Lettre n° 193

Par la grâce de D.ieu,
Vendredi 8 Elloul 5705,

Au 'Hassid qui craint D.ieu et mène à bien sa mission
avec fidélité, important donateur, le Rav Ch. D. Ganelès(1),

Je vous salue et vous bénis,

Par nos amis, le grand Rav et 'Hassid très actif et diligent, Rav Ch. A. Kazarnovsky et le très cher 'Hassid, qui se consacre aux besoins communautaires, Rav D. B. 'Haskin, j'ai bien reçu votre don, destiné à l'impression, par ronéotype, des causeries du Rabbi Rachab(2).

Il est sûrement inutile de vous expliquer la grande importance de cette impression, le plaisir qu'elle procure à l'âme du Juste. Grâce à votre don, quiconque étudiera cette causerie fera que les lèvres du Juste remuent dans la tombe, qu'il le ressente, en son âme, dans la Yechiva céleste. Peut-on imaginer quelqu'un de plus grand que le roi David qui souhaitait, implorait le Maître du monde que ses enseignements soient répétés, afin qu'il puisse résider dans les deux mondes à la fois, c'est-à-dire que ses lèvres remuent?

En rapportant des propos au nom de celui qui les a dits, on fait remuer les lèvres du Juste uniquement lorsqu'on les prononce. A l'opposé, quand on offre de son argent pour retranscrire et recopier les livres du Juste, on obtient que celui-ci renforce le mérite du donateur, dès lors que quelqu'un étudie ce livre, où qu'il se trouve dans le monde.

Ce qui vient d'être dit s'applique à chaque homme. Mais vous-même possédez un mérite particulier, car vous avez été l'un de ses disciples. Le Zohar établit qu'un homme doit honorer son père également après qu'il ait quitté ce monde, lui témoigner du respect dans les deux mondes à la fois. Or, commentant le verset "tu les enseigneras à tes fils", nos Sages expliquent: "Il s'agit des disciples". Les élèves d'un homme sont considérés comme ses enfants, comme le dit le Sifri. Le Rambam en fait état dans son Michné Torah.

Tout ce que l'on obtient est accordé "mesure pour mesure" et il y a donc tout lieu de penser que, tout comme le Juste vit dans les deux mondes lorsque l'on répète son enseignement, la récompense du donateur sera spirituelle et matérielle, avec tout le bien matériel et spirituel.

Avec ma bénédiction de Techouva immédiate, délivrance immédiate,

Rav Mena'hem Schneerson,
Directeur du comité exécutif(3)

N. B. : Nos Sages rapportent que certains voulurent tout particulièrement que leurs explications soient répétées en leur nom, par exemple le roi David, Rabbi Yo'hanan, Rav Chéchet.

Il faut en conclure que la nécessité de "résider dans Ta tente pour l'éternité" les toucha, tous les trois, plus que tout autre. On peut l'expliquer de la manière suivante:

A) David tenta par tous les moyens d'expier sa faute et d'établir, aux yeux de tout Israël, qu'elle avait bien été pardonnée, comme le disent les traités Chabbat et Taanit. Or, il est dit que l'on peut étudier la Torah auprès d'un maître uniquement lorsqu'on le perçoit comme un ange. C'est pour cela que David voulut que l'on répète son enseignement. Ainsi, il pouvait avoir la confirmation que sa faute avait bien été pardonnée.

B) Le traité Bera'hot enseigne que Rabbi Yo'hanan perdit tous ses enfants et le Séder Hadorot se demande s'il eut, par la suite, un autre fils. Pour que son enseignement ne soit pas perdu, il devait donc former des disciples, capables de perpétuer son héritage, comme l'établit le traité Baba Batra. Il s'efforça donc que son enseignement soit largement répété.

C) Le Chaar Haguilgoulim et le Séfer Haguilgoulim donnent l'explication de la phrase que prononçait Rav Chechet: "Mon âme se réjouit en Toi, elle T'appelle, elle T'apprend". En effet, Rav Chechet savait que son âme avait vécu une première vie dans le corps de Baba Ben Bouta, dont la vie avait été parfaite. Au cours de la seconde vie, qui était la sienne, il ne lui restait donc que très peu de choses à accomplir.

En pareil cas, la récompense de la Torah et des Mitsvot accomplies dans la seconde vie sont uniquement pour l'âme et non pour le corps. En effet, lors de la résurrection des morts, son âme retournerait dans le premier corps(4), qui a permis la majeure partie de ses accomplissements. En conséquence, le corps de Rav Chéchet était triste. Il constata donc que "mon âme se réjouit", mais non mon corps.

Mais, à mon humble avis, on peut sans doute avancer que tout cela était vrai uniquement pour ses autres accomplissements, dans le domaine de la Torah et des Mitsvot. Par contre, lorsque l'on répète l'enseignement de Rav Chéchet, ses lèvres remuent dans la tombe, en ce monde matériel. Il est alors bien clair que les lèvres de son corps physique sont en mouvement. C'est pour cela qu'il s'efforça de faire répéter son enseignement.

Néanmoins, il disait "mon âme se réjouit en Toi", car il faisait allusion, par ces mots, à son étude de la Torah, comme l'explique le traité Pessa'him. Par contre, la répétition de son enseignement est bien entendu celui qu'il a transmis à ses élèves(5).

Notes

(1) Le Rav Chmouel Dov Ber Ganelès.
(2) Il s'agit du Torat Chalom.
(3) Du Merkaz Leïnyaneï 'Hinou'h.
(4) Voir, à ce propos, les lettres n°200, 205, 209.
(5) Et qui concerne donc son corps.