Semaine 27

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Editorial

Joli mois de juillet !

Le beau mois de juillet, rien ne peut jamais lui retirer sa magie particulière ! Bien sûr, quand le soleil est au rendez-vous, les choses sont plus faciles, comme plus évidentes. Mais, même si n'est pas obligatoirement le cas, il y brille une autre lumière et c'est une autre chaleur qui pénètre chacun. C'est cette lumière et cette chaleur-là qui naissent dans le cœur et s'y développent jusqu'à emplir tout ce que l'on est et aussi ce qui nous entoure. Et cela porte un nom : Gan Israël. De fait, les centrés aérés commencent à présent et quelque chose a changé dans le monde.
Il est vrai que l'événement n'est pas nouveau, que, d'année en année, les enfants retrouvent cette espèce de chemin du paradis que sont les Gan Israël. Mais la répétition ne fait rien à l'affaire. La joie est toujours renouvelée et peut-être porte-t-elle encore plus haut et plus fort. Un Gan Israël – au nom si évocateur « jardin d'Israël » – c'est un lieu où, pendant tout un mois, les enfants rient, vivent, apprennent, ressentent. Ils renforcent, et parfois redécouvrent, la conscience que le judaïsme leur appartient comme il a appartenu à leurs ancêtres et comme il sera la propriété pleine et entière de leurs descendants. Tout cela devient le tissu même de leur existence. Les centres existent dans toute la région parisienne et ailleurs et ils ouvrent leurs portes, prêts à accueillir tous ceux et celles que le bonheur attire, et avec raison.
En ces temps de mondialisation – d'uniformisation des cultures – où l'on s'interroge parfois sur la pérennité de notre manière de voir le monde et d'y vivre sereinement, les Gan Israël constituent une réponse. Etre fidèle à son histoire, ne pas oublier, sans bâtir un monde clos et sclérosé. Construire un avenir dont les profondes racines garantissent la solidité en gardant la voie ouverte à tous les possibles. Quand des enfants croient en ce dont ils sont les porteurs, quand ils s'engagent dans les jours qui passent avec toute l'assurance qu'ils expriment, quand la joie éclaire tous les visages, c'est plus qu'un combat qui est gagné. C'est une victoire qui s'avance. Belle victoire, obtenue par la paix, qui est, pour cela, un gage de paix, pour soi et pour le monde. Bienvenue aux Gan Israël.

H.Nisenbaum

Etincelles de Machiah

Machia'h en chacun

La capacité de Machia'h à délivrer tout le peuple juif vient du fait qu'il possède un lien avec le peuple tout entier c'est-à-dire qu'il existe une partie de lui en chaque Juif.
C'est ainsi qu'il faut comprendre la déclaration de Moïse (Bamidmar 11 : 21) : «Le peuple au sein duquel je suis est constitué de six cent mille hommes». Il signifie, par ces mots, qu'une parcelle de lui-même se trouve littéralement dans chacun des individus concernés.
C'est grâce à cela qu'il put tous les libérer d'Egypte.
(d'après un commentaire du Rabbi de Loubavitch, Pessa'h 5743) H.N.

Vivre avec la Paracha

Matot

Les enfants de Reouven et les enfants de Gad possédaient de nombreux troupeaux ; et ils virent la terre de Ya'zer et la terre de Guilad et voici que c'était une terre pour pâturage... Et ils dirent (à Moché) : «Si nous avons trouvé grâce à tes yeux, que cette terre soit donnée en possession à tes serviteurs. Ne nous conduis pas au-delà du Jourdain... Nous construirons ici des étables pour notre troupeau et des villes pour nos enfants» (Nombres 32 :1,5,16)
Ils parlèrent d'abord de leurs troupeaux et seulement après de leurs enfants. Moché leur dit : «ce n'est pas ainsi ! Donnez la priorité à ce qui est prioritaire, et que ce qui est secondaire soit secondaire. (Rachi sur le verset 16)

Dans le 32ème chapitre de Bamidbar, la Torah décrit la façon dont les tribus juives de Réouven et Gad s'installèrent sur la terre située à l'est du Jourdain.
Les Enfants d'Israël étaient en route pour la terre de Canaan quand ils furent attaqués par les armées de Si'hon et de Og dont les territoires se situaient sur la rive est du Jourdain. Ces deux rois furent vaincus et leurs terres conquises. Les tribus de Gad et de Réouven, qui possédaient beaucoup de bêtes, demandèrent que leur soient attribuées ces terres, riches pâturages, au lieu de leur part en terre de Canaan, à l'ouest du Jourdain.
Cette requête contraria beaucoup Moché. Quarante ans plus tôt, leur rappela-t-il, le Peuple d'Israël était sur le point de pénétrer en terre de Canaan. Mais à la suite du rapport défavorable des explorateurs, décrivant ce pays comme «une terre qui consume ses habitants», ils avaient rejeté la Terre Promise. D.ieu avait alors décrété qu'ils resteraient dans le désert pendant quarante ans, jusqu'à ce que se lève une nouvelle génération, prête à accepter le don et à relever les défis de l'entrée en Israël.
Et maintenant, poursuivit Moché s'adressant aux membres des tribus de Réouven et de Gad, vous réitérez le péché des explorateurs. Les deux tribus répondirent à Moché qu'elles avaient l'intention de s'installer à l'est du Jourdain, construisant des «étables pour nos troupeaux et des villes pour nos enfants». Elles promirent également qu'elles pénètreraient en Terre de Canaan avec toutes les autres tribus et les aideraient à la conquérir, marchant à l'avant-garde de l'armée. Ce n'est qu'une fois que les autres tribus se seraient installées à l'ouest du Jourdain qu'elles reviendraient sur les terres allouées à l'est.
Mais en quoi ces mots répondent-ils à la réprimande de Moché ? Peut-être sont-ils en effet cohérents par rapport aux premiers mots de Moché («vos frères partiront-ils à la guerre pendant que vous serez assis ici ?»). Mais ils n'ont rien à voir avec le point central de la critique de Moché, à savoir que, tout comme la génération précédente, ils rejetaient la mission divine de s'installer en Canaan. Or, et de façon tout à fait surprenante, Moché accepta leur proposition. Comment expliquer ce revirement ?

La vision d'un berger
La 'Hassidout explique que la faute des explorateurs venaient de leur refus de s'impliquer dans les aspects matériels de la vie terrestre. Ils ne voulaient pas renoncer à la vie spirituelle dont ils jouissaient dans le désert. Quelle que soit la spiritualité qui pourrait se révéler, ils ne se sentaient pas prêts à prendre de risques : «c'est une terre qui dévore ses habitants» ! Ils redoutaient de sombrer dans la matérialité, dans le matérialisme.
Mais contrairement aux explorateurs et à leur génération, ce n'est pas la peur de la vie matérielle qui incita les tribus de Gad et de Réouven à demander ces territoires à l'est du Jourdain. Bien au contraire, ils voulaient s'installer sur cette terre pour construire des villes et des ranchs, élever leurs troupeaux sur ses pâturages. Leur supplique : «ne nous fais pas traverser le Jourdain» n'exprimait pas le refus de libérer les «étincelles» de spiritualité ensevelies dans la terre mais plutôt une attirance pour un travail de révélation d'une énergie divine encore plus enfouie dans la matérialité (en dehors de la Terre Sainte) et donc plus élevée. C'est pourquoi ils dirent qu'ils construiraient d'abord des abris pour leurs troupeaux et seulement après des villes pour leurs enfants. Comme le souligna Moché, il aurait été plus approprié de s'occuper d'abord des besoins humains. Mais ils savaient que l'énergie divine la plus sublime est enfouie dans les endroits les plus bas!

Les dynamiques du besoin
Mais reconnaître le potentiel spirituel d'un lieu «bas» n'est pas suffisant. Il n'est pas possible à toutes les âmes d'aller s'aventurer n'importe où, dans le but d'en extraire les étincelles divines. D.ieu Lui-même en a tracé les limites en décrétant dans Sa Torah les 365 interdictions qui empêchent toute implication dans ce que nous ne sommes pas capables d'élever. Et même dans ce qui est permis, nous devons être très attentifs à nos limites afin de ne pas tomber dans le piège de la matérialité, en voulant en extraire le potentiel divin.
Les explorateurs s'étaient trompés. Mais les territoires désirés par les tribus de Gad et de Réouven ne faisaient pas partie du mandat divin pour s'installer sur la terre. Comment pouvaient-ils savoir qu'ils seraient capables de surmonter ce défi ?
La première règle dans la vie matérielle (après avoir distingué le permis de l'interdit) est de faire la distinction entre le nécessaire et le superflu. Si une certaine ressource matérielle correspond à un besoin impératif de la personne, elle peut alors supposer qu'elle est capable d'en exploiter le potentiel divin. Car si la Providence Divine l'a mise dans une telle situation, c'est que D.ieu lui a donné les moyens de surmonter le défi. Par contre, quand on se trouve face à un luxe, une chose qui n'est pas nécessaire en soi, il nous faut être particulièrement prudent, de peur d'être consumé et rabaissé par ce qu'on tente de sublimer.
C'est pourquoi les membres de Réouven et de Gad dirent à Moché : «la terre... est un pâturage... ; et tes serviteurs ont des troupeaux». En d'autres termes, la Providence Divine nous a dicté de gagner notre subsistance en élevant des troupeaux, rendant donc cette terre adéquate pour nos besoins matériels. Nous avons donc confiance que nous possédons l'aptitude pour la développer correctement et en exploiter le potentiel de spiritualité.

L'entraînement à la spiritualité
Même après avoir identifié notre tâche sur terre, l'endroit ou la chose auxquels nous allons travailler pour en libérer toute la spiritualité, nous devons tout d'abord nous «entraîner». C'est là le sens profond de l'éducation. Avant qu'un être humain soit plongé dans un monde grossier et matérialiste, on le place dans un environnement spirituel par ses idées et ses valeurs. Ainsi, même lorsqu'il s'aventurera dans la vie matérielle, ses références essentielles resteront d'ordre spirituel. C'est pourquoi l'entrée d'Israël dans sa terre devait être précédée d'une période d'existence spirituelle dans le désert.
Et avant que les tribus de Réouven et de Gad puissent s'installer sur les terres à l'est du Jourdain, elles devaient participer à la conquête de la terre la plus sainte. Et de fait, vu le plus grand défi auquel ils allaient être confrontés, leur implication pour la Terre Sainte devait excéder celle des autres tribus qui s'installeraient dans la Terre-même, à l'ouest du fleuve. Ce n'est qu'après qu'ils auraient combattu au front, dans les batailles pour la Terre Sainte, et aidé leurs frères dans leur installation qu'ils pourraient être sûrs d'être capables de relever le défi d'une terre encore plus matérialiste et de dévoiler son potentiel divin.

Le Coin de la Halacha

Quand commencent « les neuf jours » ?

A partir de Roch 'Hodech Av (cette année lundi 8 juillet 2013), on ne mange pas de viande et on ne boit pas de vin (sauf Chabbat) en souvenir des jours terribles qui aboutirent à la destruction du Temple de Jérusalem.
On ne fait pas de couture, on ne lave pas de linge (sauf pour les petits enfants ou les grands malades) et on ne repasse pas. On ne met pas de vêtements fraîchement lavés et repassés, sauf s'ils ont déjà été portés quelques instants avant cette période. On ne prend pas de bain et on évite les pratiques sportives dangereuses (par exemple la baignade en piscine ou à la mer).
On évite de passer en jugement.

Qu'est-ce qu'un Siyoum ?
Un «Siyoum» est une fête qu'on organise lorsqu'on a achevé l'étude d'un traité talmudique. Le Rabbi avait demandé qu'on organise un Siyoum pendant chacun des «neuf jours» puisqu'une telle joie sainte est permise durant cette période. On peut participer à un Siyoum sur certains sites Internet ou en écoutant chaque jour à la radio juive (aux alentours de 14h 30) une personne qui achève l'étude d'un traité. Restez à l'écoute !
F. L.

Le Recit de la Semaine

Un mariage béni

Récemment j'ai pris part à une conférence par téléphone qui réunissait vingt-neuf personnes. Non, ce n'était pas pour régler des affaires commerciales mais c'était une réunion familiale virtuelle. C'est d'Ukraine, de France, d'Alaska, du Texas, de New York et d'Ohio que nous avons téléphoné, nous, vingt-huit enfants, gendres et belles-filles d'une seule femme : ma mère qui fêtait son soixantième anniversaire.
Après que chacun des dix-sept enfants eut brièvement donné des nouvelles de sa (petite) famille, une de mes sœurs demanda : «Quel est le secret de la réussite de votre mariage ? Comment avez-vous réussi, toi et papa, à élever une si grande famille et, de plus, à instiller en chacun d'entre vos enfants une telle assurance, un tel bonheur de vivre et un tel sens des responsabilités communautaires ?» (Nous sommes pratiquement tous des «Chlou'him», des émissaires du Rabbi, dispersés aux quatre coins du monde).
Ma mère apprécia la question mais, avec son humilité et son pragmatisme habituels, insista que ce n'était pas si compliqué : «Chaque jour et ses préoccupations, chaque enfant en son moment... Il suffit de faire ce qui doit être fait... !»
Nous avons demandé plus d'explications. Ne s'était-elle jamais inquiétée comment acheter pour chacun les vêtements dont il avait besoin ? Ne se faisait-elle pas des soucis avec les problèmes d'argent ? C'est alors que mon père prit la parole. «Vous oubliez de prendre en compte toute l'histoire, dit-il. Si je vous raconte ma vie avant vous, vous comprendrez mieux».
A 12 ans, il avait fui l'avancée nazie pour la Roumanie puis la Russie communiste. Là, il avait constamment souffert, non seulement des terribles conditions de survie physique mais aussi d'une persécution constante pour ses croyances religieuses tandis qu'on lui refusait une permission de sortie et un visa qui lui auraient permis de quitter le pays.
Finalement à 19 ans, il tenta de traverser la frontière pour s'enfuir en Pologne. Mais le passeur qui lui avait extorqué une grosse somme d'argent le dénonça à la police soviétique et mon père fut condamné à vingt-cinq ans de travaux forcés en Sibérie. Quand, heureusement, Staline mourut sept ans plus tard en 1953, mon père fut libéré avec beaucoup d'autres prisonniers politiques.
Il n'avait jamais osé rêver qu'il survivrait à toutes ces épreuves mais il y parvint. Il n'avait jamais osé rêver qu'il trouverait une jeune fille juive qui serait prête comme lui à vouer sa vie pour le judaïsme et qui accepterait les sacrifices quotidiens nécessaires pour élever des enfants juifs pratiquants en Russie Soviétique. Mais on lui présenta ma mère. En 1967, bien avant la chute du rideau de fer, il reçut enfin la permission de quitter l'U.R.S.S. avec toute sa famille (moi inclus) et put s'établir en Israël.
«Après tous ces miracles, conclut mon père, je devrais m'inquiéter pour quelques morceaux de pain ? Si D.ieu m'a donné la force de survivre à toutes ces difficultés, il peut certainement me donner la force pour travailler et pourvoir dignement aux besoins de ma famille».
Nous l'avions écouté attentivement et, en silence, nous avons médité cette philosophie.
Maintenant que ma femme et moi-même nous avons nous aussi des enfants, je peux vraiment apprécier l'incroyable dévouement de mes parents et de tous ceux qui élèvent de grandes familles. Je sais que cela implique de longues journées et de courtes nuits, souvent entrecoupées par les cris et les biberons de l'un ou l'autre des enfants. Mais je connais aussi la fierté, la joie et le bonheur qu'apportent à ses parents chaque enfant. Le proverbe, souvent cité par le Rabbi : «Celui qui donne la vie au monde entier peut aussi donner de quoi vivre à tous les enfants et à tous les parents» se réalise chaque jour devant nos yeux.
Si cela était vrai dans chaque génération, combien plus ceci est vrai à notre époque, alors que notre peuple a été si cruellement décimé dans les fours d'Auschwitz !
J'aime à raconter la réplique d'une femme juive qui attendait son cinquième enfant. Un de ses voisins, en s'en apercevant, lui demanda : «Comment ? Encore un ? Combien d'enfants comptez-vous mettre au monde ?»
Elle le regarda droit dans les yeux et répondit calmement : «Six millions !»

Ce mardi 10 Tamouz, ses dix-sept enfants ont enterré Rav Moshe Greenberg en Terre Sainte. Que son souvenir soit une source intarissable de bénédictions pour son épouse, ses descendants aux quatre coins du monde occupés à répandre le judaïsme et tout le peuple juif !

Rav Zushe Greenberg
Chabad Center of Solon, Ohio (USA)
Traduit par Feiga Lubecki