Samedi, 9 juillet 2016

  • Kora’h
Editorial

 3 Tamouz, jour d’exception

C’est une idée classique : le Juifs ont, de tous temps, fait du calendrier bien plus qu’un outil de suivi du temps qui passe. Conçu comme l’acte majeur d’un architecte sublime, Il incarne pour eux une véritable pulsation qui fait vivre le lien avec D.ieu. C’est dire que toute date est marquante. Pourtant certaines scandent le calendrier d’une façon plus profonde. Et ce que l’on y ressent et que l’on peut y puiser dépasse largement le commun des jours, aussi grand et nécessaire soit-il. C’est ainsi que revient le 3 Tamouz, le jour du départ de ce monde du Rabbi, il y a 22 ans, sa Hilloula.

Commémorer la Hilloula d’un Rabbi, d’un de ces sages qui ont reçu pour tâche de guider notre peuple, a toujours été une tradition juive. Mais il ne s’est jamais agi d’en faire une journée de plus dans un deuil infini. La notion même de Hilloula est celle d’une célébration  plus que celle d’une mélancolie entretenue. Cette idée est sans doute encore plus vraie quand il est question du 3 Tamouz. Chacun le sait : de son vivant, le Rabbi ne cessa pas un instant tout à la fois d’agir et d’encourager à l’action. De fait, dans le contexte si difficile des années d’après-guerre, il redonna, de cette façon, au judaïsme un certain goût à la vie. Il réapprit à une communauté largement oublieuse et souvent désespéré le bonheur d’être Juif. Ce caractère, si essentiel, ne peut s’interrompre après le 3 Tamouz. Au contraire, il s’intensifie en nous et, sans doute, par nous. En d’autres termes, il nous revient de continuer, ici-bas, l’œuvre entreprise par le Rabbi et de faire qu’ici et maintenant en apparaisse l’aboutissement ultime.

La date du 3 Tamouz prend ainsi toute sa réelle importance. Elle nous permet de nous hisser sur de nouvelles hauteurs. Les commentateurs enseignent que, lors d’une Hilloula, l’âme du sage concerné s’élève de degré en degré jusqu’à des niveaux que les mots ne peuvent décrire. Ils précisent encore que cette élévation entraîne avec elle celle de tous ceux, y compris dans ce monde, qui s’attachent à son œuvre et à son enseignement. C’est bien là que se situe l’enjeu pour chacun. Il nous est donné de faire du 3 Tamouz un jour différent de tous, qui nous donnera cette inspiration irremplaçable. Il nous est donné d’en faire le jour de notre libération spirituelle personnelle, ce qui conduira enfin à la Délivrance collective que le Messie nous apportera.   

Etincelles de Machiah

Le temps de la sérénité

La Délivrance est qualifiée de «jour qui sera Chabbat et repos pour l’éternité.» En effet, sa venue implique la disparition de l’exil, c’est-à-dire de ce qui constitue l’opposé même de la sérénité.

Au sujet de ce temps d’exil, les commentateurs déclarent : «Malheur aux enfants qui ont été exilés de la table de leur Père.» Avec la Délivrance, ce sont toutes ces tribulations et ces difficultés qui disparaîtront, tant matérielles que spirituelles. 

(D’après un commentaire du Rabbi du 5 Sivan 5751) 

Vivre avec la Paracha

 KORA'H

Kora’h initie une révolte qui remet en question la direction de Moché et l’octroi de la kehounah (prêtrise) à Aharon. Il est en compagnie des deux ennemis invétérés de Moché : Datan et Aviram. Se joignent à eux 250 membres distingués de la communauté qui offrent les ketoreth (encens) pour prouver qu’ils méritent la prêtrise. La terre s’ouvre et engloutit les rebelles et un feu consume les offrandes de ketoreth.

La plaie qui s’abat alors est interrompue par la propre offrande de ketoreth d’Aharon. Son bâton se couvre miraculeusement de bourgeons et fait jaillir des amandes, comme preuve que sa nomination comme Grand Prêtre est ordonnée par D.ieu.

D.ieu ordonne qu’une teroumah (« prélèvement ») de chaque récolte de grains, vin et huile, ainsi que de tout premier-né des moutons et des bovins, et d’autres cadeaux particuliers, soient donnés aux Cohanim (prêtres »).

Un jour, lors d’une ye’hidout (entretien privé avec le Rabbi), un Juif d’origine française évoqua une discussion qu’il avait eue avec des ‘hassidim de son pays, concernant leurs approches divergentes. D’un côté, il était attiré par la fraternité et la joie qu’ils manifestaient mais certaines caractéristiques le repoussaient.

L’un des aspects qui le gênait le plus, dit-il au Rabbi, était l’affection excessive des ‘hassidim pour le Rabbi lui-même.

« Ils apprennent de moi », répondit le Rabbi. « Moi aussi j’ai un amour excessif pour chaque Juif ».

* * *

La Parachah de cette semaine relate que Kora’h, un individu riche, intelligent et spirituellement engagé, mena une révolte contre Moché. En quoi consistait le désaccord de Kora’h ? Il dit à Moché : « La nation tout entière est sainte. D.ieu réside parmi eux. Pourquoi te hisses-tu au-dessus de l’assemblée de D.ieu ? »

Une courte introduction est nécessaire pour comprendre le sens profond du reproche de Kora’h. Il désirait également être un dirigeant et sa rébellion avait pour but qu’il remplace Moché. Comment donc pouvait-il objecter à la position de chef de Moché ?

En réalité, Kora’h ne voyait aucun problème dans le fait que le Peuple Juif eût un chef. Ce à quoi il s’opposait était le type de direction que Moché incarnait.

Moché représentait l’autorité absolue. Il parlait au nom de D.ieu. Le peuple l’écoutait, non parce que ce qu’il disait avait l’air juste, mais parce qu’il partageait avec eux la parole de D.ieu. Qu’ils comprennent ou non, ils étaient obligés de se soumettre.

Kora’h objectait à cette démarche. Il voulait donner au peuple une direction démocratique. Il suggérait un mode d’action : le peuple entendrait le commandement, y réfléchirait et déciderait de l’accomplir ou non. S’il n’était pas d’accord, il envisagerait d’autres alternatives.

Qu’y a-t-il de mal dans une telle approche ?

D’un point de vue superficiel, rien.

En fait, il s’agit même d’un type de direction dont nous avons tous l’habitude. Mais il pose un certain problème : il ne permet jamais à la personne d’aller au-delà de ses propres perspectives. Puisqu’en dernier ressort, son acceptation dépend de sa propre compréhension, elle ne peut évoluer que dans les limites de son propre intellect. Elle ne veut ni ne peut aller au delà.

Un véritable dirigeant donne aux membres du peuple la perspective d’un but qui dépasse leur propre compréhension et de cette façon leur permet d’acquérir une identité encore plus élevée que celle du moi individuel.

C’est ce que Moché donne au Peuple d’Israël. Parce que, comme nous l’avons dit plus haut, Moché transmet la parole de D.ieu, il peut conduire les Juifs à un bien qui dépasse de loin leur propre intellect, approche qu’ils n’auraient jamais pu emprunter d’eux-mêmes !

Mais comment pouvons-nous savoir que cela représente la vérité ? Puisque nous ne sommes pas à même de comprendre la profondeur du message de Moché et devons l’accepter par foi pure, y a-t-il un moyen pour nous convaincre de le faire ?

C’est exactement ce que demanda Kora’h. Moché tenta de lui dire, à lui et à ses adeptes, de se soumettre. Par souci pour eux, il les supplia de ne pas arriver à une confrontation mais ils insistèrent. Pour entériner la direction de Moché, D.ieu suscita alors un miracle, provoquant un tremblement de terre qui avala Kora’h et toute sa troupe.

Il ne s’agit pas seulement d’un récit historique. Dans chaque génération, D.ieu nous envoie des chefs comme Moché, des géants dans la Torah qui ne parlent pas en leur nom propre mais au nom de D.ieu. Ils donnent à notre peuple l’occasion de renforcer sa relation avec D.ieu et de Le servir d’une façon qu’ils n’auraient pu concevoir tout seuls.

Perspectives

Ce qui précède est lié au concept du Machia’h car dans son Ere, l’autorité absolue, avec laquelle Moché gouverna, fera son retour. Machia’h ne sera pas seulement un dirigeant juif, il sera un roi.

Pourquoi un roi ? Pour sortir notre peuple des limites de sa propre compréhension et l’exposer à une conscience de la Divinité qu’il n’aurait pu recevoir par lui-même.

Des années plus tard, il me confia que, rétrospectivement, il n’avait pu s’empêcher de remarquer comment tout le processus avait fonctionné à la perfection. Normalement, de telles transactions impliquent des semaines et des mois de paperasses, avec des complications qui se greffent au cours des négociations. Mais, d’une manière ou d’une autre, dans notre cas, il n’y avait eu aucune difficulté particulière.

La bénédiction du Rabbi avait donné une toute autre dimension à notre Chli’hout et se ressent encore aujourd’hui positivement.

Rav Tuvia Teldon - Long Island, NY – A Chassidisher Derher

Traduit par Feiga Lubecki

Le Coin de la Halacha

 Coutumes liées au jour de la Hilloula du Rabbi
3 Tamouz (cette année samedi 9 juillet 2016)

Le Rabbi avait fixé un certain nombre de coutumes à respecter à l’occasion de la Hilloula du Rabbi précédent. Ce sont ces mêmes coutumes qui ont été reprises pour le 3 Tamouz. En voici quelques-unes :

• On allumera une bougie de vingt-quatre heures avant celles de Chabbat le 8 juillet.

• Pendant chacune des trois prières du jour, on allumera cinq bougies devant l’officiant. Cette année on allumera des bougies de 24h avant Chabbat.

• Le matin, on donnera de la Tsedaka (charité), au nom de chacun des membres de sa famille, pour une institution du Rabbi. Cette année on donnera la Tsedaka avant ou après Chabbat.

• On consacrera un moment dans la journée pour parler du Rabbi et de sa grande Ahavat Israël (amour du prochain) à sa famille et son entourage.

• On étudiera les chapitres de Michnayot correspondant aux lettres qui constituent le nom du Rabbi.

• On étudiera les enseignements du Rabbi.

• On rédigera un « Pane », « Pidyone Néfech », une lettre de demande de bénédictions (en y précisant les prénoms et les prénoms de la mère de chacun) qui sera lue ou déposée sur le Ohel du Rabbi. Cette année on rédigera un “Pane” avant Chabbat.

N° de fax du Ohel : 00 1718 723 44 44

N° de fax du Beth Loubavitch : 01 45 26 24 37

Adresse du Ohel : 226-20 Francis Lewis Blvd – Cambria Heights, New York 11411
E-mail : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Le Recit de la Semaine

 Je ne lui avais rien demandé…

Mon épouse et moi-même sommes partis en Chli’hout en Tichri 1978, bien décidés à donner toute notre énergie et nos connaissances à l’accomplissement de notre mission : encourager les Juifs de notre quartier de New York à mieux connaitre le judaïsme et le transmettre à leurs enfants. Nous étions remplis d’idéalisme et nous nous sommes jetés dans l’action avec un enthousiasme qui portait ses fruits.

Mais, bien entendu, rien n’est gratuit dans ce bas monde et, au fil des ans, j’avais « réussi » à accumuler quelques dettes qui se multiplièrent de façon exponentielle.

Tout a ses limites, même la patience des banquiers et, en 1997, je me sentis vraiment comme étranglé par les dettes. Je m’étais enfoncé au point que je me voyais plonger toujours plus profondément et les conséquences devenaient redoutables, aussi bien pour nos multiples activités communautaires que pour notre famille.

Je me rendis au Ohel, au cimetière Montefiore à Queens, là où repose le Rabbi, pour prier de tout mon cœur : je suppliai en pensée le Rabbi de m’aider à continuer notre Chli’hout, de nous sauver de ce gouffre sans fond et de nous envoyer un signe que nous devions continuer malgré tout. Je sortis du cimetière, le cœur un peu plus léger, confiant que, certainement, le Rabbi trouverait le moyen de nous répondre de la meilleure façon possible.

Le même jour, j’avais prévu de téléphoner à trois personnes susceptibles de m’aider financièrement. La somme la plus importante que je pensais pouvoir en obtenir devait s’élever peut-être à 500 dollars, ce qui était dérisoire par rapport à l’ampleur de mes dettes. En sortant du Ohel, avant même d’entrer dans la grande salle pour prendre un café, je composai le premier numéro. A ma grande surprise, je joignis immédiatement la personne à qui je souhaitais parler alors que, la plupart du temps, je devais renouveler plusieurs fois mon appel avant de l’avoir personnellement au bout du fil. Nous avons bavardé comme s’il avait tout le temps disponible pour moi puis il m’invita à me rendre à son bureau car il avait quelque chose d’important à discuter avec moi. Encore sous l’effet de ma courte visite au Ohel, je me sentais des ailes et me demandais si, peut-être… l’aide du Rabbi n’était pas déjà en train de se matérialiser.

Quand j’arrivai dans son bureau quelques instants plus tard, il m’expliqua qu’en tant que comptable, il avait conseillé à un nombre restreint de ses clients d’acheter, quelques années auparavant, plusieurs copropriétés. A cause des lois fiscales en vigueur à l’époque, il avait calculé qu’il serait profitable pour eux de les offrir en cadeau à des œuvres charitables ; il avait d’ailleurs pensé que le mouvement Loubavitch saurait en faire le meilleur usage. Il avait même proposé de prendre en charge toute la procédure légale avec les ventes impliquées en notre faveur. Le montant de ces transactions allait bien au-delà de mes rêves les plus fous et, non seulement couvrirait nos dettes mais nous permettrait d’augmenter nos activités à un rythme accéléré.

Les copropriétés étaient au nombre de douze et elles rapportèrent approximativement trois cent mille dollars chacune… Inutile de préciser que ceci donna une formidable impulsion à nos institutions éducatives et culturelles, nous permettant même d’amener d’autres Chlou’him pour diriger nos communautés de Long Island.

Une fois que toutes les transactions furent menées à bien et que tout fût vendu de la meilleure manière possible, je me hasardai à demander à mon ami comptable pourquoi il avait eu l’idée d’affecter toutes ces sommes à l’expansion de nos activités. Bien qu’il ait toujours été un fidèle ami de Loubavitch, je savais qu’il était aussi très impliqué dans le développement d’autres organisations juives, ce qui était tout à son honneur : ainsi, il était trésorier de la synagogue qu’il fréquentait. Il répondit qu’une telle idée ne l’avait pas effleurée tout de suite mais qu’elle lui avait trotté dans la tête juste au moment où nous avions bavardé quand j’étais sorti du Ohel…