matériel pour en révéler toute la spiritualité.

Mais un Juif adopte également le comportement d’Israël. Il sert D.ieu ouvertement, visiblement.

Nous pouvons également retrouver cette démarche par rapport à la matérialité.

Contrairement au fait de manger pendant les jours de la semaine, où nous sommes occupés à purifier et élever les étincelles spirituelles enfouies dans la matérialité, le jour du Chabbat ou des fêtes, cette même activité, manger, devient elle-même une Mitsva, un commandement.

Il s’agit alors d’une activité spirituelle dévoilée, au vu de tous. Il s’agit de servir complètement D.ieu à la fois spirituellement et matériellement.


 Quand dit-on Tal Oumatar ?

A partir de lundi soir 4 décembre 2017, on ajoute « Tal Oumatar » dans la prière de la Amida.

Cette prière pour « la rosée et la pluie » précise que ceci doit être « Livra’ha », pour la bénédiction.

Celui qui a oublié « Tal Oumatar » et s’en souvient avant d’avoir commencé la bénédiction suivante (« Teka Bechofar ») le rajoute alors. S’il a commencé « Teka Bechofar », il rajoute dans la bénédiction « Choméa Tefila » : « Vetène Tal Oumatar Livra’ha Ki Ata Choméa Tefilat Kol Pé… »

S’il l’a encore oublié mais s’en souvient avant « Retsé », il le dit alors. S’il a commencé Retsé et s’en souvient avant d’avoir reculé de trois pas à la fin de la Amida, il reprend à partir de « Barè’h Alénou » et continue la suite de la Amida. S’il a oublié après avoir reculé de trois pas, il reprend toute la Amida.

Il convient de louer et remercier le Créateur « pour chaque goutte de pluie » bénéfique, en son temps, qui apporte la bénédiction pour les récoltes, en particulier en Erets Israël.

 (d’après Séfer Hatodaah)


 Bon anniversaire !

Un jour de décembre 1977, le Rabbi de Loubavitch arriva dans la boîte aux lettres de mes parents. Enfin, pas vraiment le Rabbi mais une brochure émanant de son mouvement, avec une invitation à participer à une Peguicha, un Chabbat de rencontre, un vrai Chabbat, à New York. Après tout, pourquoi pas ? Cela me donnerait du matériau pour un prochain reportage. J’avais l’intention de participer incognito à ce Chabbat puis de décrire mon expérience dans un magazine.

- D’où appelez-vous ? me demanda mon interlocuteur quand je téléphonai pour m’inscrire.

- Maplewood, New Jersey.

- Maplewood ? Donc vous connaissez Rav Gordon ?

- Qui ?

- Rav Chalom Ber Gordon, l’émissaire du Rabbi à Maplewood !

- Non, désolée, je n’ai jamais entendu parler de lui.

- Je n’arrive pas à le croire, soupira l’homme au bout du fil.

Comme ma famille fréquentait un temple réformé, il n’y avait aucune chance que mon chemin croise celui de ce Rav Gordon.

Bref, je pris le train et le métro et arrivai vendredi après-midi à Crown Heights alors qu’une première sirène annonçait l’entrée imminente de Chabbat.

- Vous arrivez juste à l’heure, j’allais fermer le bureau ! me dit la jeune fille à l’accueil. Tous les participants ont déjà été dispatchés et je ne sais pas où vous envoyer ! Euh… Je vais tenter un dernier appel… Voilà ! Vous devrez aller chez la famille Groner sur President Street !

J’avais compris que je devais faire vite et ne posais pas de questions quant à mes hôtes. Comment aurais-je pu deviner qu’il s’agissait ni plus ni moins du secrétaire du Rabbi ?

Je m’attendais à être accueillie à la porte par une matrone parée d’une robe de chambre élimée et d’un foulard noir menaçant puisque telle était ma vision d’une maîtresse de maison ‘hassidique. Mais la dame qui m’ouvrit la porte était élégante et distinguée, d’une noblesse d’âme évidente.

- Entrez, c’est bientôt Chabbat, nous allons allumer les bougies ! Voici votre chambre !

C’était une petite chambre avec plusieurs lits. Je cachai subrepticement mon carnet avec le stylo sous le matelas afin de pouvoir noter discrètement mes observations durant Chabbat.

Madame Groner, ses filles et moi-même avons allumé nos bougies avec la bénédiction : heureusement, je connaissais ce rite puisque ma propre mère y était très attachée. La lumière de toutes ces bougies dansait sur les miroirs qui ornaient la salle à manger. Une autre jeune fille, comme moi venue de loin pour cette expérience, m’accompagna au 770 Eastern Parkway, la synagogue qui était absolument bondée.

- Regarde ! Voici le Rabbi !

On me montra un homme à la barbe blanche assis sur un fauteuil rouge bordeaux. Mais j’eus du mal à l’apercevoir vraiment tant il y avait de femmes et filles qui se poussaient pour mieux voir depuis la galerie des dames. Inutile de décrire la foule d’hommes en bas.

De retour chez les Groner, nous nous sommes confortablement assises sur un canapé devant la table si bien mise. Nous avons bavardé en attendant Rav Groner et ses fils. L’heure tournait et mon estomac criait famine !

Finalement, nous avons entendu Rav Groner et ses fils arriver en chantant. Nous avons pris place autour de la table et Rav Groner et ses fils ont entonné le chant traditionnel Chalom Alé’hem pour accueillir les anges du Chabbat. J’avais l’impression que les anges chantaient avec eux, je ressentais tant de paix, de sérénité, d’harmonie et de bonheur… Quelque chose que je n’avais jamais expérimenté bien que j’aie assisté à d’autres repas de Chabbat lors de mes voyages en Europe et en Israël.

La Providence Divine m’avait guidée là où je devais aller, l’endroit qu’il me fallait. Je réalisai qu’ici se trouvaient la lumière et la joie dont j’avais besoin dans ma vie.

Le Chabbat et le week-end se passèrent comme dans un rêve, avec des activités incessantes, des cours, des conférences, des discussions qui durèrent jusque tard dans la nuit samedi soir.

Dans l’excitation, j’avais perdu l’envie d’écrire quoi que ce soit.

De centaines de jeunes filles venues du monde entier, parlant dans toutes les langues possibles, chantaient et dansaient et parlaient… Aucune d’entre nous n’envisageait de « sortir » à Manhattan (je crois que c’était le Nouvel An…). Nous passions un moment tellement formidable !

Inutile de préciser que je n’ai pas touché à mon stylo durant tout Chabbat et que j’ai bien vite abandonné mon projet d’observer tout cela de l’extérieur, comme un reporter. Quelques semaines plus tard, je partis étudier sérieusement le judaïsme au Beth ‘Hanna dans le Minnesota. Durant dix jours, je me rendis à tous les cours, discutais à n’en plus finir avec les autres participantes – surtout à propos du rôle (énorme) de la femme dans le judaïsme.

Un jour je me réveillais et pris la décision de m’impliquer complètement dans ce que j’étudiais : j’allais mettre sérieusement en pratique tout ce que j’entendais, j’allais pratiquer scrupuleusement les Mitsvot au fur et à mesure que je les apprendrais.

Le lendemain j’aperçus des filles dans la bibliothèque qui se penchaient sur un gros volume. De quoi s’agissait-il ? « C’est un calendrier perpétuel, enfin… sur 300 ans, pour pouvoir calculer nos anniversaires juifs » répondirent-elles.

Voilà qui était nouveau, je n’y avais jamais pensé. Après tout, pourquoi ne pas m’y intéresser moi aussi ?

L’avez-vous deviné ?

Le jour précédent, le jour où j’avais décidé d’accepter le joug des Mitsvot, était mon 25ème anniversaire juif !

Elana Bergovoy – Chicago - COLlive

Traduite par Feiga Lubecki

Publié dans 2017

 A hauteur humaine

Il en va des mots, et des concepts qu’ils incarnent, comme de tout ce qui existe en ce monde : certains paraissent avoir vieilli. Peut-être du fait d’un trop long usage, tout se passe comme s’ils s’étaient prématurément usés. C’est ainsi que, dans la conscience individuelle, ils prennent peu à peu la teinte fanée de ces choses anciennes qui firent autrefois partie de la vie et pour lesquelles nous gardons une tendresse nostalgique, telles des fleurs séchées retrouvées entre les pages d’un livre et qui, tout à coup, réveillent des souvenirs précieux.

Notre temps en offre d’éclatantes illustrations. De fait, la morale constituait, il n’y a pas si longtemps, une référence absolue. Pour assurer à la société un développement harmonieux et à la civilisation un constant approfondissement, chacun était invité à ne pas s’en écarter au moins pour ce qui concernait l’affirmation publique. Cela semblait dépasser tout individualisme, comme le beau et nécessaire cadre d’un monde policé. Le comportement devait être « moral », les règles de conduites devaient renvoyer à ce code venu de si loin et qui semblait porter plus loin encore. Et tout cela, au-delà des divergences d’opinion ou des modes de vie dissemblables, régissait les rapports entre les hommes, les jugements portés sur soi-même, les choix individuels et collectifs. Puis, sans qu’on s’en rende vraiment compte, cette attitude a commencé à évoluer. Et, comme les mots accompagnent toujours ce type de changement, le vocabulaire a suivi. La morale, notion exigeante, est devenue l’objet de sourires parfois amusés et souvent ironiques.

Sans doute est-il utile de réfléchir à un bilan de tout cela, de se retourner sur le long – et si facile – chemin parcouru. Certes, en termes d’individualisation des choix de vie, cela a conduit à de réelles avancées. Mais est-il encore possible de s’interroger sur le sens de ces progrès ? N’avons-nous pas pour tâche de penser l’avenir afin qu’il soit à la hauteur des espérances humaines ? La révélation Divine au mont Sinaï, il y a quelque 3500 ans, n’a pas fait que nous enseigner des rites et des pratiques. Elle nous a donné une vision du monde. Osons le mot : elle nous a honorés d’une norme éternelle, créatrice de lois et de civilisations.

Il faut en être conscient en un temps oublieux : sans cette norme, c’est d’une base que le monde des hommes manque. Et si le fondement fait défaut, il est clair que l’édifice est fragile, presque en péril. Par nos actes, en cet encore début de mois de Kislev – mois de lumière – il nous appartient de le soutenir.


 Une nouvelle Torah ?

Il nous est enseigné (Vayikra Rabba 13 : 3 paraphrasant Isaïe 51 : 4) qu’au temps de Machia’h « une nouvelle Torah sortira de Moi ». Il est pourtant clair que la Torah, Sagesse de D.ieu, ne changera jamais. Du reste, les textes soulignent : « Cette Torah-là ne sera jamais changée ». Dès lors, que signifie cette « nouvelle Torah » ?

Aujourd’hui, la Torah nous apparaît sous la forme de récits comme ceux de Lavan ou de Bilam. Lorsque le Machia’h viendra, les secrets cachés dans ces récits se dévoileront. Il se révèlera alors comment ce qui semble être de simples histoires parle profondément de D.ieu. C’est ce que signifie les mots « sortira de Moi » : il apparaîtra comment toute la Torah est une manière de dire la Divinité.

(d’après Kéter Chem Tov, sec. 84, 242)


 Vayétsé

Yaakov fuit Beer-Sheva et se dirige vers ‘Haran. En chemin, il se trouve face à « l’endroit », y dort et rêve d’une échelle qui relie le ciel et la terre, des anges y montent et y descendent. D.ieu lui apparaît et lui promet que la terre sur laquelle il se trouve sera sienne. Au matin, Yaakov fait de la pierre, sur laquelle il a reposé sa tête, un autel, priant pour qu’il devienne la Maison de D.ieu.

A ‘Haran, il va devenir le berger du troupeau de son oncle Lavan, pour obtenir la main de sa fille cadette, Ra’hel. Mais Lavan le trompe et le fait épouser sa fille aînée, Léa. Yaakov épouse Ra’hel une semaine plus tard en échange de sept années de travail supplémentaires.

Léa donne naissance à six garçons : Réouven, Chimone, Lévi, Yehouda, Issa’har et Zevouloun et à une fille, Dinah. Ra’hel, quant à elle, reste stérile. Elle offre alors à Yaakov d’épouser sa servante Bilha et deux fils lui naissent : Dan et Naphtali. Léah en fait de même avec sa servante Zilpa qui donne naissance à Gad et Acher. Finalement, D.ieu répond aux prières de Ra’hel et elle met au monde Yossef.

Yaakov veut quitter ‘Haran, après ces quatorze années, mais Lavan le persuade de rester en échange de troupeaux. Malgré les efforts de Lavan pour le tromper, Yaakov s’enrichit et part subrepticement au bout de six ans. Menacé par D.ieu s’il le poursuit, Lavan abandonne son intention de nuire et conclut une alliance avec Yaakov.

Yaakov se dirige vers la Terre Sainte où il est accueilli par des anges.

Une nuit horizontale
Yaakov se trouva face à « l’endroit » et il y passa la nuit, comme le soleil s’était couché… et il s’allongea à cet endroit (Beréchit 68 :11)

« Il s’allongea à cet endroit » …Dans cet endroit il s’allongea mais durant les quatorze années où il s’était caché dans la Maison (d’étude) de Evèr, il ne s’était pas couché, mais durant toutes les vingt années qu’il allait résider dans la maison de Lavan, il ne se coucherait pas… (Midrach Rabbah, Beréchit 68 :11)

« L’endroit » en question est le Mont Moriah, « la Maison de D.ieu et la Porte des Cieux », site de la création d’Adam, de la ligature d’Its’hak et futur emplacement du Temple où « D.ieu contractait Sa présence entre les piliers soutenant l’Arche ».

La nuit que Yaakov passa à cet « endroit » marquait l’intersection de deux périodes importantes de sa vie : les quatorze années qu’il venait de consacrer à l’étude de la Torah, caché dans la Maison de Evèr, et les vingt ans qu’il allait passer au service de Lavan, édifiant sa famille et sa fortune. Les quatorze premières années, il était si absorbé dans la quête de la Sagesse Divine, que pas une seule fois, il ne s’allongea pour dormir. Et durant les vingt années qui allaient suivre cette nuit, Yaakov allait servir Lavan si fidèlement que, dira-t-il, « le sommeil a fui mes yeux ».

Et pourtant, la nuit qu’il passa dans le lieu le plus saint du monde, Yaakov étendit son corps sur le sol et s’allongea pour dormir !

La tête, le cœur et le talon
Le monde matériel et le monde spirituel se reflètent. Chaque réalité spirituelle possède sa contrepartie dans un acte ou une loi de la nature et chaque phénomène physique est le miroir d’une vérité spirituelle.

L’être humain est unique en ce que, contrairement aux animaux, il marche debout. Le sens spirituel de ce phénomène est qu’alors que les instincts et la connaissance des animaux ne servent qu’à satisfaire leurs désirs ou leurs besoins, chez l’être humain, l’esprit dirige le cœur et les émotions, commandées par l’esprit, dictent le comportement du corps. Cela apparaît dans l’orientation verticale du corps de l’homme qui place la tête et le cœur au-dessus des organes et des membres fonctionnels, ce qui est tout le contraire de l’alignement horizontal de la plupart des animaux dont la tête et le cœur se trouvent quasiment au même niveau que le corps. Une personne qui laisserait son cœur dominer son intellect ou ses émotions obéir à ses appétits, réduirait sa vie intérieure à celle d’un animal. Il se peut qu’elle marche debout, mais spirituellement, elle mène une existence « horizontale ».

Telle est la signification profonde du fait qu’au cours de la période la plus spirituelle et de la période la plus matérielle de sa vie, Yaakov ne s’allongea pas. Les quatorze années qu’il passa dans l’étude de la Torah marquèrent le zénith de son accomplissement spirituel. Les vingt ans chez Lavan constituèrent un engagement intensif dans le monde matériel. Dans ces deux situations, Yaakov maintint résolument la position verticale de sa vie, dans laquelle son esprit dirigea son cœur et son corps et où les éléments émotionnels et fonctionnels de son être servirent sa compréhension et ses convictions.

Au-dessus de la matière et de l’esprit
Mais la vie possède également une vérité supérieure. Une vérité qui transcende la pensée, les sentiments et les actes. Une vérité devant laquelle la sensibilité la plus sublime et l’action la plus matérielle ont le même statut.

D.ieu n’est ni spirituel ni matériel, pas plus qu’il n’est plus proche du monde de l’esprit que de celui de l’expérience ou de l’action. D.ieu nous a donné les moyens de nous unir à Lui dans tous ces domaines : la sagesse de la Torah, la possibilité de vivre un amour et une crainte de Lui par la prière, les Mitsvot par lesquelles les actes physiques lient leurs acteurs mortels (nous) au Commandant Divin et établissent les priorités auxquelles chacun doit s’attacher dans la vie.

D.ieu a établi que l’esprit doit dominer le cœur et que le domaine spirituel doit occuper un espace « plus élevé » que le domaine matériel.

Mais, en dernier ressort, existe un niveau dans lequel tous sont pareillement insignifiants devant la vérité transcendante de D.ieu et tous ont pareillement un sens dans la mesure où chacun révèle un certain aspect de la vérité divine et remplit un certain rôle dans le dessein divin dans la Création.

Il y a un lieu dans l’univers où cette vérité essentielle est manifeste : le Mont Moriah à Jérusalem, site du Temple, l’endroit où D.ieu Se révèle à nous le plus profondément, et l’endroit de notre accomplissement ultime dans le service de D.ieu. Quand Yaakov parvint à cet endroit, il s’allongea. Car cette nuit-là, son esprit et son talon étaient emprunts de la même humilité et de la même Divinité.


 Quand doit-on se laver les mains ?

Voici les cas où on doit se laver les mains selon le Choul’hane Arou’h (Code de Lois Juives) :

1) Dès qu’on se réveille, avant même de se lever (grâce à une bassine et un Kéli (récipient) préparé la veille et déposé au pied du lit) – si on a dormi au moins une demi-heure.

2) Quand on sort des toilettes.

3) Quand on sort de la douche ou du bain, après s’être rhabillé.

4) Quand on s’est coupé même un seul ongle (des pieds ou des mains).

5) Quand on se coupe même un cheveu ou qu’on coupe les cheveux de quelqu’un d’autre.

6) Quand on sort du cimetière ou qu’on touche une personne sans vie.

7) Quand on subit une prise de sang.

Dans tous ces cas, on a l’usage de se laver les mains en versant de l’eau à partir d’un récipient, trois fois chaque main (droite gauche, droite gauche, droite gauche).

Voici les cas où on se lave les mains de façon simple, éventuellement avec du savon – pour des raisons d’hygiène :

- Quand on met ou on enlève les chaussures, si on les a touchées

- Quand on touche les parties du corps normalement couvertes

- Quand on se gratte la tête, le nez ou les oreilles

- Quand on touche un pou ou tout autre animal.

(d’après Chemirat Mitsvot Hayom – Rav Chimon Guedassi)


 Le défi du Chabbat

Je suis né à Westchester (New York), dans un environnement très assimilé. Enfants, nous n’avons reçu que très peu d’éducation juive.

En 1987, ma famille a traversé des moments difficiles et, un dimanche, Rav Reouven Flamer vint nous rendre visite – comme il le faisait systématiquement dans la ville dont il avait été nommé Chalia’h (émissaire attitré du Rabbi). En entendant mon père raconter un à un tous ses problèmes, il ne fit ni une ni deux et l’emmena directement au 770 Eastern Parkway, la synagogue quartier général du mouvement Loubavitch. Ce dimanche matin, comme il le faisait depuis quelques temps déjà, le Rabbi distribuait aux nombreux visiteurs qui sollicitaient sa bénédiction des billets d’un dollar à remettre à la Tsedaka (charité). Mon père fut très impressionné par l’ambiance générale régnant dans cette synagogue mais surtout par la personnalité du Rabbi. Cette première visite marqua pour lui le début d’un lent retour à un judaïsme plus engagé. Bien entendu, il nous encouragea à agir de même.

J’avais été comédien à Broadway ; après mes études universitaires, je m’installai à Los Angeles dans l’espoir de poursuivre une brillante carrière à Hollywood. Je me suis marié peu après. Mais ma carrière d’acteur ne décolla pas comme celle d’autres stars. Mon père m’encouragea à fréquenter le Beth ‘Habad à San Monica : effectivement, c’est autour de la table de Chabbat du regretté Rav Levitansky que nous avons, nous aussi, lentement amorcé un retour à une vie de Torah.

Après l’université, je m’inscrivis à l’école de journalisme de Columbia et j’obtins mon premier poste de présentateur des informations à Naples en Floride en 1997. A cette époque, il n’y avait là-bas qu’une synagogue du mouvement réformé et je décidai d’y suivre les offices des grandes fêtes. Ma femme et moi, nous y sommes allés le matin de Roch Hachana mais, à l’entrée, nous avons été « accueillis » par un gardien qui portait une machine dans laquelle nous étions supposés introduire nos cartes de paiement !

Il nous demanda si nous avions réservé nos places pour les offices : non, nous ne l’avions pas fait.

- Dans ce cas-là, pas de problème conclut-il avec un sourire. Vous pouvez acheter vos places maintenant pour 350 dollars chacun : cela inclut d’ailleurs vos places pour Yom Kippour ! Une très bonne affaire, je vous assure !

Mon salaire était vraiment très minime et je ne pouvais pas me permettre de débourser 700 dollars.

- Je ne possède pas cette somme ! répondis-je.

- Alors dans ce cas, je suis désolé mais vous ne pourrez pas prier ici aujourd’hui.

Nous avons rebroussé chemin, terriblement déçus et scandalisés. Mais, de fait, il s’avéra que ce fut la plus grande bénédiction ! Je me suis senti davantage attiré par le judaïsme et je décidai de déménager pour adhérer à une plus grande communauté dans laquelle je pourrais vraiment m’investir et étudier.

Il y avait cependant un problème : je travaillais pour une station de radio locale à Naples tandis que les grandes communautés juives évoluaient autour d’autres stations de radio beaucoup plus importantes, nationales même. Il était pratiquement impossible d’obtenir une place dans ces médias en très peu de temps : j’avais besoin… d’un miracle.

Mon père se rendit au Ohel, au cimetière juif Montefiore de Queens, là où est enterré le Rabbi et pria pour que j’obtienne cette place. Voici ce qu’il écrivit dans la lettre qu’il déposa sur le tombeau (et dont il m’envoya une copie) :

« Cher Rabbi. De grâce, bénissez mon fils Roshi pour qu’il trouve une place à la station de radio WSVN de Miami. En échange, Roshi s’engagera à ne pas travailler le Chabbat ».

WSVN est une des dix plus grandes stations de radio d’information des Etats-Unis et elle est située à dix minutes de la grande synagogue de Bal Harbour. Mon père tenait à ce que je m’installe à proximité d’une communauté adaptée à mon désir d’étudier sérieusement le judaïsme tout en pratiquant le métier que j’aimais passionnément. Il était si sûr que la bénédiction se réaliserait !

Quand je lus la lettre, je fus… scandalisé : comment accepter de ne pas travailler le Chabbat dans ma profession où il fallait être disponible à toute heure du jour, tous les jours ? Comment avait-il pu s’engager à ma place ? Je me calmais en estimant qu’il y avait autant de chances que je sois engagé que de gagner au gros lot : j’acceptai donc son défi.

Six semaines plus tard, on me contacta pour me proposer une place à WSVN ! C’était absolument incroyable : j’évoluai dans une petite station locale et, sans même que je l’ai sollicité, on m’invitait à rejoindre une équipe aussi prestigieuse ? J’ai tout de suite compris que la bénédiction du Rabbi se réalisait et que je devais accomplir ma part du « contrat ». Il y eut des moments difficiles mais je tins bon. De fait, après analyse de ma situation, je réalise que mon succès dans cette carrière depuis est dû à ma détermination à respecter le Chabbat, quelles que soient les circonstances. Il est évident que mon engagement religieux sans faille forçait la considération de mes collègues et de mes supérieurs.

Durant des années, mon épouse et moi-même avions désiré mettre au monde des enfants. Finalement nous avons, nous aussi, envoyé une lettre au Ohel pour demander une bénédiction d’avoir enfin des enfants, en bonne santé. Notre fils Yechaya est né, en bonne santé et adorable, neuf mois plus tard !

Le Rabbi continue de nous guider. Je crois fermement que, quand on s’attache à une personne méritante, des miracles peuvent arriver. Je l’ai constaté dans ma propre vie.

 

Rosh Lowe - A Chassidisher Derher – Tichri 5778

Traduit par Feiga Lubecki

Publié dans 2017

 40 ans

En route pour le congrès ! C’est évidemment du congrès international des délégués du Rabbi qu’il s’agit ; il se déroule cette semaine à New York et voit se rencontrer, comme chaque année, de ces milliers de responsables de communautés juives aux quatre coins du monde, si différents par leurs expériences, si semblables par la force de leur conviction et si unis par leur conscience du but à atteindre. De fait, le congrès est un événement régulier et, d’année en année, il apporte son lot de retrouvailles inespérées, d’histoires individuelles extraordinaires et un grand souffle pour l’avenir, comme un vent nouveau qui soulèverait les montagnes. Qu’en dire qui n’ait déjà été dit ?

Pourtant, cette année est différente. Il y a tout juste quarante ans, en 5738 – 1977, le Rabbi eut une grave crise cardiaque à la fin des fêtes de Tichri, pendant les réjouissances de Chemini Atsérèt. Son bureau fut transformé en unité de soins intensifs et il ne le quitta plus pendant de nombreuses semaines. Certes, il ne cessa pas pour autant son œuvre. Il continua de parler, d’enseigner… mais depuis son bureau, sans apparaître en public. Cette situation, dont chacun peut imaginer comme elle fut difficile pour tous, se poursuivit jusqu’au Roch ‘Hodech Kislev, le début du mois. Ce jour-là, le Rabbi rentra chez lui et les ‘hassidim laissèrent alors éclater leur joie et leur soulagement. C’est la date fixée annuellement pour le congrès des émissaires.

Mais ce jour ne marqua pas uniquement la guérison du Rabbi, il fut aussi comme un nouveau départ. Celui qui se retourne sur ces années se rend compte à quel point elles furent pleines et riches de projets et de réalisations. C’est dans cette période que le Rabbi lança de nombreuses et nouvelles campagnes, c’est aussi là que des centaines de délégués prirent leur fonction dans le monde entier. L’arrêt n’avait pas été un ralentissement mais bien un élan donné à l’action.

Nous sommes quarante ans plus tard et, aujourd’hui, tout cela continue et s’amplifie jour après jour. « C’est après quarante ans qu’on arrive à la pensée de son maître » disent nos Sages. Après un tel laps de temps, un nouveau rapport s’établit entre la pensée et le penseur, entre le maître et le disciple. Puissions-nous donc être pénétrés de cette pensée, en saisir avec une intensité profonde toute la portée et la mettre en œuvre pleinement. N’est-ce pas la clé de notre Délivrance ?


 La plus grande pitié

La grande pitié que l’on éprouve pour le peuple juif, du fait qu’il est toujours en exil, est bien supérieure à toute pitié que l’on puisse concevoir. C’est pourquoi nous demandons à D.ieu : « Dans Ta grande miséricorde, aie pitié de nous ».

Du point de vue de « Ta grande miséricorde », du point de vue de D.ieu Qui sait la vraie dimension de la pitié, il n’existe pas la moindre explication de la longueur de l’exil !

(D’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch –

Chabbat Parchat Vayigach 5746)


 Toledot

Au bout de vingt ans, les prières d’Its’hak et de Rivka pour avoir un enfant sont exaucées. Devant les difficultés de Rivka, D.ieu lui annonce : « Deux nations sont en ton giron et la plus jeune prévaudra ».

Essav naît le premier, suivi de Yaakov qui le tient par le talon.

Essav devient un « chasseur rusé, un homme des champs » alors que Yaakov est celui qui réside « dans les tentes de l’étude ».

Yaakov préfère Essav et Rivka est plus proche de Yaakov.

Essav, épuisé et affamé après une partie de chasse, vend son droit d’aînesse à Yaakov en échange d’un plat de lentilles rouges.

A Grar, terre des Philistins, Its’hak présente Rivka comme sa sœur de peur d’être tué par quelqu’un qui convoiterait sa beauté. Il cultive la terre et creuse une série de puits. Les deux premiers suscitent des affrontements avec les Philistins qui finissent par le laisser jouir tranquillement des eaux du troisième.

Essav épouse deux femmes ‘Hitites.

Its’hak vieillit et devient aveugle. Il désire alors de bénir Essav, avant de mourir. Profitant de l’absence d’Essav, parti chasser, Rivka revêt Yaakov des habits de son frère, prépare le plat qu’Essav destinait à Its’hak et envoie Yaakov le lui offrir. Yaakov reçoit alors les bénédictions de son père pour « la rosée du ciel et le gras de la terre » ainsi que celle de la domination sur son frère. A son retour, Essav découvre la supercherie et Its’hak le bénit alors pour pouvoir survivre par son glaive et prendre la suprématie lorsque son jeune frère faiblira.

Yaakov s’enfuit de ‘Haran pour échapper à la colère d’Essav et trouver une épouse dans la famille du frère de sa mère, Lavane.

Essav épouse une troisième femme, Ma’halat, la fille d’Ichmaël.

Chaque partie de la Torah s’offre à de multiples explications. On distingue généralement quatre niveaux d’interprétation, depuis celle du Pchat, le sens littéral, pour aboutir au Sod, le sens cabalistique.

Et pour chacun de ces quatre niveaux, nos Sages affirment qu’il existe 600 000 explications. Dans certains passages, le sens simple de la Torah est le plus clair. Cependant, malgré le fait qu’en règle générale, le sens cabalistique soit le plus complexe, dans certains cas, il permet d’apporter un sens plus clair sur le passage. Et c’est effectivement le cas, dans la Paracha de cette semaine, Toledot.

Il y est relaté que dans son âge avancé, Its’hak voulut bénir son fils Essav et non Yaakov. Pourquoi voulut-il bénir Essav à la place de Yaakov ? Il savait qu’Essav était impie. Et bien que nos Sages affirment qu’Essav essayait constamment de berner Its’hak, nous savons, d’après ce passage précis, qu’Its’hak savait que quelque chose n’allait pas chez Essav. Quand Yaakov revêtit les habits d’Essav et l’imita pour obtenir la bénédiction, il mentionna le Nom de D.ieu. Et Its’hak douta immédiatement de son identité. En effet, seul Yaakov mentionnait sans cesse le Nom de D.ieu. Nous déduisons de ce passage qu’Its’hak savait qu’Essav n’était pas un homme qui craignait réellement le Tout Puissant. Il apparaît donc troublant qu’il ait voulu donner la bénédiction à Essav plutôt qu’à Yaakov.

Le AriZal, cité dans la philosophie ‘hassidique, apporte une explication à cette interrogation.

Il explique que chaque existence matérielle dans ce monde possède une source spirituelle dans le royaume spirituel. Mais plus encore, plus l’objet tombe bas dans ce monde, plus élevée est sa source spirituelle. La métaphore donnée est celle d’un mur qui s’écroule. Plus les pierres sont en hauteur, plus elles tombent bas et loin de l’emplacement initial du mur, alors que les pierres du bas se retrouvent plus proches du mur originel. Par le même ressort, quelque chose de très bas, dans ce monde, possède une source très élevée dans le monde spirituel et quelque chose qui paraît très élevé ici-bas a une source spirituelle moindre.

Ce principe s’applique également à Yaakov et Essav. Bien que dans ce monde Yaakov parût le plus saint et Essav l’impie, lorsqu’il s’agit de leurs sources spirituelles, par certains aspects, Essav était plus élevé que Yaakov. Dans le langage de la Cabale, la source spirituelle d’Essav émanait du monde de Tohou et celle de Yaakov du monde de Tikoun.

Its’hak ne se trompait pas sur la nature d’Essav telle qu’il lui apparaissait mais il savait que sa source spirituelle était extraordinaire et celle-là même qu’il aspirait à révéler par sa bénédiction. Il est sûr que Yaakov était réellement un saint homme mais Its’hak voyait le potentiel d’Essav, ce qui d’ailleurs se révélerait, au fil du temps, par les illustres convertis qui allaient rejoindre le rang des dirigeants du peuple juif : Rabbi Méir, Chmaya, Avtalione, Ovadia, Onkeloss… tous ceux-là contenus dans l’âme d’Essav. Et si Its’hak voulait donner cette bénédiction à Essav, c’était pour révéler toute cette sainteté dans le monde. Le problème était que la sainteté d’Essav, profondément enfouie dans son âme, ne se révélait que dans sa source, dans les dimensions les plus élevées du monde spirituel. Mais dans le monde matériel qui est le nôtre, elle ne pouvait se dévoiler.

C’est ce à quoi il est fait allusion dans un récit que relatent nos Sages à propos d’une bataille qui se livra lors de l’enterrement de Yaakov. La conséquence en fut la décapitation d’Essav. Et sa tête fut enterrée aux côtés d’Its’hak. Comment une telle chose est-elle possible ? Cet homme était vil et un homme vil ne peut être enseveli aux côtés d’un Tsaddik ! Mais ce que nous avons vu nous indique que dans sa source, Essav était saint. Sa tête, siège de l’aspect le plus élevé de son âme, avait donc sa place dans ce lieu.

Mais la femme d’Its’hak, Rivkah, elle, vit que c’était Yaakov qui avait la capacité de faire descendre la sainteté dans ce monde et c’est la raison pour laquelle elle l’encouragea à arracher la bénédiction à son frère.

La bénédiction attribuée à Yaakov ne lui permit pas seulement de révéler la sainteté de son âme, dans ses sources spirituelles à lui, mais aussi de purifier Essav et dévoiler sa sainteté, d’élever son niveau. Non seulement releva-t-il sa propre source et celle d’Essav mais il parvint à un niveau encore plus haut qu’eux deux.


 Pourquoi met-on du sel à table ?

Nos Sages comparent la table à l’autel sur lequel on offrait des sacrifices dans le saint Temple de Jérusalem. Nos repas sont donc comparés aux sacrifices qui étaient mangés en état de pureté et sainteté. Or, il était obligatoire de saler tous les sacrifices (en offrant un sacrifice, le Juif consacrait aussi bien le règne animal que le règne végétal – avec des libations de vin – et le règne minéral – avec le sel). C’est pourquoi il est d’usage de mettre du sel à table.

D’autre part, quand des Juifs sont assis et attendent que tous les convives aient lavé les mains avant de commencer le repas, ils ne sont occupés à aucune Mitsva et il se pourrait que des mauvaises influences les accusent. Il convient donc à ce moment de rappeler qu’une alliance a été conclue entre D.ieu et les Juifs, « Une alliance de sel (donc éternelle) » et c’est elle qui les protège contre toute accusation.

Selon la Kabbale, on commence le repas en trempant une tranche de pain trois fois dans le sel. Le maître de maison, qui tranche le pain, est le premier à en manger après avoir récité la bénédiction « Hamotsi ». Ensuite il distribue du pain à tous les convives, sans le donner directement dans la main (de façon à ne pas faire honte car c’est à des mendiants qu’on donne directement dans la main). On ne jette pas le pain en direction des convives mais on le pose dignement.

A la fin du repas, on se rince les doigts et on les passe sur la bouche pour enlever toute trace du « sel de Sodome », très fort et potentiellement dangereux car susceptible de causer la cécité si on le passe sur les yeux. C’est aussi une façon d’éviter d’être contaminé par la philosophie des habitants de Sodome qui étaient « aveugles » aux besoins des autres et refusaient de pratiquer l’hospitalité.

 (d’après Rav Chalom Dov Ber Blau - « Assadère Lisseoudata »)


 Une dette enfin remboursée…

Notre fils Mendi étudie dans une Yechiva à Natanya. Auparavant, cette Yechiva était située à Hadéra. Malheureusement, le bâtiment était très vétuste et dans un état de délabrement difficile à imaginer. Au point que les jeunes étudiants étaient obligés d’acheter ou de confectionner des pièges contre les nuisibles qui y pullulaient. Alertée, la mairie obligea l’établissement à fermer ses portes, sous prétexte que la cuisine ne satisfaisait pas aux normes d’hygiène élémentaires. Le bâtiment fut condamné et l’ordre de destruction ne tarda pas.

La Yechiva fut transférée à Natanya dans un bâtiment prêté par un autre mouvement ‘hassidique. Mais cette solution ne s’avéra guère plus réjouissante car les conditions étaient loin d’être idéales. Bien entendu, la direction affirma que ce n’était qu’une question de temps, le temps d’encaisser des chèques, n’est-ce pas, pour obtenir des locaux plus fonctionnels.

Les mois passèrent puis les années…

Toujours pas d’argent.

Le directeur de la Yechiva, Rav Horenstein tenta d’économiser sou après sou pour acquérir un nouveau bâtiment. Effectivement, au milieu de l’année dernière, la Yechiva emménagea dans une nouvelle structure, bien qu’elle ne fût pas entièrement terminée. Rav Horenstein procéda à un appel d’offres pour décider de l’entreprise la plus apte à effectuer les derniers travaux. Bien entendu, il choisit celle qui proposa le meilleur devis et un ouvrier se présenta. Il était orné d’une multitude de tatouages mais travailla très soigneusement, sans relâche, durant trois jours.

Quand il eut terminé, il signala à Rav Horenstein qu’il y avait encore beaucoup de finitions à entreprendre, ce que ce dernier savait bien sûr mais… comme vous l’avez deviné, il manquait les fonds nécessaires. L’ouvrier renchérit :

- Pourquoi attendre ? Laissez-moi faire ! Vous voyez bien que je suis le moins cher !

- D’accord ! accepta Rav Horenstein.

L’homme travailla encore plusieurs jours, boucha les fissures, passa un coup de peinture ici et là, arrangea la plomberie, posa du carrelage dans les salles d’eau, vérifia les serrures… puis présenta la note : 200 000 Chekalim (près de 50 000 euros). Rav Horenstein soupira :

- Je peux payer en combien de mensualités ?

L’homme regarda le Rav quelques minutes en silence. Puis, d’un coup de stylo, barra la facture d’un grand signe : PAYÉ !

- Je… Je ne comprends pas ! balbutia Rav Horenstein.

- C’est une dette que je dois au mouvement ‘Habad, expliqua l’homme tatoué. Il y a de nombreuses années de cela, je vivais en Inde. J’y vivais même très bien : du trafic de drogue ! J’étais un dealer très doué. Et bien sûr, j’étais aussi un consommateur. Un jour, on m’a arrêté et j’ai été condamné à une très lourde peine de prison, je l’avais bien mérité. Mais c’était très dur...

Une nuit, alors que je désespérais dans ma cellule, un gardien ouvrit la porte et chuchota à mon oreille : « Tu as deux minutes pour déguerpir ! ». J’ai demandé : « Pourquoi ? Que se passe-t-il ? ». Il me montra un homme qui m’attendait au bout du couloir et qui confirma : « Sors vite de là ! ». J’ai pris mes jambes à mon cou et, dehors, j’ai rencontré un jeune rabbin que je ne connaissais pas. Il m’a tendu un billet d’avion : « Prends ce taxi et file à l’aéroport. L’avion pour Israël décolle bientôt ! Et ne reviens plus jamais ici ! ».

Je lui ai demandé combien je lui devais et il a répondu : « Rien ! Tu ne me dois rien ! Si ce n’est la promesse de ne plus recommencer et, quand tu en auras l’occasion, tu rembourseras à des Loubavitch ! ».

J’ai appris plus tard qu’il s’agissait de Rav Gabriel Holtzberg qui fut assassiné avec son épouse et trois autres Juifs dans une terrible attaque terroriste le 28 novembre 2008 à Bombay. Maintenant je peux rembourser l’immense dette que j’avais envers lui ! Que son souvenir soit béni !

‘Hanni Dunin

Traduite par Feiga Lubecki

Publié dans 2017

 Sereinement…

Lorsque le monde tremble, que les peuples et les nations s’affrontent, lorsque les idées qu’on tenait pour acquises sont remises en cause de manière radicale, parfois un sentiment de lassitude émerge. Il est vrai que le peuple juif a traversé bien des tourmentes, qu’il a été le témoin, et aussi la victime, de bien des bouleversements et, pour cette raison, un tel sentiment peut être explicable. Pourtant, chacun sait qu’il est bien vain et que, au-delà des futiles agitations, il faut poursuivre son chemin.

Lorsque le paysan laboure sa terre, il jette parfois un regard inquiet vers les nuages qui assombrissent le ciel. Parfois aussi, il ne sait pas quel caprice des hommes il devra affronter. Cependant, avec entêtement, il trace son sillon. L’observateur le regardant à son travail pensera peut-être que cet homme est inconscient des dangers qui le menacent ou que sa sérénité n’est qu’apparente. Il commettrait ainsi une erreur. Le laboureur sait que sa réussite finale ne dépend que de lui et il poursuit son chemin. Il ne s’arrêtera qu’à la fin de son travail, aussi long qu’il soit, autant de patience qu’il demande. D’où tire-t-il cette force insurmontable ? Comment ne se laisse-t-il pas arrêter par les multiples obstacles ? Parce qu’il sait où il va et comprend le sens de ses actions. N’est-ce pas ainsi que le monde avance ?

De la même manière, le peuple juif poursuit son chemin. Les menaces peuvent paraître nombreuses, d’ordre matériel ou spirituel, il n’en continue pas moins son œuvre de Torah et de Mitsvot. Son sillon est droit et sa terre fertile. Il sait qu’il fera lever les plus belles moissons. Il sait aussi qu’elles seront le fruit de son effort constant. Et cela ne le désespère pas. Bien au contraire, il assume l’enjeu et tout ce qu’il implique. C’est avec une sérénité profonde qu’il persévère car il est conscient que, de son obstination, dépend aussi l’avenir.

Décidément, le peuple juif est bien cet éternel optimiste qui comprend qu’être conscient de ce que l’on fait, et y croire, est la clé de bien des merveilles : un peuple qui croit dans ses rêves et assiste toujours à leur réalisation.


 Machia’h en chacun

La capacité de Machia’h à délivrer tout le Peuple juif vient du fait qu’il possède un lien avec le peuple tout entier c’est-à-dire qu’il existe une partie de lui en chaque Juif.

C’est ainsi qu’il faut comprendre la déclaration de Moïse (Bamidmar 11 : 21) : « Le peuple au sein duquel je suis est constitué de six cent mille hommes ». Il signifie, par ces mots, qu’une parcelle de lui-même se trouve littéralement dans chacun des individus concernés.

C’est grâce à cela qu’il put tous les libérer d’Egypte.

(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch, Pessa’h 5743)


 ‘Hayé Sarah

Sarah meurt à 127 ans. Elle est enterrée dans la Grotte de Ma’hpélah qu’Avraham a acquise pour quatre cents chékèls d’argent auprès d’Efrone le ‘Hittite.

Avraham envoie son serviteur Eliézer, chargé de cadeaux, à ‘Harane, pour y trouver une épouse pour son fils Its’hak.

Eliézer demande à D.ieu un signe qui lui permettra d’identifier la bonne épouse.

Quand apparaît Rivka, la fille du neveu d’Avraham, Bethouel, elle s’avére correspondre à ce qu’attendait Eliézer. Convié dans sa famille, il relate les événements du jour et Rivka repart avec lui en Canaan où ils rencontrent Its’hak en train de prier dans les champs. Ils se marient et Its’hak se trouve réconforté de la disparition de sa mère.

Avraham épouse Ketoura (Hagar), a six autres fils. Mais Its’hak reste son seul héritier. Il meurt à 175 ans et est enseveli à côté de Sarah par ses deux fils aînés : Its’hak et Ichmaël.

Pourquoi sommes-nous là ? Que cherchons-nous à atteindre ?

Et puis, qu’y a-t-il de particulier à propos d’Avraham Avinou, qu’apporta-t-il de nouveau dans le monde et dans sa relation avec D.ieu ?

Il est sûr que bien avant lui, et même à son époque, existaient des monothéistes, des gens convaincus de l’unicité de D.ieu. Adam et Noa’h, Malkitsédèk, prêtre de D.ieu auquel Avraham avait donné la dîme.

En quoi Avraham se distinguait donc-t-il et en quoi était-il si spécial ?

La Paracha de cette semaine nous décrit avec une réelle abondance de détails une transaction financière entre Avraham et Efrone pour l’achat d’une partie de terre, la première partie de la Terre Sainte, de la terre d’Israël. Il s’agit de la grotte de Ma’hpélah, le lieu de sépulture dans lequel il allait enterrer Sarah et où il reposerait lui-même par la suite ainsi que ses enfants et ses petits-enfants.  

Pourquoi la Torah, que l’on sait économe de mots, s’étend-elle avec tant de détails pour décrire une simple transaction commerciale ? Le verset 17 de la Paracha énonce : « le champ d’Efrone s’éleva ». Cela signifie que la simple transaction d’Avraham pour acheter ce champ suscita une élévation du champ, le transforma, en fit quelque chose de saint, de spécial. Il n’y avait même pas encore enseveli Sarah mais le fait que ce lieu appartienne à Avraham en fit un lieu très spécial.  

Et c’est cela qu’il nous revient de faire dans ce monde : dévoiler la Divinité qui réside dans la matérialité. C’est cela qui distingue Avraham et le but de la présence ici bas de chaque enfant d’Israël : élever le matériel et ainsi le transformer en spirituel.

La Paracha ‘Hayé Sarah relate également avec force détails la recherche d’une épouse pour Its’hak. Avraham envoya son serviteur Eliézer pour trouver cette future épouse. La Torah raconte qu’Eliézer adressa à D.ieu une prière et une requête précise. Il demanda qu’un signe lui soit montré des Cieux pour lui indiquer s’il avait trouvé la jeune-fille adéquate ou non. Il allait demander à la jeune-fille de lui donner à boire pour étancher sa soif. Et si elle abreuvait également ses chameaux, ce serait alors le signe qu’elle était destinée à Its’hak. La Torah poursuit en relatant que dès qu’il eut fini de prononcer ces mots, Rivka apparut et tout comme il l’avait indiqué, non seulement lui proposa-t-elle à boire mais elle abreuva également tous ses chameaux. Eliézer sut alors, de façon certaine, qu’elle était celle que D.ieu avait choisie pour être l’épouse d’Its’hak.

Bien que ce qui précède indique qu’Eliézer demanda un signe pour pouvoir reconnaître la personne adéquate, tout ce que note la Torah est significatif et donc le choix précis de ce signe l’est également.

Au niveau le plus simple, l’on peut dire qu’Eliézer voulait déterminer si Rivka était une personne généreuse. Et le fait qu’elle donna également à boire à ses chameaux en attesta.

A un niveau plus profond, la philosophie ‘hassidique explique que par ce signe s’exprime la différence entre la sainteté et le contraire de la sainteté.

Que représente l’idée de la sainteté au niveau céleste ?

La sainteté se retrouve dans le concept de la Création. Le monde a été originellement créé, ex nihilo, à partir de rien, et son existence est continuellement maintenue. Et en soi cela constitue un acte créateur, un acte de partage de la part de D.ieu.

Il en va de même chez l’individu, ici-bas, dans ce monde matériel. Comment discerner si une personne est sainte ? C’est lorsqu’elle est altruiste, qu’elle ne se contente pas de garder ce qu’elle possède pour elle-même, dans le sens matériel, c’est-à-dire en ce qui concerne ses possessions, mais également dans le sens spirituel, dans ce qui est relatif à son savoir, ce qu’elle transmet aux autres.

La « non sainteté » spirituelle est exactement l’inverse : c’est le fait de garder tout ce que l’on possède et de retenir toute possibilité d’exercer une bonne influence. Cela revient à empêcher ou à minimiser l’acte créateur.

Il en va de même dans le sens matériel : tenter d’interrompre la source de vie, la vitalité, le don d’argent ou le partage des connaissances sont des actes qui prennent leur source dans le contraire de la sainteté.

Dans le Tanya, Rabbi Chnéor Zalman explique que le niveau spirituel le plus bas possible est celui qui ne fait que recevoir et ne donne rien. Et le Rabbi de mentionner certains insectes qui ne font qu’ingérer et ne produisent rien à l’extérieur, symbolisant ici le plus bas niveau de la non-sainteté.

Telle est donc la raison du choix du signe que fit Eliézer. Il savait que bon nombre de gens, dans l’environnement où évoluait Rivka, n’étaient pas particulièrement saints. Cela se confirme dans les paroles de nos Sages qui affirment que trouver Rivka dans un tel lieu était comparable à trouver « une rose parmi les épines ».

Il voulait donc être assuré que la jeune fille qu’il trouverait pour Its’hak serait complètement imprégnée de sainteté, que toute son existence serait marquée par le fait de donner, ce qui symbolise la sainteté en général. Il choisit donc ce signe en particulier : non seulement elle allait lui donner à lui, parce qu’il l’avait demandé, mais elle allait donner chaque fois que cela lui serait possible, même sans en avoir été sollicitée, ce qui est attesté par le fait qu’elle abreuva les chameaux alors que cela demandait un effort physique difficile. Elle voulait donner, était prête à le faire, sans même qu’on le lui demande ou en être obligée.

C’était donc la femme parfaite pour Its’hak, celle qui allait être la mère de Yaakov et donc la Matriarche du Peuple juif tout entier.


 L’allumage des bougies de Chabbat : qui, quand, comment ?

- Il est très important d’allumer les bougies le vendredi avant l’heure indiquée dans le calendrier. Si on est en retard, il vaut mieux ne pas allumer !

- On a l’usage de glisser quelques pièces dans la boîte de Tsedaka (charité) avant d’allumer les bougies.

- La petite fille allume sa bougie avant sa maman afin que celle-ci puisse surveiller qu’elle ne se brûle pas avec les allumettes.

- Les bougies doivent durer au moins une heure et demi (une demi-heure dans la nuit).

- Une femme mariée (ou qui a été mariée) allume deux bougies.

- Certaines femmes ont la coutume d’allumer des bougies supplémentaires selon le nombre de leurs enfants.

- Après avoir allumé (sa ou) ses bougies, elle tourne les mains trois fois autour des bougies puis couvre son visage de ses mains et prononce la bénédiction :

Barou’h Ata Ado-naï Élo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chel Chabbat Kodèch.

Béni sois-Tu Éternel notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné d’allumer les bougies du saint Chabbat.

- Il est recommandé de profiter de cet instant si spécial pour prier pour tous ses besoins – matériels et spirituels – ainsi que ceux de tout le peuple juif et surtout pour la venue rapide de notre juste Machia’h.

- Quand une fille ou une femme allume (sa ou) ses bougies, elle ajoute une lumière et donc une influence positive dans le monde et augmente la protection divine sur le peuple juif.

(d’après le Kitsour Choul’hane Arou’h)


 Ma bougie

« Chut, attention les enfants ! Fermez bien les volets et venez, allumons les bougies de Chabbat ! ».

C’était ainsi que nombre d’enfants juifs étaient élevés en Union Soviétique dans les années 50 et 60. Aucune explication sur leur héritage juif, les fêtes, les prières, les actes rituels… Moins ils en savaient, moins ils risquaient de trahir leurs parents qui persistaient à maintenir leurs traditions religieuses.

Vendredi soir, en été 1979 : les flammes de 200 petites bougies tremblotent fièrement dans une colonie de vacances Camp Emounah près de New York. Elles brillent du même éclat que les yeux des petites filles qui les avaient allumées. Laura avait quitté la Russie six mois plus tôt, avait rejoint les États-Unis mais n’avait aucune amie, ne parlait même pas la langue. Grâce à la gentillesse d’un rabbin, elle avait été admise dans cette colonie, avait appris aussi bien l’anglais que l’hébreu et, surtout, s’était fait de nouvelles camarades. En particulier sa monitrice, Yona qui s’occupait d’elle, lui expliquait le judaïsme, l’encourageait et la stimulait.

Durant la colonie, Laura participa à un concours et écrivit une rédaction à propos de son expérience du vendredi soir. Comme celles d’autres petites filles, elle fut publiée dans un petit livre intitulé « Ma propre bougie ». Ce livre, c’était Madame Esther Sternberg qui l’avait édité, à la demande spéciale du Rabbi de Loubavitch : ce livre était destiné à inspirer des femmes et filles juives de par le monde quant à l’importance de la Mitsva de l’allumage des bougies de Chabbat.

A la fin de la colonie, la monitrice Yona offrit à sa protégée (Laura) un petit livre de prières dans lequel elle avait collé une photo du Rabbi portant les Téfilines et le Talit avec ces quelques mots écrits en russe : « …Que ce Siddour avec le portrait d’un Juif saint soit vraiment ton guide dans la vie ! ».

Trente-deux ans plus tard.

Laura s’était bien intégrée en Amérique, habitait à Philadelphie et avait gardé le contact avec ses amies émigrées de Russie comme elle à la fin des années 70. Une de ses amies s’appelait Yana.

Un Chabbat de juin 2011, alors que Yana et sa famille avaient été invitées par le rabbin de leur ville pour passer Chabbat, sa fille aînée découvrit un petit livre dans la bibliothèque : « Ma propre bougie » et le feuilleta. Tout à coup, elle remarqua un nom : Laura Brovender. C’était le nom de jeune fille d’une bonne amie de sa mère. Interpelée, Yana lut avec incrédulité cet article ancien dans lequel une petite fille, Laura, dépeignait l’émotion qui l’étreignait chaque fois qu’elle allumait la bougie de Chabbat. Sur le champ, elle décida de photocopier cet article et de le faire encadrer pour l’offrir par surprise à son amie.

En recevant ce cadeau, Laura fut bien sûr très émue et décida qu’elle devait absolument retrouver la dame qui avait compilé tous ces articles dans le livre. Bien vite, elle lui parla au téléphone et Mme Sternberg put raconter comment ce livre avait vu le jour à l’initiative du Rabbi. Quelques mois plus tard, en décembre, Laura et Yana passèrent un Chabbat inoubliable à New York, au domicile de Mme Sternberg. Là, elles purent allumer leurs bougies de Chabbat, en compagnie de leurs filles respectives, recréant un lien indéfectible entre elles.

Mais Laura ressentait qu’il manquait encore quelqu’un à ce beau tableau : sa monitrice bien-aimée, Yona qui l’avait initiée à la beauté du Chabbat, qui lui avait offert son premier livre de prières, qui l’avait encouragée durant la colonie et lui avait donné confiance en elle-même. Trente-deux plus tard, elle aurait voulu lui signifier combien son action et son affection l’avaient marquée et avaient impacté sa vie.

Hélas, Yona avait péri 26 ans plus tôt dans un terrible accident de voiture, laissant derrière elle un mari et quatre enfants en bas âge. Ces enfants maintenant adultes furent heureux d’apprendre encore d’autres détails sur leur défunte mère : bien sûr, ils savaient combien elle avait utilisé chaque minute de sa courte vie pour répandre le bien autour d’elle mais chaque nouvelle preuve de cet impact positif sur les autres leur réchauffait le cœur. L’empathie d’une jeune monitrice de colonie de vacances avait profondément et durablement affecté une petite immigrée d’Union Soviétique et avait affecté durablement l’âme de Laura, de sa fille et certainement de toutes les générations suivantes dans une chaîne ininterrompue de femmes juives depuis des millénaires.

Quand nous accomplissons une bonne action, il se peut que nous en constations les effets immédiatement. Mais nous ne pouvons pas imaginer leur impact qui se propage souvent très loin dans le temps. Puisse le souvenir de la gentillesse de Yona accompagner ses descendants et tout le peuple juif !

Joannie Tansky – Chabad.org

Traduite par Feiga Lubecki

Publié dans 2017